16 mars 2018

La France entière croit savoir que L’Arbre aux Hérons est en construction

« À Nantes, la construction du monumental Arbre aux hérons est lancée » annonçait Presse Océan avant-hier sur son site web*. Au même moment ou presque, les lecteurs de France Soir, de Libération, de La Croix, de La Dépêche, de La Voix du Nord, du Courrier Picard, de L’Union, de L’Est éclair, de Corse matin, de L’Ardennais, de La Provence, de La Manche libre, de La République des Pyrénées, du Courrier de l’Ouest, du Maine Libre, du Courrier cauchois, de Le Point, de L’Express, de L’Obs, de Capital, de Boursorama et de bien d’autres encore, ont pu lire le même article, rédigé en réalité par l’Agence France Presse (AFP), sous ce même titre : « À Nantes, la construction du monumental Arbre aux hérons est lancée ».

Comme chacun sait à Nantes, c’est faux. La construction de L’Arbre aux Hérons n’est pas « lancée ». Seules le sont des « pré-études » ‑ pas même des études ‑ qui doivent durer deux ans. Le conseil métropolitain du 8 décembre 2017 a précisé qu’elles « permettront de vérifier la faisabilité technique de l’œuvre dans le cadre des contraintes du site et de stabiliser son coût de réalisation ».

Avant de lancer la construction, et même de la décider, il est raisonnable de s’assurer qu’elle est faisable, non ? D’accord, la question pourrait n’être que rhétorique. Comme la principale de ces études a été confiée à François Delarozière et Pierre Orefice, concepteurs du projet, on serait bien étonné qu’elle aboutisse à une réponse du genre : « non, ça n’est pas faisable ». Mais d’un autre côté, qui pourrait croire que le conseil de Nantes Métropole ait voté 2,5 millions d’euros pour des études dont il connaîtrait déjà la conclusion ?

En tout état de cause, la nouvelle diffusée par l’AFP est au minimum « très exagérée », comme disait Mark Twain de l’annonce de sa mort. Et comme aurait pu le dire Martin Bouygues quand, en 2015, l’AFP, justement, a annoncé à tort son décès. Là, il n’y a pas mort d’homme. Mais tout de même, à une époque où tout le monde conspue les « fake news », l’AFP devrait mieux contrôler sa production.
_________
* L’article n’a pas été repris dans la version papier de Presse Océan, qui titrait lendemain sur l’« opération de com’ à 500 000 euros » organisée par Nantes Métropole dans la carrière de Miséry. Quelqu’un a dû réaliser que la nouvelle était fausse.

18 commentaires:

  1. Est-ce que ça ne serait pas en lien avec le crowdfunding Kickstarter ? Il devrait être plus facile d'obtenir de l'argent pour un projet commencé que pour un projet à réaliser dans deux ans ?

    RépondreSupprimer
  2. Possible, mais cela supposerait une sorte de collusion de l'AFP avec les promoteurs de la campagne.
    A première vue, cette campagne ignore plusieurs règles posées par Kickstarter. J'y reviendrai probablement.

    RépondreSupprimer
  3. Faut dire qu'en France (et l'AFP est quand même une des Voies officielle de la France), on a tendance à classer les news, et leur acteurs, en deux catégories : les gentils et les méchants. Sarkozy en son temps, Trump ou Poutine aujourd'hui, et tout ce qui s'y rattache, ce sont les méchants. Et Nantes, ville ouverte, progressiste, de gauche, etc., fait partie des gentils. On lui accorderait presque un visage, une personnalité propre. Delarozière & Co., l'Eléphant, le Géant, ce sont des hypostases de notre ville. Et comme les journalistes sont un peu pressés, ou paresseux, ou consensuels, ils ne vont que rarement chercher plus loin. En bref : ex cathedra, ad nauseaum, cool museum !

    RépondreSupprimer



  4. Les 2,1 milliards d'annonces publicitaires, les 580 millions à 1,8 milliards € de l'État, les 7650 € d'abattement fiscal pour une carte de presse...

