31 décembre 2010

Le rapport annuel 2009 de Nantes Métropole : un bilan nul ?

« Le rapport d'activité n'a pas pour seul but de constituer un archivage et une mémoire du service public réalisé au cours d'un temps donné », explique doctement le site web de Nantes Métropole , « il est aussi l'occasion de faire un bilan objectif de l'activité passée et d'essayer, avec un peu de recul, d'en tirer quelque enseignement pour l'action présente. »

Cette année, « un peu de recul » est un euphémisme. Nous voici au dernier jour de 2010 et la communauté urbaine n'a pas été capable à cette date de mettre en ligne son rapport annuel... 2009. Ne veut-elle pas faire un bilan objectif de l'activité passée ? C'est peut-être plus prudent. Ou bien a-t-elle renoncé à en tirer quelque enseignement et opté pour l'inaction ? Idem.

30 décembre 2010

Le tribunal de Nantes fait la joie des réparateurs

Six des vastes baies vitrées du palais de justice de Nantes ont été étoilées hier. Sur le plan esthétique, ça n'est pas laid : à la tombée de la nuit, les fentes accrochent la lumière, on dirait des décorations de Noël inédites. Sur le plan financier, c'est autre chose : à 16.000 euros la vitre, le budget de la justice va souffrir. Oui, 16.000 euros l'unité, à peu près quinze mois du revenu d'un smicard, c'est le tarif, selon Ouest France. Ce n'est pas pour rien que l'édifice s'appelle Palais.
Point positif : les vitrages sont fendus mais n'ont pas cassé. Ils s'avèrent moins fragiles que les parements des murs latéraux, régulièrement dégradés et tout aussi régulièrement remplacés - pour un coût inconnu mais qu'on imagine non négligeable. Tout passant le constate aisément : les plaques neuves étant plus foncées que les anciennes, il en résulte un effet de damier plutôt malpropre.
Couvrir un bâtiment aussi sensible qu'un tribunal d'un revêtement à ce point émotif était une erreur de conception manifeste. On sait que ça n'est pas la seule. Et pour en revenir aux vitrages, comme décidément il y a toujours quelque chose qui ne tourne pas rond dans la construction anguleuse de Jean Nouvel, le système de sécurité a mal fonctionné : le briseur de vitres n'est pas visible sur les enregistrements des caméras...

19 décembre 2010

Presse Océan est très lu, mais aveuglément

Presse Océan a publié le 8 décembre un entretien de Guillaume Lecaplain avec le professeur Carlo Pedretti qui révélait – un peu tard – que la « découverte » d’un manuscrit de Léonard de Vinci à Nantes n’en était pas une. La vraie information n’était pas qu’on avait retrouvé ce manuscrit mais que la Médiathèque en avait précédemment perdu la trace.

Carlo Pedretti citait l’auteur de la première étude sur ce manuscrit, Renzo Cianchi. Dans la précipitation du bouclage, Presse Océan avait écorché le nom de ce dernier, transformé en « Ciachi ». Le quotidien nantais a ultérieurement corrigé son erreur dans sa version en ligne.
Le texte actuel sur le site web de Presse Océan
Le texte enregistré par Google le 9 décembre

Mais la coquille a fait du chemin. De nombreux confrères ont recopié l'information telle quelle sans la vérifier. À leur décharge, il faut reconnaître que l’AFP avait sans sourciller relayé la faute d’orthographe initiale. Une petite recherche sur le net leur aurait pourtant permis de rectifier le tir en quelques secondes ! Parmi ces copieurs négligents figurent quand même Les Échos, Le Monde, Libération, Le Télégramme, Le Point, France Soir, Le Parisien, La Croix, Le Maine libre, Centre Presse, La Dépêche, Le Courrier picard, La Voix de Reims, L’Aisne nouvelle, La Voix du Nord, plusieurs chaînes de radio et de télévision (France 2, France 3, Info France…), bon nombre de sites web et même le blog de la Société Léonard de Vinci !

La Médiathèque de Nantes est en bonne compagnie, finalement.

18 décembre 2010

Après le manuscrit de Léonard de Vinci, un autre document oublié par la Médiathèque de Nantes : la lettre de Renzo Cianchi

Retour sur le texte de Léonard de Vinci retrouvé à la Médiathèque de Nantes. Loin d’être inconnu, on l’a dit, ce manuscrit avait été authentifié et répertorié en 1957 par Renzo Cianchi. Ce dernier lui avait même consacré une étude (« Un frammento inedito di Leonardo da Vinci nella Biblioteca Municipale di Nantes ») publiée dans le tome XIX de la Bibliothèque d’Humanisme et de Renaissance.

Ce seul fait conférait au modeste fragment conservé à Nantes un lustre particulier. Renzo Cianchi (1901-1985) occupe en effet une place centrale parmi les spécialistes de l’œuvre de Vinci au 20ème siècle. Acteur essentiel de la création de la Biblioteca Leonardiana di Vinci  en 1928, il en a été le conservateur pendant des décennies (une étudiante de l’université de Florence lui a consacré l’an dernier une thèse intitulée « Renzo Cianchi, una vita dedicata alla Biblioteca Leonardiana di Vinci »). Ses travaux sont régulièrement cités par des chercheurs du monde entier.

En bonne confraternité, Renzo Cianchi avait adressé un tiré à part de son étude aux responsables de la bibliothèque municipale de Nantes. Il en avait été remercié par une lettre du 24 mai 1957 signée de Luce Courville, bibliothécaire à Nantes à cette époque. Cette lettre est toujours entre les mains de son fils, Francesco Cianchi*. Posséder un fragment authentique de Léonard de Vinci inspire à la Médiathèque une fierté légitime. Mais l'avoir oublié devrait plutôt l'inciter à faire profil bas.

Mme Marcetteau retrouvera-t-elle dans ses dossiers la lettre originale de Renzo Cianchi ? Il paraît fort improbable, en tout cas, que Jean-Marc Ayrault convoque la presse pour ramener à de justes proportions les cocoricos du 6 décembre.
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* Lui-même fin connaisseur de l’œuvre de Vinci, Francesco Cianchi a publié en 2008, avec Carlo Pedretti et Agnese Sabato, un petit livre qui a eu un retentissement international. Intitulé La madre di Leonardo era una schiava? Ipotesi di Studio di Renzo Cianchi, il reprend une hypothèse de Renzo Cianchi selon laquelle la mère de Léonard de Vinci, Caterine, aurait été une esclave.

