23 mars 2012

Le Mémorial de l’abolition de l’esclavage a oublié Jules Verne

Avant même l’ouverture du Mémorial de l’abolition de l’esclavage, l’essentiel de son contenu, les citations reproduites sur des lames de verre, est disponible en ligne. À côté de textes juridiques et philosophiques, on y trouve des extraits d’œuvres de Bob Marley, Toni Morrison ou Léopold Sedar Senghor.

Mais rien de Jules Verne, qui a plusieurs fois condamné l’esclavage dans ses œuvres. Nous sommes pourtant à Nantes, à mi-chemin entre sa maison natale de l’île Feydeau et son musée de la butte Sainte-Anne. On se serait donc attendu à lire dans le Mémorial des extraits de son ouvrage le plus anti-esclavagiste, Un capitaine de quinze ans. Ceux-ci, par exemple :
  •  « La traite ! Personne n’ignore la signification de ce mot, qui n’aurait jamais dû trouver place dans le langage humain. Ce trafic abominable, longtemps pratiqué au profit des nations européennes qui possédaient des colonies d’outre-mer, a été interdit depuis bien des années déjà. Cependant, il s’opère toujours sur une vaste échelle, et principalement dans l’Afrique centrale. En plein XIXe siècle, la signature de quelques États qui se disent chrétiens, manque encore à l’acte d’abolition de l’esclavage. »
  • « L’islamisme est favorable à la traite. Il a fallu que l’esclave noir vînt remplacer, dans les provinces musulmanes, l’esclave blanc d’autrefois. Aussi, des traitants de toute origine font-ils en grand cet exécrable trafic. Ils apportent ainsi un supplément de population à ces races qui s’éteignent et disparaîtront un jour, puisqu’elles ne se régénèrent pas par le travail. »
Cet oubli n'est-il pas invraisemblable ? Car bien sûr, il ne peut s'agir que d'un oubli et non d'une éviction délibérée !
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Photo : extrait de la couverture de l'édition Lidis (1961) illustrée par Jacques Poirier.

6 commentaires:

  1. J'avais rencontré JMA en janvier 2011 et signalé l'apport de Jules Verne - j'ai vu le maire prendre note - la suggestion sur son cahier - Evidemment je suis déçu - Cependant, ayant écouté les débats d'hier au château, j'ai vu que dans la salle arrière (le harnachement 2e étage) il y avait des grands panneaux sur les principaux abolitionnistes...dont Jules ! Signé d'un certain Barreau (universitaire, je pense)- J'ai photographié le panneau ; il est à la dispo de qui me le demande à yves.laine@sfr.fr

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  2. Ah ! Donc, l'éviction de Jules Verne du Mémorial ne serait pas un oubli mais un choix délibéré ?
    Les positions de Jules Verne sont bien connues. Si vous tapez "'Jules Verne' + 'esclavage'" dans la recherche Google, vous obtenez 2.350.000 résultats. Et pour "'Jules Verne' + 'slavery'", 13.900.000 résultats ! Notre Mémorial doit bien être le seul endroit où l'on parle d'esclavage sans parler de Jules Verne... Paradoxal, non ?

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  3. Xavier Millieme26 mars 2012 à 10:15

    A lire ou relire, "Cinq semaines en Ballon", dans lequel Jules Verne fait dire dans la bouche de ses personnages des choses qui contrastent un peu avec sa position anti-esclavagiste.

    Comme quoi, ça a peut-être un peu freiné certains...

    Extrait:

    « Quelques minutes après, le Victoria s’élevait dans l’air et se dirigeait vers l’est sous l’impulsion d’un vent modéré. – En voilà un assaut ! dit Joe. – Nous t’avions cru assiégé par des indigènes. – Ce n’étaient que des singes, heureusement ! répondit le docteur. – De loin, la différence n’est pas grande, mon cher Samuel. – Ni même de près, répliqua Joe. »

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  4. A mon avis, il serait difficile de mettre en regard la position réfléchie, philosophique, de Jules Verne envers l'esclavage et une réplique "humoristique" d'un personnage dans un dialogue enlevé au cours d'une scène d'action. (A la limite, on pourrait se demander si l'avis de Joe ne manifeste pas plus de respect pour les singes que d'irrespect pour les indigènes. Joe est un personnage positif, toujours optimiste, et Jules Verne en dit même : " S’il eût fallu nommer un professeur de gymnastique pour les singes du Zoological Garden, qui sont bien dégourdis cependant, Joe aurait certainement obtenu cette place" !). Et puis, "Cinq semaines en ballon" est le premier "voyage extraordinaire" de JV. Paru quinze ans plus tard "Un capitaine de quinze ans" bénéficiait sûrement d'une réflexion plus aboutie.

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  5. Oui c'est vrai et par aillerus, Jules n'était antisémite que parce que c'était à la mode, rien de plus, faut pas lui en vouloir! Et ça n'enlève rien à son humour légendaire!

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