Comment Johanna Rolland aurait-elle pu se douter, il y a six mois, quand elle a annoncé l'inauguration du musée d'arts de Nantes le 23 juin, que la Fête de la musique aurait lieu
le 21, le dixième anniversaire des Machines de l’île le 30 et la Nuit du VAN, coup d'envoi du Voyage à
Nantes 2017, le 1er juillet ? Cela pour le local. Côté international, Johanna Rolland ne pouvait pas non plus imaginer que The Bridge et le Hellfest, au succès de plus en plus
colossal, allaient imprégner l’image de Nantes en cette fin juin.
Cette cascade d'événements en une quinzaine de jours est-elle gênante ? Non : aucun d'eux n'arrive à la cheville du musée, qui va bien sûr envahir tout le paysage
médiatique. Déjà, Jean-Marc Ayrault le présentait jadis comme « le grand projet » de son quatrième mandat municipal. Le grand projet est devenu
grandissime : il lui a fallu en définitive deux fois plus d’argent et
trois fois plus de temps que prévu. Des dérapages conformes aux ambitions
touristico-culturelles de la ville : énormes. Forcément, la presse internationale n'aura d'yeux que pour lui.
Nantes Métropole est bien
consciente de l’enjeu. « La prochaine grande étape sera l'ouverture du
musée des Beaux-arts », déclarait
Jean Blaise aux Echos en novembre dernier. « Ce sera la star
de l'édition 2017. » Comme Jean Blaise est très capable d’être à la
fois à Nantes au Havre (qu'il qualifiait lui-même de « star de l'année 2017 »), il a concocté des festivités grandioses pour la circonstance. En particulier un jeu
de piste et un concours de selfies. Voilà du neuf, du prestigieux et du
culturel !
Mais l’essentiel, pour un
musée d’arts, c’est encore l’art. Pour marquer sa réouverture, celui de Nantes
a prévu une exposition à la hauteur de ses 88,5 millions d’investissement, qui assurera d’emblée son prestige auprès de l'establishment artistique mondial : une installation de la plasticienne franco-autrichienne Suzanna
Fritscher. La notice
de celle-ci sur Wikipédia répertorie près d’une dizaine d’expositions
personnelles, dont trois hors de France (une en Allemagne, deux en Autriche),
et une en Bretagne, déjà, à la chapelle Sainte-Tréphine de Pontivy.
La surprise n'est pas totale à Nantes,
car la plasticienne n'y manquait pas d’amis fidèles. Elle a exposé deux ou
trois fois au Hangar à bananes ; surtout, elle a participé dès les débuts
au projet de Stanton Williams pour le musée des beaux-arts. Ailleurs, le secret
avait été mieux gardé et l’annonce de cette exposition aura roulé comme un coup
de tonnerre jusques aux confins de l’univers artistique.
Cependant, le musée
d’arts protège aussi ses arrières. À l’intention des visiteurs plus proches du ras
des pâquerettes, il a prévu un « Hommage à Monet et
Rodin » : avec de telles vedettes, on ne peut pas se tromper. Cette exposition-là est
centrée sur trois œuvres « exceptionnellement prêtées » par le
Musée Rodin : un petit bronze et deux plâtres. De quoi faire la nique à l’exposition
du centenaire (Auguste Rodin est mort le 17 novembre 2017) visible jusqu’à la
fin juillet au Grand Palais de Paris ; les œuvres du sculpteur s’y
comptent par centaines, d’accord, mais on n’y trouve pas la Grande main
crispée avec figure implorante. Pour voir celle-ci, il faudra venir à
Nantes !
RépondreSupprimerAinsi donc, ces crétins qui pourrissent les musées en se prenant en photo devant les oeuvres, les rendant invisibles, seraient les véritables créateurs qu'il conviendrait d'inviter !
Ce serait donc ce type de comportement navrant qui serait la nouvelle norme, le top du civisme parce que participatif... Et en pratique, pour contempler une oeuvre, il faudra se faire passer pour un selfisteur, et regarder discrètement derrière sont épaule après la pose narcissique... Ou bien, en passer par un jeu de piste (sorte de pokemon go), pour gagner le droit de voir les oeuvres sans personne devant !
Pourquoi ne pas proposer un grand concours : repeindre les peintures, retailler les marbres... Après tout, le Christ de Borja, dans sa petite église de village de la province de Saragosse, a connu une renommée internationale par ce moyen. Mais dans ce cas-là, c'était vraiment drôle ! Et vraiment surréaliste ! Tout le contraire de ce racolage pitoyable.
Et l'entrée va coûter 8€ ce qui en fera la 2eme entrée la plus chère de France après celle de Nice (10€).
RépondreSupprimerEst-ce si cher ? C'est à peu près le prix d'un billet de cinéma, les deux tiers d'une entrée au musée d'Orsay, la moitié d'une entrée au Louvre ou à la Galerie des Offices de Florence, le tiers d'une entrée au MoMA de New York... L'idéal serait que ce soit si beau que le prix n'a aucune importance... (C'est mon quart d'heure d'idéalisme, aujourd'hui.)
RépondreSupprimerFrançois Hollande, Président de la République, discours d’inauguration du Louvre-Lens | 04.12.12
RépondreSupprimer- "La gratuité des collections est un outil pour rendre aux musées leur vocation originelle de mise à disposition du public des biens communs hérités de l’histoire. Elle est également un outil de démocratisation de la culture que nous avons mis au coeur de notre politique culturelle. La gratuité des collections de nos musées est donc le résultat d’une volonté politique au service d’un idéal.
http://www.louvrepourtous.fr/Citations-sur-la-gratuite-des,585.html
Le Musée des Beaux-Arts de Nice est gratuit pour les niçois, m'avait affirmé une niçoise. Et comme je ne la crois pas du genre à raconter des salades, je le crois.
RépondreSupprimerPour 10 balles t'as plus rien!
RépondreSupprimerSi, le Pass musée qui "offre" un accès illimité toute l'année et une entrée libre dans tous les musées nantais pendant le Voyage à Nantes.
Notons que le tonnage de propagande métropolitaine vient de "s'enrichir" de 363 500 exemplaires de "L'éveil d'un grand musée" qui laisse un peu sur sa faim.
La partie consacrée au musée est succincte, surement pour ne fatiguer à l'avance l'estivant en devenir. Mais l'absence d'exposition d'envergure pour marquer l'inauguration pourrait laisser entrevoir un manque d'ambition pour l'écrin qui doit se suffire à lui-même pour justifier le déplacement.
En fait Mme Rolland le dit elle-même, "la culture est dans notre ADN. Notre métropole est une référence dans le domaine culturel. Elle regorge de talents".
Point n'est alors besoin d'être démonstratif quand il suffit d'être soi-même en toute modestie.
"Pendant l’été 2007, 500 000 visiteurs ont su profiter de l’ouverture des premiers espaces publics réhabilités du parc". Dossier de presse Inauguration du site des Chantiers 15 mai 2009.
RépondreSupprimer"40 000 à 50 000 spectateurs lors de l'inauguration des Machines en 2007..." Oréfice ce soir sur FBLO.
À n'en pas douter, l'imminente et kolossal inauguration des bâtiments art-friendly de la rue Clem' va buzzer grav' ! Un torrent de touristes j'vous dis, une large file d'attente démarrant 500 mètres plus bas dès le hall de la gare SNCF...
Confirmation pour Nice, voir : http://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/alpes-maritimes/nice/les-musees-municipaux-nicois-restent-gratuits-pour-les-habitants-de-la-metropole-625602.html
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