16 décembre 2010

11.794 passagers disparus sur l'île de Nantes

On a déjà dit ici que Pierre Orefice était brouillé avec les chiffres. On se demande à présent si ce n’est pas aussi le cas de François Delarozière.

Presse Océan l’a interrogé hier sur la fréquentation du grand Éléphant des Machines de l’île. « Nous sommes aujourd’hui rendus à 190.000 passagers au total » a-t-il répondu, en précisant que ce chiffre incluait 52.000 passagers pour 2010.

Voici donc comment ont évolué les scores de l’Éléphant :
  • 2007 (6 mois) : 35.000 (source : Pierre Delarozière cité par Isabelle Moreau, Ouest France, 31 décembre 2007)
  • 2008 : 59.500 (source : avis officiel de DSP, juillet 2009*)
  • 2009 : 55.294 (source : dossier de presse 2010 des Machines de l’île)
  • 2010 : 52.000 (source : Pierre Delarozière cité par Presse Océan, 15 décembre 2010)
Moins 7 % en 2009, moins 6 % en 2010, l’érosion est donc sensible, alors même que les Machines ont largement fait appel aux écoles du département pour qu’elles leur envoient en masse leurs élèves.

Cela dit, l’année n’est pas terminée. Si les 52.000 passagers de François Delarozière ne sont que le score atteint au 15 décembre et non une évaluation pour l’ensemble de l’année, l’Éléphant pourrait encore égaler le total de 2009. À condition de fonctionner à 100 % de sa capacité jusqu’à la Saint-Sylvestre.

Les chiffres ci-dessus recèlent pourtant un mystère. 35.000 + 59.500 + 55.294 + 52.000 = 201.794. Or, on l’a dit plus haut, François Delarozière parle de 190.000 passagers depuis l’origine. Où sont passés les 11.794 passagers manquants ?
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* L’avis mentionne 94.500 passagers depuis l’ouverture, soit 59.500 en 2008 par différence avec les 35.000 de 2007.

11 décembre 2010

Le manuscrit nantais de Léonard de Vinci n'est pas le Codex Leicester

Il y aura tout juste trente ans demain, le Codex Leicester de Léonard de Vinci était acheté aux enchères chez Christie’s par le milliardaire Armand Hammer pour 5 millions de dollars. Quatorze ans plus tard, il repasserait en vente publique et serait acquis par Bill Gates pour 30,8 millions de dollars, ce qui en ferait le manuscrit le plus cher du monde.

La Médiathèque de Nantes a-t-elle mis la main sur un trésor, au sens financier du terme, en retrouvant le fragment enfoui dans la collection Labouchère ?

Les références manquent : depuis belle lurette, les quelques six mille manuscrits connus de Léonard de Vinci reposent dans des collections publiques. Seul le Codex Leicester est resté entre des mains privées et a ainsi pu être affecté d'une valeur marchande.

Le document de Nantes mesure environ 10x20 cm, soit à peu près 30 % de l’une des soixante-douze pages du Codex Leicester. Proportionnellement, au prix où le patron de Microsoft a payé celui-ci, cela ferait 128.333 dollars, soit pile 97.000 euros.

Pas une fortune, mais pas mal quand même. Hélas, la comparaison est irrecevable. Le Codex Leicester est une œuvre unique que les grandes fortunes mondiales seraient prêtes à se disputer comme un trophée – d’où le prix extravagant payé par Gates. Écrit le plus accompli de toute l’œuvre de Léonard de Vinci, abondamment illustré de dessins, il forme un ensemble complet, passé entre des mains prestigieuses et jamais dispersé au cours de l’histoire, et surtout pas découpé. Autant de facteurs qui interdisent de comparer ce document sans pareil au fragment de Nantes, dont la valeur théorique est donc bien inférieure.

07 décembre 2010

Le manuscrit nantais de Léonard de Vinci : découverte ou ignorance ?

On est content que Nantes possède un manuscrit de Léonard de Vinci. Content aussi que Jean-Marc Ayrault et Agnès Marcetteau, directrice de la Médiathèque, craignent si peu le ridicule, eux qui se sont précipités devant les caméras de télévision pour proclamer la découverte.

Car ce manuscrit n’était pas du tout inconnu. Comme l’indique honnêtement Guillaume Lecaplain dans Presse Océan (7 décembre) après avoir interrogé le professeur italo-américain Carlo Pedretti, il avait été identifié dès 1957 par Renzo Cianchi (et non Ciachi). Conservateur de la Biblioteca Vinciana de Vinci, Cianchi (1901-1985) n’avait pas gardé sa découverte pour lui : il l’avait fait connaître par un article publié sous un titre parfaitement explicite (« Un frammento inedito di Leonardo da Vinci nella Biblioteca Municipale di Nantes ») dans le tome XIX de la Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance.

Ce travail a été cité à diverses reprises, en particulier dans les Studi Vinciani de Carlo Pedretti (Librairie Droz, Genève, 1957) et un article du même, « Complementi al folio di Nantes », paru en 1962 dans Raccolta Vinciana. Il est même répertorié par le Fonds Corbeau sur Léonard de Vinci de la Bibliothèque universitaire de l’Université de Caen/Basse-Normandie, disponible en ligne.

La vraie information n’est pas que Nantes possède un manuscrit de Léonard de Vinci. C’est que la directrice de sa Médiathèque n’en savait rien. Et que son maire, au lieu de le lui reprocher, en semble ravi.

Nantes avance mais ne sait pas bien où elle va

Hier, Nantes Avance (franchement présentée comme « une association de soutien à la politique de Jean-Marc Ayrault ») avait convié les Nantais salle Vasse pour un débat sur la culture. Au menu : Yannick Guin, Jean-Louis Jossic et Jean Blaise, invités à s’exprimer devant trois cents personnes dont la moyenne d’âge devait largement dépasser la cinquantaine.

