16 décembre 2025

Le pont Anne-de-Bretagne attend son tablier

Depuis plus de trois ans, Nantes Métropole bredouille le même narratif bricolé à propos du futur pont Anne-de-Bretagne : « Une place ou une promenade ? Un jardin ou un belvédère ? Une piste cyclable ou une voie de tram ? Un peu de tout ça, c’est ce que sera, fin 2027, le pont Anne-de-Bretagne. » Un peu de tout ça : mettez ça dans un shaker, secouez et servez frais, le tout étant d’éviter que le pont soit un pont ; on note que l’automobile n’a pas sa place dans le « un peu de tout ça ».


J’ai signalé voici trois ans que le pont nantais pourrait devenir le deuxième pont le plus large du monde, derrière le Bay Bridge de San Francisco. Nantes Métropole aime mieux être première dans son village que seconde dans Rome : el1e affirme à présent que son pont sera le plus large d’Europe. En réalité, c’est discutable : le Sinyi Most, le « pont bleu » de Saint-Pétersbourg, à côté de Saint-Isaac, restera moitié plus large que le nôtre, quoique trois fois moins long. Ce qui lui permet d’être aussi… un parking. Vu la difficulté de circulation qui s’annonce sur le pont Anne-de-Bretagne (toute la circulation automobile devra croiser celle des trams), quelques places de stationnement n’auraient pas déparé dans le « un peu de tout ça ».

Mais j’extrapole, là. Ce que le service de com’ de Nantes Métropole devrait plutôt raconter, en ce moment, c’est comment le pont va venir jusqu’à nous. Car le gigantesque tablier métallique construit près de Venise, attendu à Nantes au plus tard cette semaine, patiente depuis trois semaines dans le golfe de Cadix, tout au sud de l’Espagne. Eh ! faire traverser le golfe de Gascogne en pleine saison des tempêtes à une charge de 3 000 tonnes posée sur une barge, ça suppose quelques précautions. Sur lesquelles Nantes Métropole n’a apparemment pas grand-chose à dire.

Voir article complet sur Nantes Plus :

https://nantesplus.org/nantes-metropole-4/

La com’ de Nantes Métropole a du mal à faire le pont

21 novembre 2025

Tourisme à Nantes (5) : feue l’ambition touristique de Jean-Marc Ayrault

Juin 2004 : Jean-Marc Ayrault fait adopter par Nantes Métropole un projet destiné à créer de toutes pièces une destination touristique internationale : les Machines de l’île. François Delarozière et Pierre Orefice proposent sept ou huit attractions étonnantes. Huit ans plus tard, en 2012, deux d’entre elles seulement sont opérationnelles quand Jean-Marc Ayrault quitte Nantes pour l’hôtel Matignon : l’Éléphant et la Galerie. Le Carrousel est en voie d’achèvement. 

Avril 2014 : Johanna Rolland est élue présidente de Nantes Métropole. Les Machines de l’île comptent alors trois attractions. Fin 2025… toujours trois. Pendant presque douze ans, les Machines sont restées pratiquement en l’état. Après l’avoir confirmé en 2016, Johanna Rolland a abandonné le projet d’Arbre aux Hérons en 2022. Au moins dix millions d’euros ont été dépensés en pure perte. La vocation internationale de Nantes est en déshérence. 

Structurellement déficitaires, les Machines de l’île devraient disparaître. Mais l’écosystème touristico-congressiste de Nantes ne s’en remettrait sans doute pas. Il va donc falloir conserver les Machines et tout le reste, quitte à y engloutir chaque année plusieurs millions d’euros de subventions, sans perspectives d’amélioration à moyen terme. 

Et avec une épée de Damoclès au-dessus du système. Nantes a confié ses activités touristiques à la SPL Le Voyage à Nantes dans le cadre de délégations de service public (DSP). Légalement, elle ne peut les assortir de subventions que dans la mesure des sujétions de service public qu’elle impose à son délégataire. Dans les faits, elle adapte ses copieuses subventions aux déficits d’exploitation du Voyage à Nantes. 