    Comment est-il possible de porter le moindre crédit au blabla des journalistes ? Ils ont la fibre optique, des milliers de tuyaux qui se déplacent à la vitesse de la lumière mais une seule source d'éclairage, l'AFP de surcroît ! Un cauchemar.

    RépondreSupprimer
  5. "Mais d’un autre côté, qui pourrait croire que le conseil de Nantes Métropole ait voté 2,5 millions d’euros pour des études dont il connaîtrait déjà la conclusion ?"...
    Je ne pense pas, par exemple, que le conseil de Nantes Métropole ait déjà carotté le sol de la carrière en vue d'y implanter les fondations d'une structure de 35m de haut. Voilà à quoi servent, entre autre, les études.

    RépondreSupprimer
  6. @ Anonyme de 15:18 : bien entendu, l'étude des sols est indispensable, de même que des études aérauliques. Si Nantes Métropole avait eu la bonne idée d'effectuer un sondage sous le musée des beaux-arts avant de creuser, ça nous aurait évité des années de retard et des millions de surcoût.

    Mais j'évoquais ici "la principale de ces études", celle confiée au GIE La Machine/Delarozière/Orefice pour 2,5 millions d'euros, qui ne porte pas sur ces questions techniques. Je ne dis pas non plus qu'elle est inutile, au contraire, je dis que si sa conclusion était évidente... Nantes Métropole aurait pu faire l'économie de 2,5 millions d'euros.

    RépondreSupprimer
  7. Anonyme 17 mars 15h 18
    Même si l'on trouvait la tombe d'Alexandre legrand ou quoi d'autres il ferait cet équipement; ne connaissaient-ils pas la nature du sol sous le musée des beaux arts ?

    les "sondages" du sol, c'est à dire la nappe phréatique sous le musée était connue j'avais donné ces infos en son temps, le rapport du BRGM avait donné ses conclusions en juin 2009
    http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-56938-FR.pdf

    donc sans doute commandé avant le 3 avr. 2009 mais quand une décision est prise rien ne peut l'arrêter
    https://lameformeduneville.blogspot.fr/2012/09/du-cafouillage-considere-comme-lun-des.html

    RépondreSupprimer
  8. En gros "si la conclusion est évidente" : à quoi bon faire des études de "faisabilité" ? Comme si ce n'était pas "faisable". Vous faites semblant d'ignorer que "faisabilité" ne veut pas seulement dire "c'est faisable ou pas" mais aussi "comment on le fait". Vous semblez aussi ignorer combien, dans le financement d'un ouvrage, prend la part des études...

    RépondreSupprimer
  9. Intéressante question : 'à quel moment peut-on parler de construction?'.
    Les planches à dessin de notre enfance ont disparu et les objets se conçoivent de façon virtuelle sans crayons ni matériaux pourtant le produit est en cours d'élaboration; c'est encore plus vrai dans les logiciels qui ne sont pas des objets matériels. La fabrication tangible n'est qu'un ordre de lancement de la fabrication mais le produit existe déjà sans être sur les étagères. Dans les labos, on considère que la construction démarre avec l'entame du budget de financement et les imputations sur le coût du produit final. Ce n'est pas toujours le cas comme dans le BTP où la phase de fabrication est nommée 'construction' quand bien même le produit existe déjà. J'ignore si 'l'arbre aux hérons' existe peu ou prou sur CAO avec calculs de résitance, déformations,etc : ça ne semble pas être le cas, pourtant l'idée remonte au moins à 2011. En poussant à l'extrême, un produit prend naissance dès qu'il existe dans la tête de son concepteur mais il n'est construit que lorsque qu'un mécène accepte de le financer pour lui donner vie. De là à en conclure que le tiers financement privé est bouclé, ce serait aller vite, ce qui vous donne raison ... sur le papier.
    Ah, la faisabilité est en général faite avant la budgétisation et le staffing en détournant des ressources d'un autre projet en cours; étonnant, non?

