03 janvier 2024

Avant l’heure des Praud, c’est pas l’heure… mais ça viendra

Pascal Praud, candidat à la mairie de Nantes en 2026 ? Dans Presse Océan, ce 3 janvier, Dominique Bloyet développe cette hypothèse mais explique en même temps pourquoi elle n’est pas crédible. Un canular, donc, étalé sur cinq colonnes à la Une ? Peut-être pas totalement. Les grands rapaces attendent leur heure en surveillant du coin de l’œil l’animal qui commence à boiter.

Voici trente ans, Jean-Marc Ayrault avait pu asseoir sa réputation d’homme politique grâce à la qualité de vie nantaise. Il avait en outre rafraîchi le vernis « culturel » de la ville avec Royal de Luxe, les Machines de l’île et Jean Blaise. La situation de Nantes s’est sérieusement dégradée depuis lors. Les proches de Johanna Rolland déplorent un « Nantes bashing » mais l’emploi d’un anglicisme ne change rien à la réalité : le problème n’est pas que Pascal Praud ou d’autres disent du mal de la ville, c’est qu’il y ait du mal à en dire. Les règlements de compte dans les quartiers, les agressions en ville et les cambriolages en périphérie ne sont pas une poussière qu’on puisse cacher sous le tapis.


Johanna Rolland n’y est pas pour grand chose ? Elle a du moins un héritage à assumer. Jean-Marc Ayrault a délibérément favorisé l’installation de populations déshéritées venues de Roumanie. C’était d’un grand cœur, mais ça n’a pas bien fonctionné. Il a fallu lancer une MOUS pour essayer de rattraper le coup, puis une étude pour savoir pourquoi la MOUS patinait. Il serait vain de le nier, l’effet de cette politique pèse encore sur la rubrique des faits divers. Alors que la délinquance augmentait, à Nantes comme ailleurs, au début de ce siècle, Jean-Marc Ayrault refusait d’installer un système de vidéoprotection (sauf bizarrement au Mémorial de l’abolition de l’esclavage, quasi désert mais télésurveillé, lui, comme les bijoux de la couronne). Et s’il a accepté de créer une police municipale, elle n’est pas exactement partie du bon pied. Johanna Rolland a hérité en 2014 d’une pente vilainement savonnée. Parviendra-t-elle à la remonter avant les municipales de 2026 ? On ne parierait pas trop là-dessus.

Mesdames 1,7 %

Quant au volet culturel, il est à bout de souffle. Et pas seulement à cause des détournements de la Folle Journée ou des dérives du Carrousel des fonds marins. Chacun a pu voir cet été que Royal de Luxe n’est plus ce qu’il était. Avec l’abandon de l’Arbre aux Hérons après un feuilleton grotesque, les Machines de l’île ont cessé de se renouveler, or un parc d’attractions qui ne propose pas de nouveautés périclite. « Il n’y a pas d’autre avenir en dehors de ce projet », assurait d’ailleurs Pierre Orefice lui-même en 2015. De son côté, Le Voyage à Nantes, tenu à bout de bras par les finances métropolitaines, n’a pas atteint l’objectif affiché par Jean Blaise : faire entrer Nantes « dans le top 5 des destinations françaises ». On ne se l’avoue pas encore par ici, mais une fois Jean Blaise parti, les thuriféraires n’auront plus grand chose à dire, les langues se délieront ! La promesse d’un Vernoscope ou d’une Cité des imaginaires ne suffira pas à redorer le blason de la Métropole avant 2026. Le temps presse pour trouver la grande idée et il est trop tard à présent pour confier le projet à une entreprise spécialiste des parcs d’attraction : cela apparaîtrait comme un aveu d’impuissance.

Pour couronner le tout, Johanna Rolland s’est tiré une balle dans le pied en acceptant de diriger la campagne d’Anne Hidalgo lors de l’élection présidentielle de 2022. Résultat : 1,7 % des suffrages. Un désastre pour la candidate socialiste comme pour son bras droit, accusée d'amateurisme, de manque de leadership et d'inefficacité. Elle y a laissé beaucoup de son prestige de grande féodale. Le Parti socialiste ne lui en tient pas rigueur : il a fait d’elle l’un de ses deux premiers secrétaires délégués. Mais la faveur du P.S., aujourd’hui, est-elle un atout ou bien un handicap supplémentaire ?

