27 février 2011

Malakoff ou Bienakoff ?

La destruction par un incendie volontaire du centre commercial de Malakoff a suscité une nouvelle brassée de commentaires convenus sur ce « quartier défavorisé ». Défavorisé ? Malakoff, rappelle le site web de la mairie, a été construit « à l'écart de la ville, entre Loire et voies ferrées, séparée du canal Saint-Félix par un quartier en friche ».

Pourtant, tout le monde n’est pas du même avis : Malakoff, assurent d’autres, est un quartier « idéalement situé entre les bords de Loire et le quartier gare TGV ».

De qui est ce commentaire radicalement opposé à celui de la mairie ? Du site web de Nantes Métropole. Les services de Jean-Marc Ayrault ont parfois du mal à accorder leurs violons.

14 février 2011

Orefice de Nice, l'homme qui surfe sur les chiffres

Nice-Matin revient aujourd'hui sur l'accusation de plagiat lancée en mars dernier par Pierre Orefice contre un éléphant visible au Carnaval de Nice 2010 :
« Elephantasia », le pachyderme construit par les Povigna en hommage à Hannibal, déplaît à certains Nantais. Ces derniers reprochent au mammifère d'être la copie conforme du Grand Eléphant de l'île de Nantes, inauguré en juillet 2007. Défense de plagier, mais l'histoire se déballonne rapidement. L'envie de faire du bruit pour rien ne trompe personne !
Faire du bruit pour rien ? Voilà qui n'est pas aimable pour le patron des Machines. On avait préféré parler ici de barrissement médiatique.

Car ce bruit n'était pas « pour rien » ! En soulevant une polémique artificielle, Pierre Orefice a obtenu une jolie couverture de presse et suscité un mouvement d'intérêt pour son attraction. Cette histoire à la Clochéléphant n’était pas désintéressée.

Démonstration : Les Machines de l'île ont gagné 21.671 visiteurs sur l'année 2010 (+ 8,3 %). Or Pierre Orefice déclarait en juin 2010 une hausse de 20 % de la fréquentation au premier semestre, ce qui, par rapport aux six premiers mois de 2009, représente à peu près 22.500 visiteurs en plus. C'est-à-dire que toute la hausse de fréquentation de 2010, et même un peu plus, a été réalisée sur le premier semestre. La mobilisation suscitée par la polémique y a sûrement contribué.

Le revers de la médaille, bien sûr, c’est qu’il faudra trouver autre chose cette année.

L'éléphant de Nice. Copie conforme de celui de Nantes, vraiment ?

13 février 2011

Comment rejulesverniser l'éléphant

Sur l'île de Nantes, le Grand éléphant tourne en rond et a perdu des passagers en 2010. Est-il pour autant condamné au déclin ? Sûrement pas, d'innombrables événements pourraient relancer l'intérêt du public. Songez à ces dix titres de la presse locale auxquels vous avez encore échappé :
  • Elephant-jacking à Nantes : ils dérobent la machine pour arracher des distributeurs de billets avec sa trompe
  • Elle tente de se suicider en se jetant sous les pattes de l'éléphant
  • Infarctus à bord de l'éléphant : il faut faire appel au GRIMP pour secourir le malade
  • L'éléphant était une mule : 12 tonnes de cocaïne cachées dans sa trompe. Le procureur dément que l'argent du trafic ait été destiné à financer le Manège des mondes marins 
  • Folle course-poursuite dans les rues de Nantes : aux commandes de l'éléphant volé, il parvient à semer la police
  • L'équipage d'une barge pirate arraisonne l'éléphant, les passagers dévalisés
  • L'éléphant devient une éléphante. Une "première" réalisée avec le concours de l'école vétérinaire de Nantes
  • Un coup de vent balaie l'île de Nantes, l'éléphant sur le flanc
  • Le maire demande l'évacuation du campement rom installé sous le dais de l'éléphant
  • L'éléphant abattu par des braconniers. Déçus de ne pas trouver d'ivoire, ils repartent avec câbles et tuyaux en cuivre

06 février 2011

C'est l’hôpital qui se moque de la célérité

Sophie Jozan va rencontrer le ministre de la santé avec Franck Louvrier pour évoquer le transfert du CHU de Nantes. Jean-Marc Ayrault s’en offusque : il est anormal qu’une simple conseillère municipale soit reçue avant le maire de Nantes, président du conseil de surveillance du CHU.