    RépondreSupprimer
  10. @ Anonyme de 18:15 : Vous enfoncez une porte ouverte. Bien entendu, pour déterminer qu'une chose est faisable ou pas, il faut déterminer comment on la fait, ça ne se joue pas à pile ou face. Le but étant quand même d'arriver à un diagnostic : oui c'est faisable ou non, ça ne l'est pas. La "faisabilité" étant comme chacun sait le caractère de ce qui est faisable. Reste ensuite à décider si on fait ou pas...

    J'ignore tout autant que vous la part des études dans le coût d'un ouvrage pour une raison très simple : il n'y a pas de réponse unique, cette part est très variable selon les cas. En l'occurrence, les concepteurs de l'Arbre ont affirmé à plusieurs reprises dans le passé que tout était prêt (la branche prototype date de 2007) et qu'il ne restait qu'à prendre une décision. N'est-il pas surprenant de découvrir qu'il fallait encore plus de 3 millions d'euros d'études pour savoir si l'Arbre était faisable ?

    J'ai écrit "études". En réalité, c'est même "pré-études" qu'il faut dire, car c'est ainsi que les qualifie Nantes Métropole soi-même, preuve que tout n'est pas si bien bordé, même si sur Kickstarter le projet est présenté comme déjà lancé. Je ne vais pas reprocher sa prudence à Nantes Métropole. Si elle s'était un peu souciée de faisabilité avant de lancer les travaux du musée d'arts, nous y aurions gagné plusieurs années et pas mal de millions d'euros.

    RépondreSupprimer
  11. si comparaison n'est pas raison l'étude de faisabilité et expertise technique concernant le renforcement et l'élargissement du Pont Anne de Bretagne à Nantes et/ou la construction à proximité d'un nouveau pont sur le bras de la Madeleinede nantes à coûté 196 925 euros.

    soit plus de deux millions de moins que ce machin supporté par des étais

    https://www.francemarches.com/appel-offre/3-boamp-148346-37-44/etudes-faisabilite-expertise-technique

    idem pour faire un tunnel entre chantenay et l'île de nantes
    Études de préfaisabilité – Nantes – tunnel immergé Trentemoult Chantenay.
    Valeur totale finale du marché:
    Valeur: 196 925 EUR
    Hors TVA
    http://ted.europa.eu/TED/notice/udl?uri=TED:NOTICE:273610-2014:TEXT:FR:HTML

    RépondreSupprimer
  12. Le mètre d'arbre aux hérons devrait passer sous la barre du million d'euros ???

    Twitte @franckytrichet adjoint de Madame la Maire !!!

    il y a 21 h

    "La Cité dans le Ciel avance avec le cap des 200.000 euros de financement participatif atteint ! Merci aux 2940 contributeurs pour un tel engouement ! Cet arbre aux hérons de 50 m va faire rayonner la France."

    https://mobile.twitter.com/franckytrichet/status/975013711365668865

    RépondreSupprimer
  13. Le héron cherche un coordinateur(rice) pour l’Arbre, dans le cadre des pré-études confiées à La Machine par Nantes Métropole, qui elle-même la confie à un tiers recruté pour l'occasion (manquerait plus que l'heureux (se) élu(e) soustraite à un coordinateur(trice) détaché(ée) :
    https://www.architectes.org/petites-annonces/coordinateurrice-des-etudes-de-l-arbre-aux-herons

    3. Description du poste
    3.1. Environnement
    Dans le cadre du marché de pré-études du projet de l’« Arbre aux Hérons » d’une durée prévisionnelle de 18 mois confié à La Machine par Nantes Métropole Aménagement.
    En rendant compte au directeur artistique, au directeur des études et au directeur technique.
    En étroite collaboration avec la coordonnatrice administrative du projet.
    Au sein de l’équipe conception.