Tout cela est sur la place publique. Pour tous les ambitieux de France et de Navarre, le message est clair : il va y avoir une belle place à prendre à Nantes. Foulques Chombart de Lauwe pourrait devoir faire face à forte concurrence ! D’ailleurs, le nom de Pascal Praud n’aurait-il pas été lancé sur la place publique comme une sorte de contre-feu, pour brouiller les pistes ? « Vous voyez, il y en aurait plein d’autres… alors pourquoi s’embêter à sortir du business as usual, du match Johanna Rolland versus Laurence Garnier, dont au moins on connaît le résultat ? »

 Illustration : copie d’écran partielle de Cnews, 3 janvier 2024

8 commentaires:

  1. J'imagine que le nom de Pascal Praud est lancé pour au moins une raison. Exciter les égos.
    Celui du petit milieu des journalistes pour vendre du papier mais aussi pour la satisfaction de voir leur corporation assumer un rôle législatif (ce qui n'est pas nouveau, mais ça s'était quelque peu tassé ces 30-40 dernières années); et celui du gros melon du médiocre journaliste sportif, médiocre DG de la com du FCN mais, avec un certain talent (tout du moins succès), du polémiste médiatico-politique. Et le choix de son relooker.

    Eventuellement, par intérêt personnel de Praud à s'autoriser un certain ascendant sur le milieu bourgeois nantais (ayant lamentablement échoué avec le FCN) et faire grossir les rangs de ses obligés.
    Parce que politiquement, difficile de voir en une candidature de Praud, qui n'aurait évidemment aucune chance d'être élu (je ne l'imagine même pas dans une quadrangulaire) autre chose que l'assurance de diviser la droite nantaise et ainsi favoriser Rolland. La droite sait que c'est une ville où Mélenchon aurait été élu PR haut la main.
    Alors les municipales ne sont pas les présidentielles sinon Medkour serait à la place de Rolland, mais malgré l'image désastreuse de l'héritière d'Ayrault (merci pour les historiens de demain de rappeler encore et toujours ses faits d'armes, je désespère que les Nantais ouvrent les yeux un jour sur ce sinistre personnage), la sortie de Chombart de Lauwe a déjà montré que la droite locale peut encore faire preuve de fébrilité. Signe d'une machine à perdre quand on n'a jamais eu autant de chance de gagner.
    D'ailleurs, difficile d'imaginer dans le petit-fils de résistant nordiste (le réseau familial est encore bien activé autour de Lille d'ailleurs) la moindre chance sous prétexte de quelques sorties sur l'insécurité. Il s'est bien fait rappeler à l'ordre par la matronne qui, si elle est une machine à perdre éprouvée localement, est sénatrice, elle. Et il a l'air plutôt très brut de décoffrage (pour rester poli).

    Alors permettez-moi de m'étonner que vous ne citiez que l'héritier dans votre billet.
    Il me semble que Sarah El Haïry s'est aussi positionnée. Elle commence à avoir un certain réseau en enchainant les députations, en restant à un niveau gouvernementale lui assurant une petite notoriété sans grand risque (s'occuper des jeunes et de la biodiversité, c'est forcément gentil). On passera sur son profil personnel réalisant un quasi bingo dans un cahier des charges d'une mauvaise fiction française (pléonasme).

    Enfin ça promet un feuilleton assez passionnant à suivre, les journalistes le savent mais ne sachant pas pour qui prendre parti pour éviter les turbulences à leurs postes, vendre du papier et du click reste leur seul intérêt clair sur la question.

    C'est un peu plus triste pour Nantes mais ça, qui s'en soucie ?
    Vous ne voulez pas vous présenter ? Vous auriez au moins une voix.