Le contrat de DSP des Machines de l’île vient à échéance fin 2026. Si Nantes tente de le reconduire sans changement majeur, la logique voudrait que le préfet demande l’avis de la chambre régionale des comptes. Elle n’aura pas les moyens d’améliorer la situation, mais elle pourrait l’aggraver encore !

Voir article complet sur Nantes Plus :

https://nantesplus.org/machines-de-lile-2/

L’ambition touristique de Jean-Marc Ayrault :
une voie sans issue pour Nantes

Précédents billets :

Tourisme à Nantes (1) : Le Voyage à Nantes 2025 a changé de patron mais a gardé ses compteurs (enfin, pas tous…)

Tourisme à Nantes (2) Le Voyage à Nantes ne fait pas mieux que vivoter depuis vingt ans

Tourisme à Nantes (3) : Les Machines de l’île en danger

Tourisme à Nantes (4) : les Machines de l’île implicitement condamnées

13 novembre 2025

Tourisme à Nantes (4) : les Machines de l’île implicitement condamnées

« Dire non à l'Arbre aux Hérons, ce serait dire non à la pérennité des Machines », avaient prévenu Pierre Orefice et François Delarozière dès 2013. « Ce serait stopper une belle aventure et condamner la dynamique des Machines dans les dix ans à venir. » Tout parc d’attraction doit évoluer régulièrement pour inciter le public à revenir. Même si elles n’étaient pas très spectaculaires – un « paresseux », des « colibris »… ‑ les nouveautés destinées in fine à l’Arbre aux Hérons permettaient aux Machines de stimuler leur fréquentation grâce à une communication ardemment relayée par la presse locale. De plus, le succès de la Galerie des Machines repose sur le talent de ses animateurs, qui ont besoin de perspectives pour maintenir leur motivation. Plus d’Arbre, plus de nouveautés. Voilà pourquoi les Machines de l’île sont en danger.

Johanna Rolland s’est donné le temps de réfléchir à la question. Le 7 juillet 2016, elle annonce la construction de l’Arbre aux Hérons puis lance une longue et coûteuse série d’études préalables. Il y en a au total pour 8,6 millions d’euros de dépenses préliminaires ‑ et même 9,2 millions en comptant la branche prototype construite dès 2007 devant les Nefs des Chantiers. Le 9 juillet 2021 enfin, entourée de Fabrice Roussel, Pierre Orefice, Yann Trichard et Ben Barbaud, patron du Hellfest, Johanna Rolland déclare : «  Le projet entre dans une phase décisive ». Mais au lieu de faire voter un feu vert formel par le conseil métropolitain, elle remet le sujet à plus tard, de séance en séance, pendant plus d’un an. Puis, soudain, le 15 septembre 2022, elle annonce l’abandon du projet pour des raisons économiques fort peu convaincantes.


L’Arbre aux Hérons est un projet mal fichu à plusieurs égards : il est raisonnable d’y renoncer et déraisonnable d’avoir tergiversé si longtemps. Mais il faut en assumer les conséquences. Johanna Rolland sait que, conformément à la prophétie de MM. Delarozière et Orefice, elle risque de tuer les Machines en abandonnant l’Arbre aux Hérons. Elle le sait si bien qu’elle avance un plan B. L’abandon de l’Arbre aux Hérons « ne marque pas la fin des Machines de l’île », assure expressément Nantes Métropole (c’est nous qui soulignons), « puisque Johanna Rolland et Fabrice Roussel ont confirmé aux mécènes que les fonds collectés par le fonds de dotation financeront la mise en exploitation du Grand Héron […] dès la saison touristique 2024/2025 ».

