31 mars 2013

Mànran à la cité des congrès

Allez, une fois n'est pas coutume, un peu de positif pour fêter Pâques, un peu de chaleur pour oublier l’hiver qui n’en finit pas : samedi prochain, de 19h15 à 20h15, ne loupez pas Mànran à la cité des congrès de Nantes dans le cadre du festival Eurofonik. Mànran est un phénomène. En moins de trois ans, ce groupe de folk rock écossais s’est imposé aux premiers rangs de la scène musicale du Royaume (encore) Uni avec des chansons en anglais et en gaélique sur des airs contemporains d'inspiration traditionnelle associant cornemuse écossaise, uilleann pipes, flûte, guitares et percussions. Il lancera son deuxième CD à la mi-mai (un single en gaélique, Latha Math, est également disponible en téléchargement). 

Évidemment, ses rythmes sauvages et ses accents puissamment tourbés ne plairont pas à tout le monde. Mais quand on les a vus un soir de décembre déchaîner une bande compacte de solides gaillards et d'ados en mini-jupe, pinte de Caledonian en pogne, dans une salle du port de Mallaig battu par la tempête et les rafales de neige, on peut en jurer : si ces Écossais-là* sont capables de réchauffer la côte ouest des Highlands en hiver, ils balaieront d’une pichenette nos frimas nantais.
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* Le groupe compte aussi un Irlandais, Ryan Murphy, venu combler le vide laissé par le départ du flûtiste Calum Stewart l'an dernier. Les autres membres du groupe sont Norrie "Tago" MacIver, Gary Innes, Ewen Henderson, Ross Saunders et Scott Mackay.

26 mars 2013

La Valse des millions : Su' l' pont de Nantes, un bal y est donné (bis)

Juste avant chaque élection municipale, on décide de construire un pont dans l’agglomération nantaise. Les ballons d’essais lancés ces derniers temps dans Presse Océan et Ouest France ("Un pont de plus, bras de la Madeleine, dans 7 ans ?")  montrent que cette règle empirique devrait être respectée en 2014.

Décider de construire un pont a tous les avantages pour qui s’apprête à partir en campagne électorale. La gauche applaudit la dépense publique et l'équipement collectif. La droite applaudit le béton qui fait marcher le commerce. Les automobilistes s’imaginent que leur sort va s’améliorer. Les riverains ne subissent pas encore les ennuis du chantier ni les contribuables ses coûts. On n’ira pas jusqu’à dire que l’attribution de gros marchés de travaux publics permet d’utiles à-côtés financiers, mais si jamais il y en avait, ça ne pourrait pas nuire.

Et puis, avantage majeur, la recette pourra resservir la fois d’après. Car il y aura toujours des ponts à bâtir : lutter contre les embouteillages en construisant de nouveaux équipements n’apporte en général qu’une amélioration transitoire. Plusieurs études l’ont démontré depuis une quinzaine d’années, en particulier celles de John Sterman. On l’a bien vu autour de Nantes : passer à 2x2 voies les routes de Cholet et de Pornic a entraîné une flambée de l’étalement urbain dans le vignoble et le pays de Retz… alimentant ainsi les encombrements qu’on prétendait supprimer. Tout est toujours à refaire !

Le problème n’est pas quantitatif et local mais humain et systémique. Comme le notait Presse Océan le 16 mars, les ponts existants suffiraient largement si les usagers ne désiraient tous les emprunter en même temps. Tant que tout le monde voudra passer de front, construire un nouveau pont aboutira surtout à resserrer les heures de pointe sans réduire le volume total d’embouteillages ni la pollution et les pertes de temps qui vont avec.

Après avoir fait tout son possible pour chasser les voitures de la ville en supprimant stationnements et voies de circulation, Nantes Métropole va-t-elle faire tout son possible pour les y ramener en multipliant les ponts ? Ce serait un aveu d’échec ou une incohérence. L'un n’empêche pas l’autre, d'ailleurs.

