À partir de 10 euros de don, les contributeurs de la
campagne de financement de L’Arbre aux Hérons sur Kickstarter ont droit à un
« titre de copartage nominatif », sous forme numérique (mais
néanmoins « signé par les auteurs » ?) ou, à partir de 50 euros,
« en impression
luxueuse : papier spécial, dorures, marquages en relief ».
Le document se présente comme un titre obligataire à
l’ancienne, du temps où les valeurs mobilières n’étaient pas encore
dématérialisées. Le clinquant visait alors à rassurer les épargnants. La multiplication des gaufrages, filigranes et autres zigouigouis faisait sérieux et dissuadait
les faussaires. Mais pas les révolutionnaires : parmi les plus beaux de
ces titres figuraient les emprunts russes de nos
arrière-arrière-grands-parents, fantômes d’économies englouties.
Cet « à la manière de » plutôt réussi confirme à
sa façon l’hypothèse
émise ici : il semble que l’opération Kickstarter ait été préparée au
mois d’octobre sous la bannière du Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons puis
réétiquetée Machines de l’île avant son lancement au mois de mars. Il comporte
dans un petit cartouche rond une représentation très stylisée de l’Arbre aux
Hérons surmontée de la mention : « LE FONDS DE DOTATION ». Sur
Kickstarter, on retrouve le même symbole, mais surmonté désormais de la
mention : « LES MACHINES DE L’île »*.
Un fac-simile du « titre de copartage » est
visible sur le site Kickstarter. Il est établi au
nom de John Lemon Detroit – USA, sans doute pour donner l'impression d'une opération internationale. À cette heure, 3,7 % des contributeurs
du projet sont localisés aux États-Unis. Pas un raz-de-marée. Il est d'ailleurs probable que nombre d'entre eux se fichent de L'Arbre aux Hérons comme de l'An quarante. Car il y a beaucoup de serial-contributeurs là-bas. Quand Tieg
Zaharia finance 4.680 projets, Julio Terra 1.957 ou David Gallagher
647, par exemple, leur versement dénote sans doute un intérêt pour le
financement participatif en général plus que pour l’Arbre aux Hérons en
particulier. (Les trois personnes citées sont au demeurant des salariés
de Kickstarter.)
Quant à « John Lemon », il est inconnu au bataillon, ou
presque : c’est une
marque de boisson au citron. Mais en argot américain, « lemon »
signifie le plus souvent « bagnole », « tacot » ou « tas
de ferraille » ‑ une voiture de mauvaise qualité. Avoir localisé cet ami
de l’Arbre aux Hérons à Detroit, capitale de l’automobile américaine, est du
plus haut mauvais goût !
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* Les affiches visibles en ville sur les « sucettes » publicitaires, qui ont dû être conçues bien avant le lancement de la campagne, sont également signées du Fonds de dotation et non des Machines de l’île. Ce qui peut déjà constituer une entorse à la loi si l'espace est fourni gratuitement puisque un fonds de dotation ne peut recevoir de financement public sous quelque forme que ce soit, y compris « par prêt gratuit de personnel, de locaux ou de moyens quelconques ».
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* Les affiches visibles en ville sur les « sucettes » publicitaires, qui ont dû être conçues bien avant le lancement de la campagne, sont également signées du Fonds de dotation et non des Machines de l’île. Ce qui peut déjà constituer une entorse à la loi si l'espace est fourni gratuitement puisque un fonds de dotation ne peut recevoir de financement public sous quelque forme que ce soit, y compris « par prêt gratuit de personnel, de locaux ou de moyens quelconques ».
Mauvais gout, ou ironie... L'Arbre aux hérons sera effectivement un tas de ferraille !
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