Un plan B peu convaincant

Autrement dit, cette mise en exploitation est le fil qui relie les Machines à la vie. C’est un plan B au rabais, mais il a le mérite d’exister. Il est confirmé début 2024 quand Fabrice Roussel, alors premier vice-président de Nantes Métropole, déclare : « Ce que nous voulons et nous nous y sommes engagés par rapport aux mécènes, c’est [mettre le Grand Héron] en exploitation comme le Grand Éléphant à partir de 2025 ». L’engagement initial pris « par rapport aux mécènes » est même la construction de l’Arbre aux Hérons tout entier, mais passons… Cette première promesse n’ayant pas été tenue, la seconde le sera-t-elle ? Elle figure encore à ce jour sur le site web de Nantes Métropole

Plusieurs mois passent encore avant qu’un bureau d’études soit chargé, en octobre 2024, pour un montant pouvant atteindre 220 000 euros HT, d’établir un diagnostic de la santé du Héron, puis de piloter son éventuelle réparation. Il semble que le diagnostic n’ait pas encore été livré. Même si ce n’est pas en 2025, la promesse de Nantes Métropole sera-t-elle tenue un jour ?

Il suffit de regarder la machine abandonnée à côté des Nefs pour en douter. En trois ans et demi de présence, utilisée une seule fois à l’automne 2022, elle semble devenue une épave. Elle a subi des intempéries, certes. Mais tel était son destin ‑ et à 40 mètres de hauteur ! ‑ si l’Arbre avait vu le jour. Et puis, on imagine mal sa proposition commerciale : qui aurait envie d’acheter un billet pour s’installer dans un de ses paniers d’osier afin de tourner en rond pendant quelques minutes à quatre ou cinq mètres du sol.

Le plan C oublié

Puisque la survie des Machines dépend de ce Héron, faut-il en conclure, corrélativement, que Nantes Métropole s’est résignée à la « fin des Machines de l’île » ? Le soupçon est d’autant plus légitime que, tout le monde semble l’avoir oublié, il a existé un plan C dont Johanna Rolland n’a pas voulu.

En novembre 2022, Yann Trichard, président de la Chambre de commerce et d’industrie, propose une solution privée pour réaliser l’Arbre aux Hérons malgré le renoncement de Nantes Métropole. Il va même jusqu’à évoquer un investissement rentable, et Nantes Métropole admettra que la « faisabilité économique du projet » est démontrée. Ce qui revient à reconnaître entre les lignes que Johanna Rolland s’est trompée en affirmant le contraire deux mois plus tôt !

Nantes Métropole annonce néanmoins, le 15 septembre 2023, que « Johanna Rolland confirme l’arrêt de l’Arbre aux hérons ». Elle justifie cette fois sa décision par des insécurités juridiques aussi peu convaincantes que les arguments économiques avancés un an plus tôt. À tout le moins, si vraiment la « faisabilité économique » est démontrée, Nantes Métropole devrait reprendre sa copie, qui ne comporte pas, elle, ces « insécurités juridiques ».

Et puis non, l’emplacement prévu dans le Jardin extraordinaire sert à autre chose, la page est définitivement tournée. Et l’on en revient à la prophétie de départ : « Dire non à l'Arbre aux Hérons, ce serait dire non à la pérennité des Machines »… (À suivre)

 

Précédents billets :

Tourisme à Nantes (1) : Le Voyage à Nantes 2025 a changé de patron mais a gardé ses compteurs (enfin, pas tous…)

Tourisme à Nantes (2) Le Voyage à Nantes ne fait pas mieux que vivoter depuis vingt ans

Tourisme à Nantes (3) : Les Machines de l’île en danger

 

02 novembre 2025

La mairie de Nantes mal tuyautée sur René Martin

« Éteindre l’incendie avant qu’il ne se propage et devienne hors de contrôle », ainsi Médiacités décrit-il les réactions officielles à ses révélations sur René Martin, créateur de La Folle Journée. La Ville de Nantes a annoncé qu’elle cessait toute collaboration avec l’intéressé et, pour faire bonne mesure, qu’elle le dénonçait à la justice. Elle n’avait pourtant aucune raison juridique de se couvrir la tête de cendres et René Martin est présumé innocent. Mais il faut croire qu’elle se sentait tout de même responsable quelque part.