Mais puisque élection il y a, pont il y aura ! Et si l'on ne veut pas des autos, on y fera passer des trains. "Dans le temps, la question d'un pont à l'ouest qui permettrait de relier la gare à Chantenay se posera", avançait naguère Marcel Smets, urbaniste de l'île de Nantes*. La finalité, ce n'est pas la circulation, c'est le pont ! Et si l'on ne veut pas de trains non plus, on pourra encore en faire une piste de danse, au nom de la culture et de la création ! Voilà le sort des enfants obstinés, voilà le sort des enfants obstinés !
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* Entretien avec Philippe Gambert, Ouest France, 16 juillet 2010.

23 mars 2013

L’esclavage désormais tabou à Nantes ?

Depuis 2008, une résolution des Nations Unies fait de la journée du 25 mars un « Mémorial permanent en souvenir des victimes de l’esclavage et de la traite transatlantique des esclaves ». Notre Mémorial à nous a été inauguré le 25 mars 2012. Peut-être pour ne pas trop l’ancrer dans la repentance, Jean-Marc Ayrault avait préféré présenter cette date comme la « journée mondiale de lutte contre toutes les formes d’esclavage ».

Pour les commémorations de cette année, a-t-on repris le titre exact retenu par les Nations Unies ? Non, pour une raison fort simple : aucune commémoration n'est prévue ! Le site web du Mémorial « annonce » encore des événements de l’an dernier ; pour 2013, rien. À la date du 25 mars, on ne trouve rien à propos des victimes de l’esclavage sur le site web de Nantes Métropole ou celui de Nantes Tourisme. Même Nantes Green Capital, qui a tendance à repeindre en vert jusqu’aux A.G. d’amicales boulistes, n’a rien pu signaler autour du Mémorial.
Déjà le 2 décembre dernier, Le Voyage à Nantes, gestionnaire du Mémorial, avait snobé la « Journée mondiale pour l’abolition de l’esclavage », patronnée par les Nations Unies. On peut recopier à l’identique l’article alors publié sur ce blog :
La création du Mémorial, on l’a suffisamment dit ici, était une mauvaise idée. Sa réalisation a été calamiteuse. Ses délais ont largement dérapé. Son budget a explosé. Le résultat est très médiocre. Le choix des textes est fait en dépit du bon sens. Il aurait mieux valu ne pas le faire, mais enfin, puisqu’on l’a fait, autant le mettre en valeur.
De deux choses l'une : ou bien Le Voyage à Nantes s'est rendu compte que brandir ce monument est touristiquement inutile ou contre-productif, ou bien il ne fait pas son boulot. Cela dit, il lui reste quelques heures pour éviter de sombrer dans le ridicule en montant un événement-surprise. Vite, une petite flash-mob !

16 mars 2013

Le héron aux longues dettes emmanchées d’un long coût

Interrogés par Yves Aumont et Jean-Marie Biette dans Ouest France d’aujourd’hui, François Delarozière et Pierre Orefice lancent un curieux message, mi-cocorico, mi-SOS. Les Machines de l’île enregistrent des « excellents résultats »… mais elles ont moins de dix ans à vivre si l’Arbre aux hérons n’est pas réalisé au plus vite !

L’Arbre et les autres machines formeraient donc un tout ? C’est étrange : plus d’une fois, Pierre Orefice a souligné que chaque machine est une attraction en soi et qu’il n’est pas question de fonctionner comme un parc d’attraction. Le visiteur n’achète pas un forfait : il paie pour visiter la galerie, il paie pour se promener en éléphant, il paie pour faire un tour de manège. En moyenne, un visiteur achète 1,4 billet.

Ce qui permet au passage de revendiquer 505.244 « visiteurs » en 2012 là où il n’y en a en réalité que 360.000 environ. Parmi ces visiteurs, la proportion des étrangers est tombée à 6,8 % sur l’année. Pour les mois de juillet-août, elle a chuté de 12,39 % en 2011 à 9,17 % en 2012 malgré Le Voyage à Nantes ! Les résultats des Machines ne sont donc pas si « excellents » que ça.