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  2. Sinon... je suis aussi surpris de votre part avec ce quasi-amalgame entre l'insécurité nantaise et les Rroms (et pitié aussi sur l'identification politiquement correcte de 2005 sur la Roumanie, déjà que ce n'est pas facile d'avoir un rdv chez un ophtalmo...). Vous avez tout à fait raison de rappeler que la situation nantaise avec les Rroms est très particulière. Et si vous n'êtes pas là pour développer sur autre chose que l'humanisme d'Ayrault derrière cette situation (son ambition politique nationale par exemple ou les plus petites ambitions financières d'un tissu économique cher à un certain Foulques), cette mise en lumière est un peu incongrue et étonnante chez quelqu'un nous ayant habitué à dépasser les clichés. Vous le savez, l'insécurité nantaise est, comme ailleurs, liée aux organisations criminelles largement mondialisées (sans dédouaner la réalité d'une corruption plus ou moins passive au niveau national; la presse locale ferait mieux d'enquêter un peu plus sur les activités à Montoir que de parler d'un collègue, mais ça sent sans doute un peu trop la sueur... et surtout les sueurs froides) mais s'il n'y avait que celles finançant d'ostentatoires maisons dans des bidonvilles en Bulgarie ou ailleurs, le préjudice n'aurait pas suffi pour que Pascal Praud fasse état de sa nostalgie stalinis... pardon... stanislasienne.

    Tout cela n'est en tout cas pas très brillant en terme d'élites.

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  3. Sarah El Haïry ? Je n'ai pas le sentiment de la connaître assez pour avoir une opinion (signe de mon ignorance ou de sa faible brillance ?), et puis elle est hors du sujet de mon billet, consacré à la fragilité de Mme Rolland et à la candidature de M. Praud, qui n'a probablement rien à voir avec elle.
    C'est gentil de vouloir voter pour moi, merci, mais je place ma candidature au-dessous de celle de Mme El Haïry, c'est dire.
    A propos des Roms, non, je ne suis pas dans le cliché. Je lis assidûment les faits divers de mon quotidien, et le doute n'est pas permis, au moins à propos des cambriolages en banlieue et en zone rurale. J'ai cité ce cas parce qu'il est emblématique de l'oeuvre de Jean-Marc Ayrault, qui a délibérément organisé l'accueil de Roms de Roumanie (et spécifiquement de ce pays) en 2005, comme le raconte en détail un rapport du Conseil de l'Europe (https://collectifromeuropenantes.files.wordpress.com/2010/07/rapport-richard-situation-enjeux-roms-migrants-nantes-juin-2008-fr-final.pdf) et a été dépassé par son succès. Que faire ? Il a simplement appelé l'Etat au secours (https://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-881QOSD.htm -- voir aussi la réponse de M. Lellouche).

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    1. Qu'El Haïry ne soit pas des plus brillantes, c'est sans doute vrai mais alors permettez-moi de m'étonner que vous remarquiez alors Foulques Chombart de Lauwe. Mais il est vrai qu'il investit beaucoup plus ses réseaux dans la PQR pour se faire remarquer.
      En bien ? On laissera chacun juger.

      Je ne vous en voudrais pas d'utiliser les Rroms comme prétexte pour critiquer Ayrault (toutes les raisons sont bonnes) mais les cambriolages liés à certains réseaux (ne parlons pas des réseaux caucasiens, géorgiens notamment) touchent justement plus des citoyens qui ne pourraient pas voter Praud, car ne résidant pas à Nantes.

      L'insécurité nantaise est à mon sens beaucoup plus un résultat direct du boom nantais impulsé par Paris (au sens étatique et au sens culturel).
      Pour exemples, car chacun voit l'insécurité où il veut bien la voir (qu'il accepte de la reconnaître est déjà un progrès), les émeutes de 2018 ont éclaté suite à la mort d'un trafiquant francilien. Celles de 2023 suivent un schéma dans lequel les Rroms n'ont pas grand chose à voir, leurs caravanes sont déjà bien chargées, pas la peine de les faire particulièrement remarquer au milieu d'autres.

      Comme je le notais, est-ce que Foulques Chombart de Lauwe aborde, entre fromage et dessert avec les copains de la CCI Nantes - Saint-Nazaire, la gangrène du trafic de drogues, notamment à Montoir ? Parce que c'est une porte d'entrée pleine d'avenirs, notamment pour les armuriers (du Caucase... et plus récemment d'Ukraine).

      D'ailleurs, qu'ils n'oublient pas de saucer les plats, et de les emmener avec eux, la Chine est finalement entré sur le marché des bateaux de croisières de luxe.
      Elle leur offriront quelques baguettes d'ici quelques temps.
      L'avantage, c'est qu'ils pourront toujours blâmer le socialisme.