Ça peut se comprendre. Johanna Rolland se veut en pointe dans la protection des femmes contre les comportements sexistes. Lors de sa campagne électorale de 2020, par exemple, elle a promis de faire le ménage parmi les bars et discothèques nantais en constituant un « réseau de la ville non sexiste ».

Si Johanna Rolland surveille les bars et discothèques, elle devrait tout autant se méfier des milieux musicaux. Les scandales sexuels y sont nombreux. Le sujet a même donné matière à un article de Wikipedia ! Des chefs d’orchestre en vue ont carrément été accusés de viol. Et des bruits couraient depuis longtemps à propos de René Martin. Rien de très sulfureux, mais assez pour troubler ses collaboratrices à coups de « regards appuyés » et de « main  sur l’épaule ».


Personne ne tiendra Johanna Rolland comptable des comportements des bars et discothèques. René Martin, en revanche, était un interlocuteur régulier de La Cité des congrès, qui appartient majoritairement à Nantes Métropole. Le nom de La Folle Journée est même une marque déposée en commun par Nantes et par René Martin.

Comment Johanna Rolland pouvait-elle tenir à l’œil ce dernier ? Simple : elle avait nommé à la direction générale de la SEM La Folle Journée une experte en défense de la cause féministe, Joëlle Kerivin, directrice de l’Espace Simone de Beauvoir. À chaque inauguration d’une Folle Journée, la maire de Nantes remerciait rituellement René Martin et Joëlle Kerivin dans la même phrase. Jusqu’au jour où il a fallu se séparer d’urgence de la seconde pour avoir puisé dans la caisse. Et en plus, elle n’a rien vu des agissements de René Martin en cinq ans de présence ?

Le risque était évidemment que l’affaire sorte juste avant les élections municipales de mars 2026. Heureusement, l’abcès a percé largement avant. On l’a échappée belle.

Illustration Gemini 2.5

29 octobre 2025

Tourisme à Nantes (3) : Les Machines de l’île en danger

 En 2024, Nantes Métropole a précipitamment ajouté plus de 2 millions d’euros aux subventions qu’elle verse à la SPL Le Voyage à Nantes. Sans cette manne financière, la SPL aurait été déficitaire d’environ 2 millions d’euros, après 1 million en 2023, et Jean Blaise serait parti en retraite en laissant une situation désastreuse.

À chaque euro de chiffre d’affaires réalisé par la SPL, il faut ajouter 1,82 euro de subventions. L’argent du contribuable n’est qu’un palliatif. La dépense publique nantaise en faveur du tourisme est inefficace.


Les Machines de l’île en sont la cause principale. Censées rapporter de l’argent à l’origine, elles en ont toujours coûté. En 2017, Nantes Métropole a admis que ses subventions augmenteraient parallèlement à la fréquentation attendue. C’était déjà contre nature, et ça n’a pas suffi : il a fallu en rajouter. Et alors que le tourisme est en pleine expansion dans le monde, il ne l’est pas sous les Nefs de l’île de Nantes, ou du moins il ne suffit pas à compenser la désaffection du public français. Il devrait manquer en 2025 près d’un cinquième des visiteurs prévus par la convention de 2017. Dans le même temps, la fréquentation du Puy du Fou aura augmenté d’environ 25 %. Année après année, un constat s’impose : le choix imposé en 2004 par Jean-Marc Ayrault, contre l’avis formel d’un cabinet-conseil en marketing touristique, était mauvais.

La stagnation actuelle serait-elle due aux travaux en cours sur le pont Anne-de-Bretagne ? Non : ils améliorent plutôt l’accès des piétons, et les Machines elles-mêmes ne s'en plaignent pas (ce qui ne les empêche pas de bénéficier d’une indemnisation). Elles incriminent en revanche la chaleur, les pannes des machines, l’absence de nouveautés et l’absence de « levier événementiel ». Les trois premières causes ne s’arrangeront pas de sitôt. Les conséquences pourraient vite devenir graves (à suivre).