Yannick Guin a été touchant dans le rôle du vieil édile sincère et bien peigné poussé vers la sortie. Il a brossé un intéressant tableau historique de la culture à Nantes, dont l’an zéro se situe apparemment vers 1982-1983. Comme d’habitude, il a cité Gramsci (« il ne faut pas que la société soit gélatineuse ») et rappelé sa thèse sur la dépression psychologique vécue par Nantes à la fin des années 1980 (« c’est sans doute pour ça qu’on a été élus »). À force d’avoir toujours su expliquer la société, on dirait qu’il se rend compte qu’il n’a finalement pas compris grand chose.

Jean-Louis Jossic, en chaussures jaunes et bleues cette fois, mais toujours hirsute, s’est davantage situé au ras des pâquerettes, impeccable dans son rôle d’adjoint à la culture. « Dans une grande ville, a-t-il dit, il y a des figures imposées : OPPL, réseau de lecture publique, musées… On manque donc de marges et l’on doit se baser sur le talent des Nantais. » Ce talent, il l’appelle aussi proximité ou militantisme et ose même une fois le mot qui fâche : bénévolat.

Loin du talent pas cher, Jean Blaise a fait son show : on va attirer de grands artistes à Nantes et ça attirera plein de touristes. Et à quoi reconnaît-on un grand artiste ? En substance, au fait que Jean Blaise l’a choisi. Ce discours tape-à-l’oreille impressionne peut-être un Jean-Marc Ayrault. Pas la salle, qui vit la culture de l’intérieur. « Vous avez dit : ‘j’ai demandé ceci à tel artiste… j’ai demandé cela à tel autre artiste’ », intervient une jeune participante. « Et pourquoi ne seraient-ce pas quelquefois les artistes qui vous demandent des choses ? » Jubilation dans le public. Jean Blaise comprend le danger et tente aussitôt de faire machine arrière. « Sans les artistes, je ne serais rien », plaide-t-il. Trop tard : tout le monde a pu voir ses chevilles (roses) enflées.

Il est clair que la concorde ne règne pas dans la culture nantaise. « Culture populaire », avance un participant. « Démagogie », répond Jean Blaise. « On ne fait pas que des paillettes », risque Jean-Louis Jossic sans un regard pour son voisin d’estrade. « Je pense que le paysage nantais devra être bouleversé, je pense qu’on a un peu raté une occasion lors des changements de directeur de structures comme le Lieu Unique – ça flanche », dit doucement Yannick Guin. Décidément, la politique culturelle est à l’image du reste de la politique municipale depuis vingt ans : un grand flou derrière des attitudes déterminées.

06 décembre 2010

Nantes et la Loire (3) : Le tirailleur sénégalais du pont Anne de Bretagne

Quel tirailleur sénégalais ? Il n’y a pas de tirailleur sénégalais au pont Anne de Bretagne. En effet, et c’est bien dommage. Nantes manque d’un endroit où ses habitants viendraient observer l’humeur de la Loire. Ce serait un point de rencontre populaire où la vie du fleuve rejoindrait celle de la cité.

Une statue fixée sur une pile de pont est un marémètre simple qui a fait ses preuves. Les Parisiens suivent les crues de la Seine aux guêtres du zouave du pont de l’Alma. Nos crues à nous sont plus intéressantes que les leurs, puisqu’elles viennent aussi bien de l'aval que de l'amont.

D’où l’idée d'une effigie de tirailleur sénégalais fixée sur une pile du pont Anne de Bretagne. Pourquoi le pont Anne de Bretagne ? Parce que la passerelle ménagée au niveau de l’ancienne pile du pont transbordeur assure un point d’observation idéal et plutôt convivial.

Reste le choix du motif. Nantes manque d’une belle statue publique de Nominoë. Mais le Tad ar Vro n’est pas trop politiquement correct ces temps-ci : en conflit permanent avec les Vikings, il s’est montré nettement hostile aux migrants et aux nomades. Un tirailleur sénégalais serait plus consensuel : il ferait pendant au zouave et rendrait hommage aux troupes d’Afrique, fort à la mode ces temps-ci.

En tout cas, une décision s’impose, et vite : si les édiles de gauche ne s’en chargent pas, une prochaine municipalité de droite serait très capable de fixer sous le pont la statue d’un prêtre réfractaire ou d’une captive vendéenne, histoire de rappeler que la jeune république, sous les ordres de Carrier, a noyé là des milliers de prisonniers en 1794. Face au Mémorial de l’esclavage, une repentance en vaut bien une autre.

05 décembre 2010

Nantes et la Loire (2) : Les anneaux de la mé-Loire

À la pointe de l’île Beaulieu, la Loire paraît familière au long des berges du Crapa. À la pointe de l’île de Nantes, quais et rambardes la rendent insaisissable.

Peut-être que le symbole arrange certains. Côté Orient, entre Malakoff et palais régional ligérien, l’eau opportune qui vient d’Anjou bénirait une population et une histoire néo-nantaises échafaudées de toutes pièces depuis un demi-siècle. Côté Occident, entre hôtels du quai de la Fosse et vestiges d’une ville industrieuse, l’eau interdite qui va vers l’océan laverait symboliquement la ville de son passé négrier et pue-la-sueur, chassant au loin des rêves trop bretons.

Mais les rêves ont la vie dure. Et puisque le trafic maritime ne reviendra pas de sitôt (rêve n’est pas nostalgie), à quoi bon conserver les hautes estacades qui nous isolent du fleuve ? On imagine des degrés se perdant dans les eaux, façon ghâts de Bénarès, où des mystagogues barbus baptiseraient leurs disciples, où les familles déçues du morne crématorium brûleraient les corps de leurs défunts sur des bûchers fumants au vent du centre-ville (les vieux Nantais qui ont encore dans les narines l’odeur des petits LU tout chauds comprendront l’idée), où, surtout, on viendrait se promener au bord de l’eau et non loin au-dessus. Ils serviraient aussi de gradins lors de spectacles nautiques.

Hélas, l’estacade paraît aussi sacrée que les grues Titan ou les hangars des chantiers, comme si le conservatisme était érigé en religion municipale. Et désormais, les anneaux de Buren veillent au grain : fixés sur les piliers, ils assurent leur survie à jamais, protection des œuvres d’art oblige. Au nom d’Estuaire, Nantes a pérennisé l’exclusion de la Loire !

04 décembre 2010

Nantes et la Loire (1) : La crue et la cuite

Deux fleuves arrosent Nantes : la Loire et le muscadet. Tous deux ont leurs excès. Voici tout juste un siècle, en 1910, Nantes était sous les eaux d’une crue centennale. La cuite, c’est plus souvent. Or l’addition Loire + muscadet est un mélange à risque.