Ils sont même franchement mauvais par rapport à ce qui avait été annoncé au conseil de Nantes Métropole le 18 juin 2004. On tablait alors sur un « nombre de billets vendus entre 215.000 et 310.000 pour une 1ère année pleine (…) ce qui en fonction des charges d’exploitation, montre que l’on peut raisonnablement tabler sur un équilibre d’exploitation. » Or, bien que le nombre de billets vendus ait toujours été dans la cible, les Machines n’ont jamais été capables d’atteindre l’équilibre. MM. Orefice et Delarozière précisent tranquillement que l’exploitation des Machines doit être financée à hauteur de 20 % par des subventions publiques. Chaque fois qu’un visiteur paie 8 euros sa balade en éléphant, les contribuables doivent y ajouter 2 euros !

Nantes Métropole s’est engagée jusqu’en 2025 à combler chaque année le déficit d’exploitation des Machines. Et il faudrait doubler la mise avec l’Arbre aux hérons ? Des édiles raisonnables chercheraient plutôt une locomotive touristique plus efficace et/ou moins coûteuse. C’est peut-être pour cela que Pierre Orefice et François Delarozière tentent d’obtenir une décision au plus vite. Douteraient-ils de la reconduction de l’équipe actuelle lors des municipales de 2014 ?

On hasarde de perdre en voulant trop gagner.
Gardez-vous de rien dédaigner ;
Surtout quand vous avez à peu près votre compte.

14 mars 2013

Lobbying pour NDDL (7) : un petit pavé de l’ours

« L’action se passe dans les Pays de la Loire, c’est-à-dire nulle part »
Sven Jelure, d’après Alfred Jarry, Ubu roi

« Auxiette sort l’artillerie lourde », titre Presse Océan ce 14 mars. Il est vrai que le président de la région des Pays de la Loire fait en général dans la lourdeur. Et puisque son appel d’offres pour des prestations de lobbying a fait long feu, il lobbyera lui-même. En l’occurrence, il publie un bref livre électronique intitulé Aéroport du grand ouest : pourquoi j’y crois. Cet acte de foi ne convaincra que les convaincus. Et amusera les autres.

La première chose qui chiffonne M. Auxiette dans les critiques envers le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est qu’« on le présente comme le bébé d’un seul homme ». Mais ce n’est pas pour proclamer qu’un bébé a un papa et une maman, façon Manif’ pour tous. Le problème serait plutôt que ce « seul homme » soit Jean-Marc Ayrault*. « Cet aéroport serait le projet de Jean-Marc Ayrault ? C’est faux ! » M. Auxiette tient à revendiquer sa copaternité : le pronom « je » figure 194 fois dans les 90 pages de son opuscule.

Le président du Syndicat mixte aéroportuaire a clairement la nostalgie de périodes plus roses. « C’est le gouvernement de Lionel Jospin qui a lancé un nouveau projet d’aéroport lors du comité interministériel du 26 octobre 2000 » rappelle-t-il. Le monde a-t-il évolué depuis lors ? Lui, non, en tout cas. « Je crois toujours au progrès », assure-t-il. « Au sens défini par les penseurs, humanistes et parfois socialistes, du 19ème et du début du 20ème siècle. » Ça ne nous rajeunit pas.

Ce n’est pas que M. Auxiette se berce d’illusions sur son cas. Les acteurs politiques d’aujourd’hui, écrit-il, ont commis un « péché » inattendu : « la naïveté. Cela peut sembler difficile à croire tant les personnalités engagées dans le débat public ont une réputation de calculateurs et de cyniques. » Qu’il se rassure : à le lire, on le croit sans peine.

Les chiffres ne sont pas son fort. Nantes Atlantique aurait selon lui une « capacité d’accueil maximale de 3,5 millions de passagers par an » et en a reçu 3.631.000 en 2012. A-t-on renvoyé chez eux les 131.000 passagers en trop, ou bien ce maximum n'en était-il pas un ? Il n’en dit rien mais se lance dans une explication pédagogique sur ce qu’est un aéroport saturé. « Pour faire simple : imaginez de vivre au quotidien ce que vous pouvez voir à la télé (ou que vous avez peut-être déjà vécu) un jour de grève en région parisienne […]. Eh bien un aéroport saturé, c’est cela au quotidien. » Sauf qu’à Nantes, la saturation ne menace que les week-ends de printemps…

Sur l’emploi, les chiffres de M. Auxiette ne sont pas très fiables non plus. « Il y a déjà 1.850 emplois directs à Nantes-Atlantique », assure-t-il. Et d’insister : « Ce chiffre est exact ». Pas de chance : le chiffre  « exact » figure dans une étude publiée le mois dernier par la CCI et il est de 1.986 très précisément**.