Voir article complet sur Nantes Plus :

https://nantesplus.org/ma/

Les Machines de l’île : le boulet du Voyage à Nantes


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Tourisme à Nantes (1) : Le Voyage à Nantes 2025 a changé de patron mais a gardé ses compteurs (enfin, pas tous…)

Tourisme à Nantes (2) Le Voyage à Nantes ne fait pas mieux que vivoter depuis vingt ans


16 octobre 2025

Tourisme à Nantes (2) : Le Voyage à Nantes ne fait pas mieux que vivoter depuis quinze ans

Comme d’habitude, Le Voyage à Nantes prétend avoir cartonné cet été. Pourtant, malgré ses communiqués flatteurs, il est globalement en échec. Il progresse peu en fréquentation et en notoriété alors que le tourisme se développe partout. Et il maîtrise difficilement ses finances. Nantes Métropole peut-elle continuer ainsi ?

Le Voyage à Nantes rappelle pompeusement, dans sa  présentation institutionnelle, qu’il est une société publique locale (SPL) « née de la volonté politique de Nantes Métropole et la ville de Nantes de s’imposer dans le concert des villes françaises et européennes en se positionnant et s’affirmant comme une ville enviée d’art et de culture, leviers de son développement touristique. » Cette stratégie est poursuivie depuis le 18 juin 2004, date à laquelle Jean-Marc Ayrault a imposé la création ex nihilo des Machines de l’île. Elles bénéficieront de fonds européens en tant qu’équipement touristique.

L’année suivante est créée Nantes Culture & Patrimoine, une SEM chargée des sites culturels. Puis, début 2011, Jean-Marc Ayrault réunit cette SEM, le château des ducs de Bretagne, l’office de tourisme et les Machines de l’île dans une structure unique de droit privé mais à capitaux publics, la SPL Le Voyage à Nantes. Jean-Baptiste Desbois, Jean-Marc Devanne et Marie-Hélène Joly, respectivement dirigeants de Nantes Culture & Patrimoine, de l’office de tourisme et du château, sont poussés vers la sortie. Jean Blaise est nommé directeur général de la SPL.

Un choix étrange, a priori : alors dirigeant du CRDC, association culturelle créée dans les années 1980 avec une vocation ouvertement politique, Jean Blaise est normalement en fin de carrière : il aura 60 ans et 4 mois, âge légal de la retraite à l’époque, moins de six mois après la création de la SPL. L’unique vrai succès de sa vie professionnelle, le festival Les Allumées, remonte à une quinzaine d’années, et il vient d’essuyer un contrôle de la chambre régionale des comptes qui lui vaudra des remarques sévères sur sa gestion des biennales Estuaire (« incontestablement un projet de gauche », assure-t-il à Presse Océan). Mais c’est un proche de Jean-Marc Ayrault depuis près de trente ans.

Bilans à la Pyrrhus

Le Voyage à Nantes gère ses divers équipements dans le cadre de délégations de service public (DSP) mais « ce qui en fait son exemplarité » (sic) est son événement estival éponyme. Il doit faire boule de neige grâce à une collection d’œuvres « pérennes » accumulée d’année en année, conjecture-t-on.

Quinze ans et des centaines de millions d’euros après sa création, où en est Le Voyage à Nantes ? À l’été 2017, par exemple, Jean Blaise affichait 2 389 943 visites pour 800 000 visiteurs du parcours estival (soit trois sites visités en moyenne par personne, sur cinquante-deux proposés : on mesure l’enthousiasme). Sophie Lévy, qui l’a remplacé à la tête de la SPL, revendique 741266 visites en juillet-août 2025. Le nombre de visites a-t-il vraiment été divisé par trois ou le bilan de 2017 était-il faux ? Ou bien faut-il comparer les visiteurs de 2017 aux visites de 2025 et conclure que la fréquentation a baissé de 7,3 % par rapport à l’édition d’il y a huit ans alors que le nombre de stations numérotées au long de la ligne verte (79) a augmenté de moitié ? Avant la création de la SPL, Estuaire avait compté 764 125 visiteurs en 2007, ce que Ouest-France qualifiait de « bilan en demi-teinte ».