La Loire devrait être l’atout numéro un du Hangar à bananes. C’est au contraire sa hantise depuis que quelques poivrots y ont piqué une tête. On a dressé des barrières, ménagé un no man’s land entre le promeneur et l’eau. La nuit même, des vigiles veillent au grain. Ainsi, le fleuve est devenu synonyme de danger, on le tient à l’écart – pour tous et pas seulement pour ceux qu’il faut protéger contre eux-mêmes.

Le problème est que la Loire au Hangar, c’est tout ou rien. Soit on est haut au-dessus, soit on est dedans. Les quais du port ont été construits pour les besoins des vaisseaux de haut bord, pas pour le plaisir des promeneurs ou des consommateurs assis à la terrasse du Ferrailleur.

Il n’y a pas tant d’endroits dans Nantes où l’on puisse toucher la Loire du doigt. Sans la possibilité d’un contact charnel, le fleuve garde quelque chose de théorique. C’est un élément de décor.

Crue de la Loire, 31 décembre 2009

Même là où le contact était possible, on s’en est privé. On a conservé le site des chantiers, fort bien. Mais on a condamné les cales, dont la vocation était quand même d’entrer dans l’eau. Seule la passerelle ménagée sous le pont Anne de Bretagne et l’allée qui la prolonge permettent, quand la crue ou la marée le veulent bien, de tremper un orteil.

Tant que la Loire restera exclue de l’île de Nantes, le site ne contribuera pas à réconcilier les Nantais et leur fleuve.

03 décembre 2010

Changement de bord ?

Le futur pont transbordeur de Nantes est certainement flatté de l’intérêt nouveau que lui porte Jean Blaise, comme le rapporte Éric Cabanas dans Presse Océan.

Pourtant, contrairement à Estuaire 2007/2009/2011-2012, ça n’est pas « un vrai projet de gauche ». Ses créateurs, membres de l’association Les Transbordés, se proclament apolitiques. Surtout, dans ce projet-là, il y a de la haute technologie, de l’industrie lourde, des alliances avec de grandes entreprises, des calculs de rentabilité…

L’idée de base a toujours été dans l’air. Mais depuis près de trente ans qu’il est arrivé à Nantes, jamais Jean Blaise n’y avait paru sensible. Les Transbordés ont dévoilé leur projet Jules Verne il y a cinq mois sans éveiller de réaction. Alors, pourquoi maintenant ?

On est tenté d’y voir une retombée de la réunion organisée à Nantes par l’association le 18 novembre. Un grand succès : salle comble, orateurs convaincants, public conquis. De quoi faire du buzz dans les dîners en ville. Jean Blaise a toujours su de quel côté soufflait le vent.

Si les édiles nantais s’intéressaient au projet, serait-ce vraiment une bonne nouvelle ? Sous la férule de Jean-Marc Ayrault, tout projet un peu consistant réclame des décennies. Ainsi, la création du Mémorial a été décidée en 1998. L’enthousiasme d’Yves Lainé, président des Transbordés, et la science de Paul Poirier, architecte du projet, l’emporteraient-ils sur les pesanteurs politico-administratives ? On l’a vu avec le hangar à bananes ou la barge Flahault, les projets privés sont menés plus rondement.

L’enjeu dépasse le pont lui-même. Sur leur site web exemplaire, les Transbordés proposent une vision dynamique du fleuve dans la ville. Rien à voir avec l’attitude de poule qui a trouvé un couteau observée par la ville depuis vingt ans. On le verra ici même dans les jours à venir avec un triptyque ligérien :

01 décembre 2010

Le Voyage à Nantes : pas gagné d’avance

Après-demain, Jean-Louis Jossic défendra devant le conseil municipal de Nantes un dossier qui sera sûrement le plus lourd de la séance : le changement de nom de Nantes Culture et Patrimoine. La société gestionnaire du Château des Ducs et des Machines de l’île devrait désormais s’appeler Le Voyage à Nantes.

Ce changement de nom est la première réalisation de Jean Blaise en tant que grand sachem du tourisme local. Voilà du lourd ! Et du bien choisi pour attirer le pérégrin. Le Voyage à Nantes, ça fait forcément culturel.

Cela rappelle Le Voyage à Paimpol, de Dorothée Letessier, escapade manquée d’une Briochine frustrée qui déclare : « Je ne sais plus quoi faire. Je m’ennuie. Je m’emmerde ». Ou Le Voyage à Deauville, court métrage glauque de Jacques Duron, où l’un des garçons voudrait bien mais l’autre préfère les filles, quoique, si le premier y met le prix… Ou encore Le Voyage à Bordeaux, de Yoko Tawada, que Les Inrockuptibles résumait ainsi* : « Il se passe à peine quelques heures entre le point de départ du Voyage à Bordeaux, avec l’arrivée de Yuna dans cette ville, et la fin, où elle se fait voler son dictionnaire allemand-français à la piscine. Entre-temps, que se sera-t-il passé ? Quasi rien. »

On n’ose penser que Jean Blaise ait plutôt eu en tête Le Voyage à Lilliput, de Jonathan Swift, que Gulliver aurait mieux fait d’éviter – mais n’allons pas déclencher une querelle entre Gros-blaisiens et Petits-blaisiens. Le Voyage à Biarritz serait plus indiqué puisque l’auteur de la pièce, Jean Sarment, est né à Nantes. Hélas ! ce voyage là n’est qu’une chimère dans la tête de Guillaume Dodut, chef de gare à Puget-sur-Var (il est dodut le chef de gare, ah ! ah ! ah !). Pas moins chimérique est Le Voyage à Reims, opéra de Rossini dont les protagonistes ne verront pas la Champagne, coincés qu’ils sont à l’Hôtel du Lys d’or de Plombières-les-Bains.