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  4. @ Anonyme de 15:58
    Oh ! je ne veux pas être désobligeant envers Mme El Haïry, que je ne connais pas, mais je ne crois pas du tout que l'hypothèse Praud (je suis tenté de dire le bobard Praud) ait été lancée contre elle. En revanche, il me paraît bien probable qu'elle soit destinée à affaiblir la candidature Chombart.
    Nantes ville n'est étanche à aucun type de cambriolage et il n'est pas question de tout imputer aux Roms, mais le sentiment de sécurité est diffus et général, il est bien moins lié aux émeutes qu'au fait qu'à Nantes chacun connaît quelqu'un qui s'est fait cambrioler ou agresser (quand ça ne lui est pas arrivé personnellement). En ce sens, ce qui se passe à Rezé ou à Orvault pourrait alimenter le vote Praud (si Praud il y avait !). Ou plus sûrement grignoter le vote Rolland.
    Sur les dérives de Montoir, vous avez probablement raison, hélas, mais ce sujet n'est pas de la compétence municipale.

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  5. C'est donné beaucoup d'importance à la candidature, qui est encore loin d'être officielle, de Foulques Chombart de Lauwe.

    Comme je disais, l'insécurité est perçue de manière bien différente selon où on se situe.
    D'où je suis, viser les Rroms reste une façon de mettre les pieds dans le plat de l'insécurité communautaires sans trop risquer de se voire demander de les essuyer avant de s'attabler au politiquement correct.
    Il serait aussi intéressant de savoir le coût commun d'émeutes, plus sûrement supporté par les impôts, et de cambriolages, supporté par les assurances (et ruisselant sur le secteur sécuritaire, ce n'est pas perdu pour tout le monde).

    Reste qu'on a bien compris que, s'il souhaite gagner en débi... pardon... crédibilité, Foulques Chombart de Lauwe va devoir travailler (!) à autre chose que chasser des têtes (sic) et faire chauffer le twXter.
    Il a dans les 900 jours d'ici les municipales. Est-ce qu'une barbe de 3 jours à coup de sabot suffit à jouer de la séduction d'un virilisme fantasmé face à un siège de sénateur ?

    Praud ou pas Praud.

    De l'Externat à Saint-Stan, il n'y a pas si loin mais une candidature Praud affaiblirait plus sûrement la candidature RN (déjà une punition en soi en étant bombardé tête de liste à Nantes). Une place de conseiller municipal sur la liste du Nanto-Lillois pourrait plus sûrement intéresser le polémiste, il est quand même à l'apex de sa carrière, ce serait surprenant de le voir la risquer.
    Même si bien sûr, nous ne parlons que de la mairie de Nantes, une déculottée, même dans la capitale de l'univers occidental atlantique, ne devrait pas trop lui porter ombrage. En effet, nous avons trop tendance à accorder trop de crédit à la compétence municipale.

    Et si Ayrault, l'autoproclamé abolitionniste de l'oblitération mémorielle de l'esclavage, avait aussi fait une faveur à Mme en lui permettant de jouer elle aussi à la dame de charité républicaine, il y a des situations qui nécessite effectivement une intervention directe de l'Etat (et avoir des copains sénateurs peut se révéler utile).
    On peut lui reprocher beaucoup, tellement, énormément de choses, notamment d'avoir crédité des actions étatiques à son compte, mais pas le fonctionnement réel des institutions qui lui ont par ailleurs assuré une confortable retraite. Même s'il lui faut côtoyer au bureau de vote des gens non seulement éduqués dans le privé mais qui persistent en mettant leurs enfants dans le privé ! Mais ce sujet est aussi de la compétence départementale et régionale.

    Ah enfin de la politique politicienne et pas ces sujets ennuyeux de comptes, d'aménagement du territoire, de subventions culturelles !
    Quand l'autoproclamée gauche se tirera dans les pattes, on aura alors un nouveau spin-off de Games of Thrones: House of the Elephant.

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  6. Attention, si vous commencez l'année à ce niveau de niaque, tiendrez-vous la distance ?

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    1. Oh je ne suis que spectateur !
      Je n'ai pas cette impatience des premières fois qui n'engendrent que des fins précoces.

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