Les installations du Voyage à Nantes sont distrayantes pour les Nantais que nous sommes, mais les gros bataillons de touristes fréquentent surtout des sites permanents et autonomes, non spécifiques du Voyage à Nantes, qui existaient avant lui et n’ont pas forcément besoin de lui : le château des ducs de Bretagne, le Jardin des plantes, les Machines de l’île... Une exposition comme Hokusai tire les statistiques, mais ce n’est probablement pas sa concomitance avec le Voyage à Nantes qui fait son succès. D’autres manifestations de qualité, comme l’installation du cheval mécanique Zeus dans le cours Cambronne, action de mécénat privé du groupe Sanofi, réussissent très bien en dehors du Voyage à Nantes.

Une stratégie maintenue malgré son peu de résultats

Jean Blaise a opiniâtrement tracé son sillon dans une direction peu fructueuse, avec l’aval de Jean-Marc Ayrault puis de Johanna Rolland, qui avait pourtant paru hésiter brièvement en 2014. Après avoir semé ici et là des œuvres disparates et parfois médiocres, il est parti l’an dernier en laissant derrière lui un concept au bout du rouleau. Google Trends révèle que l’intérêt des internautes pour Le Voyage à Nantes va décroissant. Les requêtes en ligne ont atteint leur zénith (indice 100) dès la première année, en juin 2012. Jamais elles n’ont retrouvé ce niveau depuis lors. Elles ont plafonné à 26 % en août 2023, à 24 % en juillet 2024, à 20 % en juillet 2025.

Copie d'écran Google Trends

Dans le même temps, le tourisme a pourtant connu un développement énorme en France et dans le monde. Dynamisé par les compagnies low-cost, l’aéroport de Nantes Atlantique a vu passer 2,6 millions de passagers en 2007, 5,5 millions en 2017 et 7 millions en 2024. La mode des city-breaks s’est imposée. D’autres ont mieux profité que Nantes de ces facteurs exogènes. La ville de Bilbao, référence expresse de Jean-Marc Ayrault quand il a assigné une vocation touristique à Nantes en 2004, a doublé son nombre de visiteurs entre 2010 et 2024. Dans le marché dynamique du tourisme, qui n’avance pas recule. Nantes n’a pas réussi à « s’imposer dans le concert des villes françaises et européennes », etc.

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Le Voyage à Nantes 2025 a changé de patron mais a gardé ses compteurs (enfin, pas tous…)


01 octobre 2025

Tourisme à Nantes (1) : Le Voyage à Nantes 2025 a changé de patron mais a gardé ses compteurs (enfin, pas tous…)

Le Voyage à Nantes 2025 s’est achevé le 31 août en catimini, même si la fontaine de la place Royale joue les prolongations. Naguère, à peine les lumières éteintes, Jean Blaise s’empressait de publier des communiqués de victoire, en général largement « travaillés ». Cette année, il a fallu attendre presque un mois pour obtenir quelques données. 

La manifestation estivale a pourtant été, Sophie Lévy tient à le faire savoir, « conçue par Jean Blaise et les équipes projets ». On imagine donc que les modalités de comptage des visiteurs ont été les mêmes que les années précédentes. Les modalités de triturage des chiffres l’ont-elles aussi été ? 