Mais le pire serait encore que Jean Blaise ait songé au Voyage à Cythère,
           un pays fameux dans les chansons,
Eldorado banal de tous les vieux garçons,
dont Baudelaire a révélé la désolante vérité : « une île triste et noire », « un terrain des plus maigres, Un désert rocailleux troublé par des cris aigres ». Et où les faux-semblants ne manquent pas :
J'entrevoyais pourtant un objet singulier !
Ce n'était pas un temple aux ombres bocagères,
Où la jeune prêtresse, amoureuse des fleurs,
Allait, le corps brûlé de secrètes chaleurs,
Entre-bâillant sa robe aux brises passagères ;
Mais voilà qu'en rasant la côte d'assez près
Pour troubler les oiseaux avec nos voiles blanches,
Nous vîmes que c'était un gibet à trois branches,
Du ciel se détachant en noir, comme un cyprès.
Se pourrait-il que Baudelaire, confondant Cythère et l’île de Nantes, ait rasé la côte face au palais de justice de Jean Nouvel ?
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* Raphaëlle Leyris, Les Inrockuptibles n°728, 11 novembre 2009

29 novembre 2010

Nantes, c'est loin, vu de Guadalajara

Les Mexicains ont payé des millions pour avoir Royal de Luxe ? Peu importe, après tout, l’essentiel n’est-il pas que la gloire de Nantes (et de son maire) s’étende jusqu'aux Amériques ? Car si Nantes rémunère la troupe de Jean-Luc Courcoult, c’est en principe pour s'acheter une stature culturelle internationale.

Hélas, les retombées dans la presse mexicaine ne sont pas à la hauteur des géants. D'abord, elles sont à peine plus nombreuses que dans la presse française. Mais surtout, si elles ont bien relayé la communication de Royal de Luxe en détaillant le scénario du spectacle, c’était en présentant la troupe simplement comme une empresa francesa. Le nom de Nantes n’a presque jamais été prononcé.

De toute façon, la manifestation ne paraît pas avoir passionné les Mexicains, qui ont sans doute d’autres chats à fouetter. Google Trends ne révèle aucune augmentation significative des recherches sur « Royal de Luxe ». Les requêtes en langue espagnole, peu nombreuses, viennent moins du Mexique que du Chili, visité par la troupe en début d'année. La foule était davantage « emplie de bonheur » que de curiosité.

28 novembre 2010

Encore plus luxueux au Mexique qu'à Nantes

Vingt-quatre degrés à l’ombre : il faisait meilleur à Guadalajara qu’à Nantes ce dimanche. Loin des frimas, Jean-Marc Ayrault visitait la Perla del Occidente pour assister à la clôture des six jours de spectacle qu’y donnait (façon de parler, on le verra plus bas) Royal de Luxe. « De tous les spectacles organisés au Mexique à l'occasion du bicentenaire de l'indépendance et du centenaire de la révolution, c'est de très loin le record de popularité, beaucoup de gens disent merci et la foule immense est emplie de bonheur », a-t-il déclaré, selon Presse Océan.

Allons bon, voilà que le maire de Nantes se met à parler comme Pierre Orefice ! Est-ce une garantie d’objectivité ? Regardons-y de plus près.

D'après le compte rendu d’Impreso – par ailleurs louangeur quant au spectacle lui-même – les spectateurs n’étaient que 8.000 samedi. Soit 0,2 % des habitants de cette agglomération de plus de 4 millions d’habitants.  En revanche, selon El Sol de Mexico, le spectacle de dimanche aurait été vu par 500.000 personnes ; le comptage des manifestants n'est pas une science plus exacte au Mexique qu'en France. Les photos mises en ligne sur Flickr donnent tout de même l'impression que la foule immense emplie de bonheur était plutôt clairsemée.

Le spectacle des géants de Royal de Luxe avait été délocalisé à Guadalajara, deuxième ville du Mexique, parce que Mexico n’en voulait pas. Par crainte des embouteillages, paraît-il. Guadalajara n’y a pas échappé : la fermeture des rues du centre ville a provoqué d'immenses encombrements. Mais ce qui fait tache est en réalité le coût exorbitant du spectacle, révélé par le site d’informations La Silla Rota : 88.667.360 pesos hors taxes, soit l’équivalent de 5.354.637 euros, versés à Royal de Luxe par l’organisme officiel chargé des célébrations du bicentenaire*.

Selon La Silla Rota, cette addition phénoménale s’expliquerait principalement par la prise en charge de 3.000 nuits d’hôtel et 35.000 repas pour les 130 collaborateurs de Royal de Luxe et le transport de 30 tonnes de matériel de Nantes à Veracruz.
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*  « A Royal de Luxe, quien organizó al aire el espectáculo al aire libre marionetas gigantes en Guadalajara, se le pagaron 88 millones 667 mil 360 pesos descontando el IVA, por medio de Turissste. »

Bouchons publics

Tout débat sur la circulation à Nantes appelle une foultitude de commentaires. Celui lancé par Presse Océan ces jours-ci n'a pas fait exception. Il est clair que, sur ce plan, le bilan de vingt ans de municipalité de Jean-Marc Ayrault n'est pas brillant. Il faut dire que la fonction publique n'a pas aidé.

L'évaluation du Plan de déplacements urbains 2008-2010 de Nantes Métropole est avant tout un exercice d’auto-célébration, mais on y lit quand même des choses intéressantes. Par exemple ceci : « Quand le stationnement est contraint, sur le lieu de travail, 67 % des salariés utilisent un mode de transport alternatif à la voiture. Quand le stationnement est facile, ils ne sont plus que 32 %. »

Traduction : les employeurs qui offrent un parking à leurs salariés aggravent les difficultés de circulation en mettant dans les rues un nombre de voitures supplémentaires égal à 35 % de leur effectif (67 % - 32 %).

Des noms ! Des noms ! Des noms ? Eh ! bien, pour le centre-ville, Nantes Métropole, la ville de Nantes, la préfecture de Loire-Atlantique, le département, le centre des impôts, le CHU, le rectorat, le palais de justice, etc. (tous pourtant situés à proximité immédiate d’une ligne de tramway). Bref, à en croire Nantes Métropole, l'un des principaux facteurs d'aggravation des bouchons pourrait bien être la forte augmentation du nombre de fonctionnaires ayant accès à un parking dans Nantes depuis vingt ans !

11 novembre 2010

Un cœur tendre, qui hait le néon maigre et bleu

Sale temps cet après-midi ! Sur l’île de Nantes, les palmiers déplumés du Jardin des voyages dégoulinent lamentablement. L’Éléphant se tient rencoigné au plus sombre des Nefs pour échapper aux rafales et subir quelque réparation. On se hâte sous les parapluies. Seule De temps en temps, l’œuvre lumineuse de François Morellet, délivre un message d’espoir : elle annonce un temps simplement nuageux.
 
