Afin de scruter « la vie nouvelle de l’île de Nantes » Le Monde a dépêché sur place un « envoyé spécial », comme pour une élection présidentielle américaine ou un sommet du G7. Las, entre les lignes, le grand spécialiste de l’architecture qu’est Frédéric Edelmann multiplie les moqueries (n° du 24 octobre). L'Ile de Nantes, écrit-il impitoyablement, « est devenue l'un des projets urbains les plus célèbres d'Europe avec ceux de l'Emscher Park, dans la Ruhr (Allemagne), et ceux de Barcelone et de Bilbao (Espagne) ». Cruel rappel, puisque ces projets (du moins ceux de la Ruhr et de Bilbao), engagés eux aussi à la fin des années 1980, ont atteint leur maturité depuis déjà une dizaine d’années. L’île de Nantes, elle, reste un chantier incertain – un « urbanisme à mèche lente », ricane l’envoyé spécial.
Le palais de justice de Jean Nouvel est décrit comme « un édifice noir, équilibré, dessiné avec un rare souci de représentation ». Éloge bien minimaliste pour un bâtiment naguère couvert de lauriers par les pontifes de l’architecture contemporaine. Mais éloge appréciable quand même au regard du traitement réservé aux immeubles de logements, dont la qualité « n’est pas toujours proportionnelle à la renommée des auteurs » et qui voisinent avec « quelques mauvais souvenirs du temps des grands ensembles ». Au Hangar à bananes, « un rien d’Afrique et des Antilles est de retour » ; ce rien n’est vraiment pas grand chose mais contraste déjà avantageusement avec l’oubli total des anneaux de Buren, peut-être par charité. Le summum de la vacherie est pourtant réservé à l’école d’architecture : « Le choix d'en faire une sorte d'usine à cervelles a fait germer un édifice difficile à lire au premier coup d'œil ».
Jean-Marc Ayrault va devoir sérieusement redresser le tir s’il veut présenter d’ici la fin de son quatrième mandat un Grand Œuvre susceptible de trouver grâce aux yeux du journal officiel de l’establishment français.
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