Deuxième contribution au Grand débat
La Loire à Nantes, on sait qu’elle est là mais on ne la voit
pas tellement, ou alors derrière des barrières. Voici bien longtemps, la municipalité Ayrault avait fait grand
cas de l’aménagement d’une promenade le long de la voie sur berge. Le piéton
qui s’y aventure aujourd’hui depuis le pont Général-Audibert se heurte vite à
un panneau d’interdiction doublé d’un épais fourré. Et nulle part ou presque
on ne peut toucher la Loire du doigt. Dans les ports, autrefois, des cales
assuraient la transition entre l’eau et la terme ferme ; elles rendaient
l’onde familière. Il ne nous reste aujourd’hui que les deux grandes cales des
Chantiers au pied de la grue Titan jaune, excentrées et pas très gratifiantes.
Il nous faudrait un endroit à la gloire de la Loire, un lieu
de rencontres et de réjouissances au contact du fleuve. On l’imagine comme un
amphithéâtre descendant vers une petite rade, où les Nantais viendraient se
promener, se rencontrer, manifester, pique-niquer aux beaux jours, assister
parfois à des spectacles flottants. À marée montante, on évacuerait les gradins
inférieurs. Au jusant, on les réinvestirait.
Cette Tribune Loire devrait être toute proche du
centre-ville. On pourrait lui sacrifier une partie du parking de la
Petite-Hollande, face à la médiathèque. Ou, mieux encore, l’aménager sur l’île
de Nantes. Un emplacement s’impose alors : celui du palais de justice. La
place est occupée ? Oui, et alors ? Faisons place nette !
Moche et massif, le palais de justice verrouille
visuellement la perspective entre l’île de Nantes et le centre-ville. Pour accéder au quartier de la création, il faut d'abord contourner ce symbole de lourdeur et de rigidité. Sa
destruction libérerait la vue et les esprits ‑ et sanctionnerait solennellement, comme une peine capitale,
les erreurs de conception et les malfaçons à cause desquelles il menace ruine en permanence. La Tribune
Loire donnerait au quartier de la création le forum dont il va avoir besoin pour
exister collectivement ; elle deviendrait vite le centre vital où architectes,
graphistes, vidéastes, communicants et autres artistes fertiliseraient mutuellement leurs idées.
Considérée comme une emmerdeuse tout au long de l’ère Ayrault, la Loire
redeviendrait enfin une inspiratrice !