Peut-être était-ce seulement un court-circuit ou un bug dans le système de contrôle ? Quelques instants plus tard, la météo reprend ses droits : les néons se sont remis à la pluie. Et tant pis pour qui, passant par là au mauvais moment, aura cru pouvoir sortir sans riflard.
Mais apparaît alors une autre limite de l’œuvre. Pour l’Angevin Morellet, sans doute, la pluie, c’est la pluie. Pour nous Bretons, il existe au moins une demi-douzaine de pluies différentes. Les quelques rayures bleues affichées par De temps en temps représentent bien mal les cataractes d’aujourd’hui. Et guère mieux le crachin d’autres fois.

Quant au vent, dimension essentielle de nos climats, la façade d’Harmonie Atlantique l’ignore totalement. Ce n’est pas pour rien qu’on qualifie Morellet d’artiste « minimaliste ».

Machines de l'île : un déficit pérennisé

« Peut-être que le Manège des mondes marins tournera mieux avec 10 millions d’euros au lieu de 6,4 ? », conjecture un lecteur de ce blog au vu du précédent billet.

Peut-être… Toujours est-il que Nantes Métropole n’y croit guère.

Avant l’ouverture des Machines de l’île, la communauté urbaine avait voté 800.000 euros de subventions d’exploitation, dont 500.000 euros pour la première année. Les Machines devaient « tendre vers l’équilibre » à partir de 2009. On sait ce qu’il en advint : il a fallu allonger la sauce pour éviter la cessation de paiement.

Les choses vont-elles aller en s’améliorant ? Elles n'en prennent pas le chemin. En renouvelant cette année jusqu’en 2025 (!) la délégation de service public accordée à Nantes Culture et Patrimoine, Nantes Métropole a prévu de lui verser une subvention annuelle définie « en fonction du déficit estimé dans le compte d’exploitation prévisionnel ». Cet équipement qui aurait dû rapporter de l’argent va donc continuer à en coûter.

Et même de plus en plus : pour 2011, la subvention s’élève à 1.100.000 euros. C’est-à-dire que chaque visiteur des Machines sera subventionné par les contribuables de l’agglomération nantaise à hauteur de 3 ou 4 euros. Merci qui ?

10 novembre 2010

Les cordons de la bourse mieux tenus à Paris qu’à Nantes

Jean-Marc Ayrault prône la rigueur financière. Selon le blog Bluetouff (http://bluetouff.com/2010/11/10/hadopi-ayrault/), il a adressé hier au nom de son groupe parlementaire un courrier virulent à la présidente de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI). Entre autres rouspétances, il s’offusque du dérapage budgétaire de celle-ci : « 12 millions d’euros ont été demandés pour le fonctionnement de la HADOPI dans le projet de loi de finances pour 2011 alors que, lors des débats parlementaires, c’est un budget de 6,7 millions d’euros qui avait été annoncé ».

Le président du groupe socialiste pourrait donner des leçons à celui de Nantes Métropole. Le conseil de la communauté urbaine a voté en juin dernier un budget de 10 millions d’euros pour la réalisation du Manège des mondes marins « alors que lors des débats communautaires*, c’est un budget de 6,4 millions d’euros qui avait été annoncé » !

Nantes Métropole a aussi voté un budget de 6,9 millions d’euros pour un Mémorial à l’abolition de l’esclavage dont le coût annoncé était de 4,2 millions en 2005 et 100.000 euros quand la décision a été prise, en 1998.
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* Pas seulement un débat, d’ailleurs : le montant de 6,4 millions d’euros avait été acté par un vote de Nantes Métropole le 26 octobre 2007.

09 novembre 2010

Coup de chaud sur la palette

En fait de détritus, la Villa Déchets en construction sur l’île de Nantes utilise surtout des palettes en bois, moins difficiles à recycler que des couches-culottes usagées. Il lui en faut 800. « La palette est l’une des inventions majeures du 20ème siècle car elle a révolutionné la manutention des produits », affirmait déjà Jean de Vulliod, le gourou mondial de la palette fondateur de la place de marché Planetpal.net. Va-t-elle aussi révolutionner l’architecture au 21ème siècle ?

Et ce n’est pas tout : la palette joue aussi un rôle dans… la formation professionnelle des pompiers. Le service départemental d’incendie et de secours de Loire-Atlantique (SDIS 44) vient de lancer un appel d’offres pour des fournitures de bois à brûler, comprenant des panneaux d’aggloméré et des palettes. Décidément, le marché local de la palette risque la surchauffe.

06 novembre 2010

L’Éléphant écrase les chiffres, une fois de plus

Dès qu’il est question des Machines de l’île, on dirait que les calculettes tombent en panne. « L’Éléphant fait complet quasiment tous les jours de l’année », assure ce matin Presse Océan.

Que disent les chiffres ?  L’Éléphant a transporté 55.000 passagers en 2009. Si vraiment il « faisait complet », à raison d’environ 1.750 trajets par an, il en aurait transporté au moins 85.000, soit 54,5 % de plus !

Le problème de l’éléphant, c’est sa totale absence de flexibilité à l’égard de son marché. Qu’il y ait foule ou non, il ne peut transporter que quarante-neuf passagers à la fois. Tantôt il manque des ventes, tantôt il circule quasiment à vide, avec des frais de personnel et de fonctionnement pourtant identiques.

Tout n’est pas perdu : une partie des visiteurs qui n’ont pu accéder à l’Éléphant achètent quand même un billet pour la galerie des machines. Reste à savoir combien de fois on peut leur faire le coup avant qu’ils ne se lassent.

Les Machines ne manquent pas de qualités esthétiques. C’est leur concept qui est mauvais. Pour un « équipement touristique structurant », leur yield management est consternant. Leur problème commercial découle en grande partie d’une faiblesse technique de l’Éléphant. Dans le projet initialement présenté, il devait faire le trajet des Nefs à la grue Titan et retour à raison de 30 minutes par tournée. Dans la réalité, il lui faut près de trois quarts d’heure pour accomplir le parcours dans un seul sens. Résultat : un tiers de passagers en moins dans les périodes où il affiche complet.