Si l’on suit bien son raisonnement, il aurait donc annoncé le transfert du CHU tout seul comme un grand sans en avoir parlé d’abord au ministère de la santé ? « J'attends que la première étape du transfert-regroupement du CHU sur l'île de Nantes soit décidée par le ministre », déclarait-il pourtant début octobre 2009, selon des propos rapportés par Philippe Gambert dans Ouest France. « Je vais écrire au ministre de la Santé pour lui demander un rendez-vous à ce sujet. »

Le maire de Nantes, président du CHU, fait-il antichambre depuis seize mois ? Ou bien a-t-il posté sa lettre au tarif lent ?

05 février 2011

Un Manège des mondes marins plus petit, plus cher et plus tardif

Le Voyage à Nantes vient de publier des appels d'offres pour la construction du Manège des mondes marins et l'assurance du chantier.

Le Manège y est décrit comme un « Ouvrage circulaire, d’une vingtaine de mètres de diamètre et de hauteur, comportant une structure en béton moulé à l’intérieur de laquelle fonctionneront, sur des planchers mobiles, des machines et éléments d’équipement divers, indissociables ou dissociables, dont les fonctions pourraient être considérées comme générales ou professionnelles ». Et dire que les Machines s'obstinent à le présenter comme une oeuvre d'art...

Au passage, l'avis destiné aux constructeurs annonce en catimini la création d'un bâtiment supplémentaire appelé La Déferlante, à construire près du Manège. Le mitage du site des Chantiers est en bonne voie. Les concepteurs du projet ne s'en étaient pas vantés jusqu'à présent (ce bâtiment n'était pas prévu, semble-t-il, par la délibération de Nantes Métropole qui a autorisé la construction du Manège).

On note aussi que le Manège rétrécit. En juin dernier encore, Pierre Orefice déclarait à Daniel Morvan (Ouest France du 22 juin 2010) qu’il serait « haut de 27 mètres et d’un diamètre de 23 mètres ». L’engin a donc perdu un bon quart de sa hauteur. Ça n’a l’air de rien, mais le volume d'un cylindre de 20x20 m est inférieur de 35 % à celui d'un cylindre de 27x23.

Les Nantais auront donc 35 % de manège en moins. Pourtant, l'effort financier qui leur est demandé n'a pas diminué. On se souvient que le budget initialement fixé à 6,4 millions d'euros a été porté en juin 2010 à 10 millions (+ 56 %). Volume en baisse de 35 %, coût en hausse de 56 % : subrepticement, le prix au mètre cube a ainsi été multiplié par 2,4 avant le premier coup de pioche !

Les délais aussi sont à la hausse. La construction du Manège sera traitée en sept lots. Seul a été publié à ce jour l'avis concernant le premier lot, « génie civil et VRD ». La date limite de réception des offres est fixée au 21 mars. Le temps de les étudier, l'attribution du contrat n'interviendra sûrement pas avant la fin avril. Or la durée prévue du chantier est de quinze mois, ce qui mène déjà à fin juillet 2012. Et une fois le gros oeuvre achevé, il faudra encore venir à bout des six autres lots.

L'espoir d'une ouverture du Manège des mondes marins pour l'été 2012 est donc à peu près nul. Ce sera déjà beau s'il est prêt en octobre 2012. Soit pile cinq ans après le conseil de Nantes Métropole qui a décidé sa réalisation : quelle célérité ! L'ouverture de l'attraction était alors prévue pour 2009. On parie qu'on n'en a pas fini avec les bonnes surprises ?