Il arrive à notre auteur de glisser carrément du côté de la mauvaise foi. « Nantes a été élue capitale verte européenne pour 2013 ! » rappelle-t-il. « Et vous croyez que si cet aéroport était le bétonnage dénoncé, le massacre écologique affiché, l’aberration pharaonique vilipendée, tel aurait été le cas ? » Eh ! bien oui, justement : comme NDDL est un projet de l’État et que le label capitale verte (qui au passage est décerné par un jury formé d’organismes officiels européens et non par élection) récompense les actions d’une ville, Nantes a pu faire semblant de rien. « Tout et n’importe quoi est dit », comme le précise aussitôt M. Auxiette.

Et pour mieux illustrer ce n'importe quoi, il s'engage dans un développement burlesque (qu'il est bon de lire deux fois pour mieux le savourer) : « On peut bien sûr prendre la pose du dandy qui préfère s’égayer des saveurs d’un riz cantonais réchauffé au four à micro-ondes mais je dois bien avouer que visiter la Chine égaye bien plus mes sens, même si cela m’oblige à prendre l’avion (ce qui fait encore partie des libertés individuelles). Mais cela pollue, m’objectera-t-on ? Sans doute, mais je ne suis pas de ceux qui prônent la disparition des avions, des trains, des voitures et des climatiseurs. »

Jacques Auxiette confirme un peu plus loin qu'il aime l’humour et le tourisme. « Qui envisage sérieusement de demander à un patriarche africain de parcourir à pieds les 5km qui le séparent d’un puits parce que sa voiture émet trop de CO2 ? », demande-t-il. Car chacun sait que le patriarche africain, à défaut d'avoir l’eau courante sur son évier, a une voiture dans son garage.

La moitié environ de ce petit livre de 90 pages est consacrée à une amère critique d’EELV/Les Verts : on croyait les avoir définitivement achetés contre quelques postes d’élus (quatre vice-présidences de région sur quinze – mais est-il bien raisonnable de rappeler que le président de la région a besoin d’être si abondamment assisté pour faire face à ses devoirs ?), et ils ont l’outrecuidance de rester hostiles à un nouvel aéroport ! Et puis les squatters de NDDL se comportent vraiment très mal. Mais encore une fois, ce n’est pas parce que certains des uns ont tort que les autres ont raison. M. Auxiette se présente vêtu de probité candide et de lin blanc, ce qui ne suffit pas à cacher ses gros sabots : avec son petit livre, il éveille la méfiance plus qu’il n’instaure la confiance.
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* Auquel M. Auxiette attribue par ailleurs, p. 53, la création du tramway nantais. Mais non, le papa, c'est pas lui ! La ligne 1 a été mise en service plus de quatre ans avant l'arrivée de Jean-Marc Ayrault à la mairie de Nantes.
** La même étude révèle que si le nombre de passagers à Nantes Atlantique a progressé de 87,4 % entre 2004 et 2012, ses retombées financières n’ont augmenté que de 41 % (dont il faudrait retrancher au moins 15 % d’inflation) et ses effectifs de 13,4 %. M. Auxiette est probablement très optimiste quand il estime que NDDL « devrait créer près de 4.000 emplois ».

07 mars 2013

Nantes piétonnise ici mais dépiétonnise là

À certaines heures de la journée, on s’écrase les orteils sur les trottoirs de la rue Pitre-Chevalier, du côté du pont Saint-Mihiel. Entre les élèves de l’école Sully, de Livet, de Saint-Stan’, de l’école Pivaut, les chalands qui vont à Talensac ou en reviennent, les clients de l'Intermarché et des divers commerces locaux, les étudiants de la cité Chanzy qui vont prendre leur tram vers les facs, les fonctionnaires et les contribuables qui se rendent au centre des impôts, les mères de famille avec poussette qui rejoignent la crèche flottante du quai Henri-Barbusse et tout simplement les habitants du quartier, les piétons sont légion.