Nantes Métropole, qui avait sans doute mal bordé son contrat, s’est laissé refiler un tacot, payé au prix fort et qui continue à consommer des subventions publiques alors qu'il aurait dû être bénéficiaire. Heureusement que sa communication est plus efficace que sa tringlerie.

25 octobre 2010

Lueurs étranges à Nantes

Comme en février (http://lameformeduneville.blogspot.com/2010/02/quelques-minutes-par-jour-le.html), le nouvel immeuble administratif du département de Loire-Atlantique bénéficie au crépuscule d'un éclairage quasi surnaturel. Un phénomène imprévu qui mérite un coup d'oeil.

21 septembre 2010

Le Manège des mondes marins ralentit déjà

Le grand éléphant, on l’a dit hier, est une fois de plus arrêté pour réparations. « La machine est fiable », assure néanmoins Pierre Orefice à Stéphane Pajot, qui reproduit sans rire cette déclaration dans Presse Océan (21 septembre 2010). « Seuls treize voyages sur cinq cents ont été annulés », précise le patron des Nefs, oubliant de signaler que l’arrêt en cours entraîne à lui seul l’annulation de dix-huit voyages supplémentaires !


À ce train-là, avancer avant la fin septembre un chiffre de fréquentation global pour l’année est un exercice aléatoire. Pierre Orefice s’y livre quand même : « nous atteindrons 280.000 visiteurs, soit 20.000 de plus qu’en 2009 », annonce-t-il. Le gain ne serait en réalité que de 18.550 voyageurs par rapport aux 261.450 de 2009, mais cela représenterait quand même une progression de 7 % d'une année sur l'autre. Pas mal… si ce n’est que les Machines affichaient une hausse de 32,5 % au premier trimestre et de 20 % à la mi-juin (http://lameformeduneville.blogspot.com/2010/06/du-mou-dans-la-hausse.html). L’été n’a donc pas été bien fameux.

Ce que confirme le nombre des visiteurs étrangers, 10.000 sur la période estivale, indique Pierre Orefice. Ce chiffre est à rapprocher de celui livré par le même à Philippe Gambert (Ouest France, 15 juin 2010) pour 2009 : 26.000 étrangers, soit près de 10 % des visiteurs*. Comme la fréquentation estivale représente plus de la moitié de l’activité des Machines, cela signifie soit que le nombre total de visiteurs a baissé cet été, soit que la proportion des visiteurs étrangers est en chute libre.

Mais le pire reste à venir. Comment la fréquentation évoluera-t-elle après la mise en service du Manège des mondes marins en 2012 ? « On mise sur plus de 400.000 visiteurs », dit Pierre Orefice à Stéphane Pajot. Au début de l'été, il déclarait pourtant : « Nous visons 500.000 visiteurs pour 2013, première année d’exploitation » (Ouest France du 22 juin 2010, propos recueillis par Daniel Morvan). Le vote de Nantes Métropole en faveur de la réalisation du Manège a été obtenu sur cet objectif du demi-million de visiteurs. Ainsi, avant même la pose de la première pierre, la fréquentation a déjà chuté de 20 % en moins de trois mois !
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* La fiabilité de ce chiffre est cependant douteuse. Selon le rapport annuel 2009 de Nantes Métropole, « la part de touristes étrangers atteint (…) 6 % de la fréquentation annuelle, dont 10 % pendant l’été », ce qui ferait en réalité moins de 16.000 étrangers sur l’année et non 26.000.

20 septembre 2010

L'éléphant, un problème pour l'image de Nantes ?

En définitive, l'arrêt pour maintenance observé par l'éléphant de l'île de Nantes le 7 septembre n'était peut-être pas un congé-maladie de complaisance. Les Machines de l'île annoncent l'annulation de tous les voyages de l'animal jusqu'à jeudi.

Après son « check-up total » du mois de janvier, son « arrêt technique » du mois de juin et sa « maintenance » d’il y a moins de quinze jours, sans parler des réparations lourdes de l'an dernier, voilà la machine à nouveau hors service. On dirait qu'elle se porte vraiment mal.

Si ce n'était que le prétexte d'un nouveau ricanement de la part de ce blog, ce ne serait pas grave. Mais la municipalité de Jean-Marc Ayrault a tant misé sur cet équipement touristique « structurant » pour façonner l'image de Nantes que son manque de fiabilité aura fatalement des répercussions négatives.

14 septembre 2010

Navibus, Pédibus, détritus

Les rives de l’Erdre s’enorgueillissent de charmants édicules, les abribus du Navibus, installés à grands frais par Nantes Métropole quelques mois avant l'abandon de la desserte fluviale. Depuis lors, ils n’ont plus d’utilité.

Ce qui devait arriver est arrivé : l’une de ces frêles constructions a été vandalisée. Problème : faut-il la réparer ou la supprimer ? Voilà un dilemme intéressant pour la communauté urbaine.

Puisque de toute façon ces abris ne servent plus à rien, c’est un choix entre deux gâchis. La seule certitude est que les choses ne peuvent rester en l’état : juste devant l’hôtel du département, ça fait désordre.

Parions que les abribus erdriques seront conservés, en témoignage de la prévoyance intercommunale – une prévoyance d’autant plus admirable qu’elle n’a pas servi à grand chose. Les restes du Navibus feront ainsi pendant à ceux du Pédibus, un succès encore plus remarquable : installés juste avant la suppression du service, la plupart de ces totems sont restés totalement inemployés.

07 septembre 2010

L'éléphant ? Il se maintient...

La loi n’a pas prévu de service minimum pour le grand éléphant de l’île de Nantes. Allait-il faire grève ce mardi 7 septembre ? Difficile pour cet engin emblématique d'une communauté urbaine socialiste de travailler un jour de grande manif'. D'un autre côté, faire grève signifie une journée de salaire perdue... Fort heureusement, la santé médiocre de l'animal a fourni une solution qui met tout le monde d’accord : une fois de plus, il doit faire l’objet d’une « maintenance » imprévue. Ce n'est pas une grève, juste un congé maladie qui tombe à pic.

02 septembre 2010

La disparition des abeilles sur l'île de Nantes

La Fête de l’abeille prévue du 10 au 12 septembre est encore annoncée à cette heure sur le site de la mairie de Nantes (www.nantes.fr/decouverte/actualites-decouverte/2010/fete_abeille) mais, apprend-on par ailleurs, elle est annulée.

