11 septembre 2016

Arbre aux hérons : Les Échos lointains de Miséry

« L’Arbre aux hérons, nouvelle curiosité touristique nantaise », titrait vendredi le quotidien Les Échos. Si la « curiosité » est nouvelle, l’information ne l’est pas puisque deux mois se sont écoulés entre l’annonce du projet et la parution de l’article. Son auteur, Emmanuel Guimard, se serait-il fait un peu tirer l’oreille ? Du moins n’affiche-t-il pas le même enthousiasme que les services de com’ de Nantes Métropole.

S’il décrit le projet au futur, il se réfugie quant au financement derrière un prudent conditionnel : « Nantes Métropole ne paierait qu’un tiers de l’addition ». Pour le reste, Johanna Rolland « souhaite au moins un tiers de financements privés, qui restent à collecter, et un tiers d’autres partenaires publics ». Ce « souhaite » n’annonce rien qui vaille pour les contribuables nantais. « D’autres mécènes seront recherchés », insistent Les Échos, façon de souligner qu’ils ne sont pas trouvés.

Pour l’avenir, le quotidien ne se prononce pas. Il préfère se réfugier derrière les conjectures municipales : « Nantes Métropole estime que l'arbre pourrait attirer jusqu'à 1 million de visiteurs par an, amortissant vite l'investissement ».

En réalité, Nantes Métropole n’en espère même pas tant. « Avec l'Arbre aux hérons, les Machines - site le plus visité du département avec 620.000 entrées payantes en 2015 - devraient atteindre le cap du million de visiteurs annuels » indique-t-elle sur son site web. Ce qui ramène donc les espérances pour l’Arbre aux hérons à 380.000 billets par an. De quoi amortir « vite » l’investissement, comme l’envisagent Les Échos ?

Les Échos est le grand quotidien de l’économie. Ses lecteurs savent bien ce que signifie l’amortissement d’un investissement : l’étalement de son coût sur sa durée d’utilisation. Si l’on suppose par exemple que « vite » signifie cinq ans, il faudrait en pratique répartir le coût de l’Arbre aux hérons, soit 35 millions d’euros, sur 380.000 x 5 = 1,9 millions de visiteurs. C’est-à-dire que chaque billet vendu devrait contribuer à financer l’Arbre à hauteur de 18,42 euros ! Sur dix ans (mais dix ans, est-ce encore « vite » ?), ce serait 9,21 euro par billet. Cela propulserait le prix du billet à des hauteurs incompatibles avec l’objectif de 380.000 visiteurs par an.

L’idée même d’un amortissement rapide est absurde. Et l'idée d'un amortissement tout court est déjà d'un fol optimisme. Voyez Les Machines de l’île. Neuf ans après leur création, cet investissement a été amorti exactement à hauteur de 0 % : Les Machines continuent à perdre de l’argent chaque année. Les Échos le savent bien. En concluant leur article sur un espoir d’amortissement, ils montrent une ironie subtile mais féroce envers Nantes Métropole.


6 commentaires:

  1. Article du Monde datant de quelques semaines et commentaire d'un lecteur de ce journal ne sachant sûrement pas ce que peut être la notion d'amortissement mais commentaire néanmoins pertinent évoquant un arbre aux pigeons...

    RépondreSupprimer
  2. Ah ? Merci du tuyau. Je n'ai pas vu cet article. Vous auriez une date plus précise ?

    RépondreSupprimer
  3. Oups ! Il s'agissait seulement d'un commentaire d'un lecteur du Monde et non d'une analyse dans le corps de l'article ! N'ai pas retrouvé la page, désolé. Vouliez-vous vérifier si la paternité de l'expression "arbre aux pigeons" vous était attribuée ? La Méforme et son auteur n'étaient nullement cités...

    RépondreSupprimer
  4. D'accord, merci. Vous savez, je n'ai pas la prétention d'être le seul critique du projet ! Serais-je le premier à avoir utilisé l'expression "arbre aux pigeons" ? Je l'ignore, mais si tel est le cas, je ne revendique aucun monopole. MM. Orefice et Delarozière touchent leur pourcentage sur les ventes de billets des Machines, je ne réclame rien sur les critiques envers les Machines. Beau désintéressement, n'est-ce pas ?

    RépondreSupprimer
  5. En effet, l'expression "Arbre aux pigeons" semble être d'antériorité Jelurienne !

    En revanche, vous n'êtes peut-être pas le seul à vous insurger contre cet Arbre. Ci-après, lien de discussion PO, reprenant votre trouvaille : http://m.presseocean.fr/larbre-aux-herons-financement-participatifpar-des-pigeons

    RépondreSupprimer
  6. Après un énième épisode du Retour de l'arbre aux hérons, la présence virtuelle et médiatique de c'truc devrait rapidement se calmer au regard de l'actualité fiscale nantaise...

    RépondreSupprimer