04 février 2011

Le logo de la marque Bretagne, pied-de-nez aux Pays de la Loire

Non, ce n'est pas la signature de Daniel Buren, les bandes blanches et noires ne font pas 8,7 cm de large, c'est le logo de la nouvelle marque Bretagne. Ah ! bon, la Bretagne avait besoin d'une marque ?
Il a été créé à la demande de la région Bretagne par une agence de publicité, moyennant 450.000 euros paraît-il. Morvan Marchal n'a pas fait tant d'histoires quand il a imaginé le Gwenn-ha-Du dans les années 1920. Et quelques verres de muscadet lui ont semblé une rémunération suffisante.

Mais ce logo apparemment bien sage contient un réjouissant message subliminal à l'égard du pays nantais. Le Gwenn-ha-Du comporte neuf bandes noires et blanches alternées qui représentent les neuf évéchés bretons. Le nouveau logo en comprend cinq qui symbolisent à l'évidence les cinq départements bretons, y compris la Loire-Atlantique donc. Et puis, il suffit de deux petits coups de pinceau blanc pour le transformer en B5, signe de reconnaissance "rattachiste" depuis longtemps. M. Le Drian, Jacques Auxiette ne vous dit pas merci.

03 février 2011

La cathédrale de Nantes a perdu sa flèche

La mairie de Nantes lit La Méforme d’une ville et en prend de la graine. Voici quelques jours encore, le site web municipal évoquait « la flèche de la cathédrale témoin des temps anciens, la grue de chantier dressée sur le bord du fleuve, l'architecture audacieuse du nouveau palais de justice , autant d'édifices qui, dans leur diversité, fondent l'identité et « la Forme d'une ville » (Julien Gracq). »

Comme ce blog le soulignait le mois dernier (La méforme d'une ville : en français aussi, sur le site web de la mairie de Nantes), la mairie se trompait triplement. Et elle n’a pas cherché à le nier. Elle affiche aujourd'hui le texte suivant : « La cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes témoin des temps anciens, la grue jaune des anciens chantiers navals dressée sur le bord du fleuve, l'architecture moderne du nouveau palais de justice dessiné par Jean Nouvel, autant d'édifices qui, dans leur diversité, fondent l'identité et "la Forme d'une ville" (Julien Gracq). »

Désormais, la cathédrale n'a plus de flèche. La grue est jaune (la grise reste néanmoins ignorée). Et l’architecture du palais de justice n’est plus audacieuse mais moderne*. Officiel, c’est la mairie qui le dit.

Extrait de la page actuelle sur le site web de la mairie de Nantes

Extrait de la page sauvegardée par Google le 30 janvier 2011

____
* Donc légèrement surannée : on considère en général que la période de l'art moderne s'étend du début du XXe siècle au milieu des années 1960. 

02 février 2011

Le Voyage à Nantes (2) : le tourisme façon couteau suisse

Le Voyage à Nantes me fait penser à mon couteau suisse. Il fait à peu près tout. Et rien mieux qu’à peu près.

Le château des ducs de Bretagne, c’est la lame principale. Son fil est un peu gauchi, mais elle fait son boulot. C’est surtout elle que j’utilise. Des fois, je me dis qu’un Opinel ferait mieux l’affaire.

Le musée des Beaux-arts, c’est la scie. Utile, sauf qu’elle est coincée et je ne sais pas quand je parviendrai à la débloquer. Pareil pour la lime, qui peut représenter le musée Dobrée.

Les Machines de l’île, c’est le tire-bouchon : visible et pas très efficace. Après trois ou quatre ans d’utilisation, il est un peu émoussé, légèrement tordu. Je m’obstine à m’en servir, car je refuse d'admettre qu’il est à bout, en y mettant plus d'effort que je n'obtiens de résultat : il faudra finir le travail au Screwpull®.