Sophie Lévy annonce, selon Ouest-France, « une hausse de la fréquentation des sites de l’ordre de 8 % », et ActuNantes précise : 741266 visites en 2025 pour 685607 en 2024. Une source des plus fiables a pourtant compté 852 919 visiteurs en 2024. Autrement dit, la fréquentation aurait en réalité baissé de 13 %. Cette source des plus fiables, c’est Nantes Métropole elle-même

Le Voyage à Nantes 2025, Vie de bêtes,
d'Eléonore Saintagnan au Passage Sainte-Croix

Le Voyage à Nantes explique la différence par un « comptage à périmètre constant ». C’est un peu court ! Il faudrait au moins définir ce « périmètre », et révéler quels compteurs de l’an dernier ont enregistré la différence entre les 852 919 de 2024 en 2024 et les 685 607 de 2024 en 2025, soit pas moins de 167 312 visiteurs, ou 20% de la fréquentation 2024 ! Et tant qu’à faire, pourquoi Le Voyage à Nantes a-t-il renoncé à installer ces glorieux compteurs en 2025 ? On suppose qu’il ne les a pas posés ailleurs, puisqu’il ne livre pas d’autre statistique que celle du « périmètre constant » : ses moyens techniques se sont-ils à ce point dégradés ?

Un « compteur », ça paraît objectif et incontestable. Cependant, outre l’effet du « périmètre constant », un même visiteur pourra être compté pour un, deux, dix… cent selon les sites, avec compteur ou pas, qu’il choisit de visiter une ou plusieurs fois. Le choix des compteurs comptés permet de moduler les chiffres à volonté. La méthode de la comparaison avec un exercice antérieur minoré a posteriori avait déjà servi en 2016. Les progrès accomplis ne sont pas vraiment… comptables. 

Merci à Hokusai, pas à Zeus


Sophie Lévy mentionne comme site le plus visité cette année l’exposition Hokusai : 147 000 visiteurs. Mais l’exposition Hokusai a duré du 28 juin au 7 septembre, soit une semaine de plus que l’événement estival. Au moins 15 000 de ses visiteurs ne devraient pas figurer au bilan officiel ! Plus sérieusement, quelle est la locomotive de l’autre ? Hokusai n’a pas eu besoin du Voyage à Nantes pour remporter un grand succès. Or chaque visiteur de l’exposition en juillet-août a pu être compté pour plusieurs visiteurs du VAN à lui tout seul si, sorti du château des ducs de Bretagne, il a fait un tour en ville. Le surcroît de fréquentation dû spécifiquement aux millions d’euros investis dans les installations d’Ivan Argote et al. n’est probablement pas colossal.  

Ce qui mène à s’interroger sur les retombées d’autres expositions à succès. Le musée d’arts ne dépend pas du Voyage à Nantes. Il ne semble donc pas que les 123 283 visiteurs de l’exposition Hypersensible en juillet-août voici deux ans aient été comptabilisés dans le bilan officiel du Voyage à Nantes 2023, soit 745 440 visiteurs. De quoi faire pâlir le bilan 2025 (741 266 visiteurs, donc) qui inclut, lui, l’exposition Hokusai puisque le château est géré par Le Voyage à Nantes. 

Le même constat s’impose ces jours-ci avec Zeus, le cheval mécanique des Jeux Olympiques exposé au cours Cambronne grâce au mécénat du groupe Sanofi – le VAN n’y est pour rien. L’an dernier, le champion du Voyage à Nantes avait été Le Sursaut des bois courbes, l’escalier de bois bâti sur le même site. Il avait attiré116 198 visites en deux mois de l’été 2024. Zeus, en a attiré 48 000 en seulement deux jours de septembre 2025. Il n’est pas dit que l’effet Voyage à Nantes dépasse l’épaisseur du trait par rapport à une exposition de qualité.