Or ces trottoirs déjà surpeuplés sont en cours de rétrécissement à l'occasion de l'aménagement de la future ligne de Chronobus C6. Notez que la rue était déjà empruntée par une ligne de bus. Ce passage un peu étroit n’était sûrement pas très confortable pour les chauffeurs. L’inconfort sera désormais reporté sur les piétons. Des centaines ou des milliers de piétons chaque jour.

Un peu de bus gagné, pas mal de trottoir perdu : est-ce que ça valait le coût et les ennuis des travaux ?

05 mars 2013

Nantes, capitale verte : (3) Vous branchez le fil vert sur le bouton vert…

« La ligne verte n’ira pas bien loin », ricanait-on ici-même il y a six semaines. Gagné ! La ligne verte qui devait guider le visiteur à travers Nantes en 2013 a soudain disparu au mois de février. En toute discrétion, elle est devenue… un « fil vert ».

« Après le ‘fil rose’, suivez le ‘fil vert’ », enjoint désormais le site web de la ville de Nantes qui n’hésite pas à réécrire l’histoire, puisqu’il avait toujours désigné le trait de peinture de l’an dernier comme une « ligne rose ». Même traitement sur le site de Nantes Métropole : « A Nantes, les lieux verts à voir seront reliés par un fil vert, [...] à l’image du fil rose du Voyage à Nantes ». Toujours le syndrome de l’encyclopédie soviétique…

La mue de la ligne en fil s’est produite entre le 21 janvier, dernière apparition de la « ligne verte » sur un document officiel (le blog Nantes Just Imagine), et le 12 février, où le fil vert est apparu sur le site web de Nantes Métropole. De là à penser que l’analyse sémantique de la ligne verte proposée sur ce blog le 25 janvier a fait gamberger les édiles nantais…

Le fil vert est plus anodin. Le nom est porté par des services d’information à vocation écologique, des lignes de transport en commun, une randonnée à VTT, etc. Détail qu’on a sans doute oublié de vérifier, il a été déposé à l’INPI voici trois ans par le département des Hautes-Pyrénées. Mais comme le conseil général est massivement à gauche, il ne viendra sûrement pas chicaner la ville du Premier ministre.

Et puis, ce fil vert est sympa. Il fait irrésistiblement songer à la phrase culte de Robert Lamoureux dans On a retrouvé la 7ème compagnie -- une référence culturelle de premier ordre :

Vous branchez le fil rouge sur le bouton rouge,
le fil vert sur le bouton vert, vous appuyez, et plaf !

Il ne reste qu’à espérer un résultat meilleur. Ou alors, si j’connaissais l’con qu’a fait sauter l’pont !

04 mars 2013

Nantes, capitale verte : (2) au service de l’Aéroflorale II

Depuis le dépôt du dossier devant la Commission européenne, l’Aéroflorale II est une pièce maîtresse de l’année Nantes Green Capital. L’étonnante serre « volante » construite par l’association La Machine a joué un rôle dans l’attribution du label. Le communiqué officiel de la Commission en témoigne.

Le principe se défend puisque le premier objectif du prix Green Capital est de faire connaître aux villes européennes les bonnes pratiques environnementales de l’une d’elles. La réalité laisse davantage dubitatif. L’Aéroflorale n’illustre aucune bonne pratique : elle montre un spectacle, elle raconte une histoire... et elle consomme beaucoup d'énergie. Son association au prix Green Capital est au mieux un mélange des genres, au pire de la désinformation si le public prend au premier degré son storytelling (l’Aéroflorale vole, elle produit sa propre énergie, etc.). Le scénographe Lucas Thébault raconte ainsi comment il a équipé l’engin d’un « Chouffe-eau » censé récupérer la chaleur naturelle produite par le chou puant du Québec. Sauf que son chou est une vulgaire fougère et que la chaleur est produite par l’électricité d’une batterie. Si c’est ça les bonnes pratiques…

