24 novembre 2009

Peau d’inox et arches en toc


Quand la Délivrance d’Émile Guillaume avait été installée devant le monument aux morts de Nantes, en 1927, l’opposition de droite avait reproché à la statue d’être trop nue. Reprochera-t-on au nouvel immeuble départemental, rue Sully, d’être trop habillé ? Il « adopte pour les façades une double peau d’inox découpé au laser, une technique très tendance », s’émerveillait Éric Cabanas, qu’on a connu mieux inspiré, dans Presse Océan du 19 novembre. En fait, voici comment sera déguisée toute la façade de ce bâtiment :
Ce motif tarabiscoté, s’il faut en croire sa conceptrice, évoque « le feuillage des platanes voisins, leurs ombres projetées et la porte forgée de l’immeuble adjacent ». Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Les enfants des écoles pourront s’amuser aussi à y chercher des évocations subliminales – le portrait de Patrick Mareschal est caché dans ce dessin, sauras-tu le retrouver ?

Résultat de ces afféteries, les occupants de l’immeuble se trouveront enfermés dans une sorte de boîte de conserve trouée, avec une vue minimale vers l’extérieur du bâtiment : claustrophobes s’abstenir ! Certes, il est bon de penser que les fonctionnaires départementaux seront incités à se pencher sur leur travail plutôt qu’à regarder par la fenêtre. Mais n’aurait-il pas été plus simple de construire l’immeuble là où il n’y avait de toute façon rien à voir ? Car le nouvel ensemble occupe un emplacement particulièrement enviable : il donne directement sur le square du Maquis de Saffré, avec en arrière plan le bassin Ceineray et le monument aux 50 otages. Cette perspective exceptionnelle sera délibérément occultée : quel gâchis !

Il n’y a pas que de l’inox en façade : il y a aussi trois arches de pierre. Celles de l’ancienne usine électrique de Nantes, qui s’élevait à cet emplacement, croit savoir Presse Océan. Le mur de la façade « été entièrement démonté et remonté pierre par pierre », assure Éric Cabanas, qui s’est sans doute laissé refiler ce bobard par les communicants du département. Car si un pan de mur de l’usine a bien été conservé -- et non démonté -- par derrière, les arches qui se dressent en façade du bâtiment sont un pur « à la manière de ». Pour tout dire, du toc !

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