Sven Jelure

24 septembre 2025

La mairie de Nantes pavoise en l'honneur d'Emmanuel Macron (suite) : la Palestine au lieu de la Bretagne

Hisser le drapeau de l'État de Palestine devant la mairie de Nantes n'est pas en soi un acte d'une bien grande importance. Il salue la reconnaissance par Emmanuel Macron d’un État proclamé en 1988 et déjà reconnu par 152 États dans le monde. Le président de la République a cherché à mettre en scène son discours (alors qu’il aurait pu se contenter d’un simple tweet, comme le Premier ministre britannique), Johanna Rolland l’y a aidé. Quelle qu’en soit la raison (hommage d’une maire fragilisée à un président en difficulté ?), l’événement n’est pas majeur.


Le fait notable, en revanche, c’est que Johanna Rolland ne s’est pas contentée d’ajouter le drapeau de l’État de Palestine à ceux qui flottaient déjà devant la maire. Elle l’a hissé à la place du Gwenn-ha-du, le drapeau breton. La photo ci-dessus a été prise lundi dernier. La photo ci-dessous a été prise en janvier dernier. 


Ce remplacement vexillologique est-il une simple étourderie ou un geste délibéré ? Johanna Rolland ne pourra pas se dispenser d’une explication.


23 septembre 2025

La mairie de Nantes pavoise en l’honneur d’Emmanuel Macron

Johanna Rolland a fait hisser le drapeau palestinien sur la mairie de Nantes ce 22 septembre. Pourquoi ce jour-là et pas un autre ? Parce que le président de la République a prononcé ces paroles : « La France reconnaît l’État de Palestine ».

La position du président n’était pas originale : 152 États du monde entier avaient reconnu l’État de Palestine avant la France. La France a même voté en 2024 en faveur de son admission à l’ONU ; on peut supposer qu’elle considérait qu’il existait !


Mais Emmanuel Macron a voulu procéder de façon visible : il est allé faire un discours à New York, dans les locaux de l’ONU. Cela n’avait rien d’indispensable. Keith Starmer, Premier ministre britannique, s’était contenté la veille d’un message sur X ! 

Le président français, qui aurait pu devancer le Royaume-Uni en parlant au présent de l’indicatif toutes les fois où il a parlé de reconnaissance au futur, a simplement voulu se mettre en valeur. Avec succès : toute la presse en a parlé. C’est un peu grâce à Johanna Rolland.

Voir article complet sur Nantes Plus :
https://nantesplus.org/palestine/
Palestine : quand Johanna Rolland s’aligne sur Emmanuel Macron

15 août 2025

Foulques Chombart de Lauwe a pour Nantes les yeux de Chimène

Aimez-vous Nantes ? Depuis quelques années, certains trouvent que ça devient difficile… Foulques Chombart de Lauwe, candidat déclaré à l’élection municipale de 2026, affiche des sentiments plus résilients. Il a publié au début de l’été un Abécédaire d’un amoureux de Nantes.

Sa notice à la Bibliothèque nationale assure que « cet abécédaire vous donnera envie d'explorer de nouveaux endroits pour flâner,vous cultiver ou vous distraire ». Mais aussi, faudrait-il ajouter, pour rouspéter, vous agacer ou vous indigner. Car les pages d’amour déçu ne manquent pas non plus dans ce livre : allez donc voir un peu aux articles CHU, Circulation ou Sécurité (« le gros boulet de l’équipe municipale », p. 147)…


De bons sentiments font du bien par les temps qui courent – même si l’on peut les trouver consommés avec trop de modération aux articles Vins et Culture. Quant à l’article Bretagne, il prouve au moins la sincérité d’un auteur capable de nuire par amour à son propre intérêt électoral. « Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour », comme disait le poète surréaliste Pierre Reverdy (1889-1960).

Foulques Chombart de Lauwe, Abécédaire d’un amoureux de Nantes, ISBN 979-10-976432-0-1, 178 pages 20,8 x 14,8 cm, 10 €. Disponible entre autres à la librairie Coiffard

Voir article complet sur Nantes Plus :

https://nantesplus.org/abecedaire/

« Abécédaire d’un amoureux de Nantes » : l’amour est parfois aveugle