Le Mémorial à l’abolition de l'esclavage, c’est le poinçon. Je me crois obligé de l'exhiber, mais chaque fois je me pique le doigt. Je ne l'utilise jamais autrement. Il est bien plus dangereux qu'utile.

Estuaire, c’est le vistemboir. Tout bon couteau suisse comporte un vistemboir, un truc compliqué dont personne ne sait que faire ; certains disent que c’est un cure-pipe, d’autres un ôte-hameçon, d’autres un indicateur météorologique. Je le montre à tous mes visiteurs, qui font mine de le considérer avec intérêt.

Le Lieu unique, c'est la loupe. Avec elle, la grenouille paraît aussi grosse que le bœuf.

Il y a encore trois ou quatre accessoires mineurs, un cure-dents, une pincette, des bricoles…

En plus, cet engin improbable est lourd et me déforme les poches. Il n'empêche que les Suisses en vendent à tour de bras. Le Voyage à Nantes a ses chances.

01 février 2011

Le Voyage à Nantes (1) : le vieux unique

Le Voyage à Nantes prétend rabouter les attraits disparates de la ville pour en faire un puissant attrape-touristes. L’intention est louable, mais l’idée est éculée. On attendait du grandiose et du grotesque, une bonne matière à polémique. On n’a qu’un projet mollasson, « petit bras » comme dit Sophie Jozan interviewée par Éric Cabanas et Cédric Blondeel dans Presse Océan d’hier, exposé sans nerf par un dossier de presse verbeux. Même le logo a l’air d’une de ces rondelles qu’on achète chez Metro par lots de mille pour les soldes et les liquidations.

Comment Le Voyage à Nantes décrit-il le séjour à Nantes idéal ?

« Entrer au lieu unique… découvrir la collection permanente du Musée des Beaux-Arts… entrer dans la cathédrale par les cryptes… admirer Nymphéa à la surface du Canal Saint Félix… faire connaissance avec l’histoire de Nantes grâce à son musée au Château des ducs… profiter d’un point de vue méconnu sur la vieille ville… s’arrêter boire un verre dans une sculpture… se laisser aller à une balade à dos d’éléphant ou à un tour de manège monumental… partager un moment de notre histoire au Mémorial de l’abolition de l’esclavage… connaître le temps qu’il fera dans 4h grâce à un immense indicateur météorologique sur la façade d’un immeuble… embarquer pour une croisière à la découverte du patrimoine naturel de l’estuaire et des œuvres qui jalonnent les rives jusqu’au littoral… »

On imagine le touriste japonais se précipiter à Nantes pour connaître le temps qu’il fera dans quatre heures et boire un verre dans une sculpture (dont Jean Blaise évite de rappeler qu’elle est judicieusement intitulée L’Absence) avant de se casser le nez sur la porte du musée des Beaux-arts déjà fermée, puis sur celle du Mémorial pas encore ouverte.

Cela fait penser à ces campagnes collectives de promotion touristique dont on voit fleurir les affiches dans les couloirs du métro parisien vers la fin de l’hiver : « Chez nous, il y a la campagne, des villes et des rivières », « Chez nous, il y a la mer, des musées, des jardins », « Chez nous, il y a des châteaux, la montagne, des spectacles ». De qui s’agissait-il déjà ? La Nièvre-Atlantique ? Le Tarn-et-Loire ? La région des Pays de la Saône ? Derrière ces slogans fatigués, on imagine des agences de publicité devenues cyniques, conscientes que rien d’original ne survivra à l’examen d’un comité local du tourisme où chaque collectivité contributrice veut avoir sa part.

Et dire que Jean Blaise n’a même pas eu besoin d’un comité pour s’engager sur la même piste rebattue. Comme si l'invention d'un nom plus original que Régie centrale unifiée du tourisme nantais avait suffi à épuiser son imagination. Ou comme si, désormais, Jean-Marc Ayrault changeait en plomb tout ce qu'il touche ?