    3.2. Finalité
    Assurer la coordination des études dans le cadre de la pré-étude du projet.

    3.3. Missions principales
    • Participer à la traduction des contraintes artistiques
    • Participer à la planification du projet
    • Organiser l’équipe projet, coordonner les tâches
    • Organiser et animer les différentes réunions de coordination et de mise au point du projet
    • Participer et suivre la conception du projet
    • Provoquer, participer aux analyses de risques liées au projet
    • Veiller à la cohérence des choix techniques en collaboration avec les acteurs fabricants (« Fabricabilité » interne ou externe)
    • Coordonner la documentation technique et tenir compte de la maintenabilité de l’installation
    • Collaborer aux relations avec les parties prenantes extérieures
    • Communiquer sur l’avancée du projet en collaboration avec les acteurs concernés
    • S’assurer du respect du contrat liant La Machine au client (délais, rendus, communication…)
    • Alerter les différentes directions visées ci-dessus de tout risque de déviation au contrat
    • Participer aux recrutements nécessaires au projet

    3.4. Profil recherché
    • De formation ingénieur ou équivalent et / ou architecte et/ou technicien confirmé - Maîtrise d’oeuvre dans les domaines de la construction architecturale acier
    • Expérience exigée ( 5 ans minimum) en suivi et coordination de travaux sur des chantiers complexes
    • Goût pour le travail en équipe
    • Goût certain pour les réalisations artistiques
    • Curiosité, imagination et créativité sont des qualités indispensables
    • Capacité d’organisation et d’adaptation
    • Maîtrise des outils CAO et bureautique (Rhinoceros, Solidworks, pack office, Microsoft Project)

    3.5. Type de contrat
    CDD temps plein jusqu’à septembre 2019.

    Prise de fonction : dès que possible

    RépondreSupprimer
  14. La preuve même que Nantes Métropole a confié de gré à gré à La Machine un contrat qu'elle n'était pas en mesure d'honorer. Il reste à espérer que La Machine trouvera un élément compétent, car l'enjeu n'est pas seulement une pré-étude à 2,5 millions d'euros mais la décision de réaliser ou pas une installation à 35 millions d'euros. Un CDD de 18 mois pour une expérience probablement pas facile à revendre, vu la singularité du projet, est-ce de nature à attirer un gros calibre ? Croisons les doigts.

    RépondreSupprimer
  15. ...et en plus, cet élément d'exception doit se trouver sur le carreau pile en ce moment pour pouvoir prendre ses fonctions le plus vite possible.

    RépondreSupprimer
  16. Un projet reste un projet.
    Le plus difficile est, sans conteste, l'art de ménager les susceptibilités, surtout dans le domaine "artistique" (un tas de ferraille reste un tas de ferraille, les normes restent les normes).

    RépondreSupprimer
  17. Objection : un projet ne reste un projet que tant qu'il reste un projet. Une fois posée la première pierre, il devient un chantier. On peut en parler au présent et non au futur.

    Deuxième objection : les susceptibilités ne sont pas seules en cause, il peut y avoir des intérêts sonnants et trébuchants. Qualifier un projet d'"artistique", permet, au nom de l'article 30 du décret du 20 mars 2016, d'échapper aux règles des marchés publics. Ou pour reprendre votre formulation, les marchés publics ne restent pas des marchés publics. Et tout devient beaucoup moins difficile !

    RépondreSupprimer
  18. C'est le profil du "coordinateur(trice)" que je voulais commenter, non l'objet de la coordination.

    Les susceptibilités supposées sont celles de "l'artiste" pour qui le "coordinateur(trice)" sera chargé de démerder la pré-étude du projet génial, mais juste un peu désordonné.

    Peu de doute que si ça s'engage mal (prévisible vu le pédigrée recherché), il (elle) devra, en plus du reste, en supporter toutes les conséquences.

    Bonne chance à l'heureux(se) élu(e).

    RépondreSupprimer