Qui pouvait sérieusement croire que le rapport de la Commission nationale
du débat public (CNDP) présenterait un véritable intérêt ? Il fait ce
qu’on en attendait : résumer les arguments en faveur du projet de
construction d’un aéroport à Notre-Dame-des-Landes en respectant un semblant d’objectivité.
Ainsi, il cite bien sûr le rapport
des trois experts du Conseil général du développement et de l’environnement
durable (CGEDD) révélé en mars dernier… mais presque uniquement à
travers ses mentions susceptibles de servir les raisonnements favorables au
projet de NDDL. Par exemple, à propos de l’aéroport actuel de Nantes
Atlantique, la CNDP cite ainsi le CGEDD : « l’installation apparaît
étriquée et inconfortable ». Le CGEDD écrivait en réalité : « Visuellement,
l’installation apparaît étriquée et inconfortable. Une extension de ces
installations devient urgente, ne serait-ce que pour garantir un traitement du
passager de qualité. »
De même, si les arguments des adversaires du projet sont
cités, ils le sont en général au conditionnel ou avec un soupçon de
condescendance. Ceux des partisans sont souvent reproduits à l’indicatif
présent, et quelquefois mis en valeur par des caractères gras (« Les responsables des
collectivités et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Nantes
Saint-Nazaire estiment »…)
Le vocabulaire de la CNDP est celui des partisans du projet.
J’ai dit ici comment le mot « piste », à propos d’un aérodrome
privé maintenu à Nantes Atlantique, était un
marqueur propagandiste. On le retrouve dans le document de la CNDP :
« En l’état actuel, la
piste de Nantes Atlantique serait maintenue pour un usage strictement
industriel d’Airbus avec deux ou trois vols par semaine en fonction des besoins
logistiques du pôle industriel aéronautique. »
Mais attendez ! « Serait
maintenue », ça reste un conditionnel. Si c’est « en l’état
actuel », c’est que l’état futur pourrait être différent, c’est qu’une
décision capitale pour l’évaluation du projet n’est pas encore prise. On nous
demande donc de voter pour un projet inachevé ? Ou de nous prononcer au vu
d’un dossier bâclé ?
Il est vrai que la CNDP n’a
disposé que d’un délai manifestement beaucoup trop court pour faire le tour de
la question. Et peut-être son président, Christian Leyrit, longtemps proche des
groupes du BTP et du paysagiste choisi par Vinci Airport, n’avait-il pas très
envie, au fond de lui-même, de faire de la peine aux porteurs du projet. Mais
quand même, il n’est pas nécessaire de gratter beaucoup pour apercevoir,
derrière un site web qui se veut pro, des insuffisances béantes.
Dont celle-ci, qui pourrait s’avérer un vice rédhibitoire : pas une
seule fois le rapport n’évoque la loi du 3 août 2009, qui n’autorise les
transferts d’aéroport que « pour des raisons environnementales ».
Ce qui condamne d’un coup à la poubelle tous les arguments sociaux et économiques
invoqués par la CNDP en faveur du projet._________
Addition du 15 juin : les notes ci-dessus sont issues d'une lecture rapide du rapport de la CNDP. Après étude approfondie, l'Atelier Citoyen a publié une critique beaucoup plus approfondie (et franchement alarmante quant à la neutralité alléguée par la CNDP).
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