L’exposition « passera dans les villes européennes » assure la Commission. En réalité, l’Aéroflorale n’en visitera que quatre, dont l’une n’est d’ailleurs pas européenne. Et elle continuera sa vie indépendamment de Green Capital ; on la verra notamment à La Roche sur Yon en juin. Car l’Aéroflorale II n’appartient pas à Nantes Métropole : c’est la propriété de l’association La Machine. Conclue hors tout appel d’offres, la convention qui lie Nantes Métropole à La Machine est quasi léonine. Elle prévoit que Nantes Métropole se charge du « démarchage des villes susceptibles d’acheter le spectacle » et supporte « l’ensemble des frais de communication liés à la promotion et les frais engagés pour la promotion », et qu'elle aurait dû payer à La Machine « 67 740€ HT, par Ville manquante » si elle n'avait pas trouvé quatre volontaires. À moins, solution également prévue par la convention, de prendre en charge elle-même le coût du spectacle si la ville d’accueil ne veut pas payer ! (Il serait intéressant de savoir si les quatre villes en question, Bruxelles, Hambourg, Turin et Istanbul, paient le spectacle de leur poche ou se le font offrir par les contribuables nantais ; on ne le saura probablement pas car Nantes Métropole s’est engagée à « ne rien dire ou divulguer qui viendrait dénaturer le Spectacle ou en fausser les conditions ».)

On voit bien l’intérêt de la formule pour La Machine, on voit beaucoup moins bien son intérêt pour Nantes et les Nantais. Or l’addition finale pourrait être salée. « L’engagement financier global de Nantes Métropole au titre du spectacle et de son dispositif d’accompagnement dans les 4 Villes qui seront retenues ne pourra excéder 600K€ TTC », révèle la convention. « L’engagement financier de Nantes Métropole au bénéfice de la Machine est quant à lui au plus de 447K€ TTC. »

On se demande quelle mouche a piqué les élus nantais pour mettre ainsi les moyens de la collectivité au service d’une opération commerciale. Car l’Aéroflorale II, spectacle produit par La Machine, association de droit privé ayant son siège en Haute-Garonne et non à Nantes, est bel et bien de nature commerciale. Et les affaires marchent*. En tant qu’association, La Machine n’a pas le droit de répartir des bénéfices, mais elle paie des salaires. Sur 3,5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2011, elle a versé, hors charges sociales, 1.306.740 euros de salaires pour un effectif de vingt-cinq équivalents plein temps, soit en moyenne… 52.269,60 euros par tête de pipe** ! À titre de comparaison, l’association Le Cinématographe a payé 196.612 euros pour 8,65 salariés (moyenne 22.659 euros par personne). La Machine a aussi versé 38.620 euros de redevances pour concession de brevets ou licences ; elle disposait à fin 2011 de 2 millions d’euros de trésorerie.

Mais rien n’est trop cher pour les paillettes vertes.
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* La Machine, c'est tout à son honneur car bien d'autres s'en dispensent, satisfait à l'obligation de publier ses comptes au Journal officiel.
** Encore cet effectif comprend-il quatorze intermittents, dont on peut supposer qu’ils bénéficient en plus du régime des intermittents du spectacle…

02 mars 2013

Lobbying pour NDDL (6) : des déclarations qui sèment le doute

Y aurait-il un peu d’affolement chez les partisans d’un aéroport à Notre-Dame-des-Landes ? Copie de tweet à l’appui, Presse Océan rapportait mercredi qu’ils reprochaient à la Fédération nationale d'associations des usagers des transports d’avoir changé d’avis à propos de NDDL. La FNAUT a aussitôt dénoncé une attitude « pas admissible » : elle a toujours été hostile au projet.

C’est le genre d’information que des responsables régionaux auraient eu les moyens de vérifier ; ils ont tous les communicants et les documentalistes pour cela. « Les élus pro-aéroport enfoncent le clou », titrait Presse Océan. On n’est plus très sûr de ce qu’ils enfoncent en réalité. Une fois de plus, comment faire confiance à leurs arguments prospectifs si déjà leurs arguments rétrospectifs sont bancals ?