Sur les raisons de l’annulation, l’Union des apiculteurs de Loire-Atlantique n’est pas très diserte. « Par manque de moyens humains et techniques, l'équipe de l'UNAPLA n'est plus en mesure d'assurer un tel événement », indique-t-elle seulement. Comme si la mairie de Nantes n'avait pas tous les moyens humains et techniques nécessaires pour organiser les événements qui ont l'heur de lui convenir !

Bien sûr, c’était trop beau : pour une fois qu’un événement utile et intéressant devait avoir lieu sous les Nefs de l’île de Nantes…

22 août 2010

Des éco-détails qui clochent

Non, on n’a pas tout dit sur De temps en temps.

À une époque où l’on se demande comment réduire la consommation électrique des éclairages publics, l'oeuvre de François Morellet va exactement dans le mauvais sens. Son message météorologique est peut-être correct, son message écologique ne l’est sûrement pas.

Il en va de même des anneaux de Buren. Alors que Nantes se voudrait l’une des métropoles les plus écolos d’Europe, les « oeuvres pérennes » d'Estuaire lui tirent une petite balle dans le pied.

Quant aux Machines de l'île, leur bilan écologique n’est probablement pas glorieux. De l’éléphant, on regarde plutôt la trompe que le pot d’échappement, bien sûr. Daniel Cohn-Bendit, Eva Joly et les autres ne l'ont sans doute pas remarqué l'autre jour en visitant le site, mais sa fumée noire est spécialement antipathique.

Ni l’électrophagie d’Estuaire ni les flatulences de l’éléphant ne pèsent lourd dans le bilan écologique global de la ville. Pourtant, vu l'importance symbolique que leur attache la municipalité actuelle, elles relativisent les prétentions vertes d'icelle. Le diable est dans les détails et pas seulement à Notre-Dame-des-Landes.

20 août 2010

Harmonie Atlantique du soir

On ne peut parler de l’immeuble d’Harmonie Atlantique (http://lameformeduneville.blogspot.com/2010/08/les-disgraces-du-quai.html), me dit-on, sans évoquer aussi De temps en temps, l’œuvre artistico-météorologique de François Morellet. Soit, vous l’aurez voulu.

De temps en temps est une cerise manquée sur ce gâteau manqué. Tentant sans doute de faire oublier la raide horizontalité du bâtiment, elle donne dans le courbe et l’oblique, mais la masse de l'immeuble domine ses lignes graciles. Ses trois couleurs, bleu, blanc et rouge, seraient-elles aussi destinées à faire oublier l’anthracite et le verdâtre du support ? Vu le résultat, on n’ose le croire...

Il est vrai que la nuit venant, quand les sons et les parfums tournent dans l’air du soir, la lumière peut s’exprimer indépendamment du bâtiment. Et là, on a beau savoir que François Morellet est un artiste minimaliste, on a l’impression qu’il manque quelque chose. Ça n’est pas Time Square, dame non !

Néon grillé

François Morellet manie les tubes au néon depuis pas loin d’un demi-siècle. Pendant ce temps-là, le monde a évolué. Beaucoup des bâtiments les plus en vue – et le siège d’Harmonie Atlantique en est un – servent de support à des enseignes lumineuses géantes. En 2010, du néon sur un toit, non seulement ça n’épate plus personne, mais on attend que ça flashe, que ça pulse, que ça bouge. Devant les quelques lueurs statiques d’Harmonie Atlantique, on se dit fatalement : « Tiens, il y a des tubes qui ont claqué ».

« Rustre ! Béotien ! Pedzouille ! c’est de l’Art, pas de la pub ! » entonne aussitôt le chœur des bobos indignés. Ainsi, parce que le néon est payé par le contribuable et non par le consommateur, il faudrait par principe se pâmer d’admiration ? Du bobo au gogo, le chemin n’est pas long.

Un, deux, trois, nuages

Hélas, Morellet lui-même a savonné la planche de ses thuriféraires en relativisant le statut artistique de sa composition. De temps en temps est « quelque chose qui sera utile » déclarait-il naguère à Guillaume Lecaplain*. Il s’agit en réalité d’un indicateur météorologique avec trois messages au choix, et trois seulement : « il va faire beau », « il va y avoir des nuages » ou « il va pleuvoir », selon qu’on voit un arc de cercle rouge, des arcs de cercle blancs ou des segments de droite obliques bleus, symbolisant respectivement le soleil, les nuages et la pluie. Voilà de l'utile en effet.

Franchement, à une époque où la moindre enseigne de pharmacie donne la date, l’heure et la température ambiante, qui cela peut-il émouvoir de savoir grosso modo quel temps il va faire en consultant la façade d'une mutuelle ? Et, à une époque où l’on trouve des bulletins météo partout, dans le journal, à la radio ou sur internet, qui fera le détour par l’île de Nantes pour savoir que, dans quatre heures**, le temps devrait être nuageux ?
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* Presse Océan, 1er mars 2010.
** « Une œuvre à découvrir à la tombée de la nuit ! » conseille la mairie de Nantes (http://nantes.fr/culture/actualites-culturelles/estuaire-les-oeuvres-perennes/morellet). Les Nantais auront ainsi le privilège de savoir si le soleil brillera au milieu de la nuit.

19 août 2010

Les disgrâces du quai

La réhabilitation de l’immeuble d’Harmonie Atlantique, ex Mutuelle Atlantique, au coin du pont Anne de Bretagne, ne sera achevée que dans plusieurs mois*. Mais on peut déjà se faire une idée du résultat final. Il n’est que trop évident : d’une mocheté du 20ème siècle, on aura fait une mocheté du 21ème siècle. D’une verrue simple, on aura fait une verrue tarabiscotée.


On imagine bien l'intention : il s'agissait d'enfermer le vieux bâtiment miteux sous un sarcophage plus présentable. Peine perdue : la laideur irradie. Les vitrages sérigraphiés amélioreront peut-être le confort des occupants. Mais vue du dehors, la nouvelle façade est sans grâce et sans unité. On voit trop que l’empilement d’accessoires relève du camouflage. Comme dans un film de Lautner, la fausse barbe dénonce plus qu’elle ne dissimule.

« Cet immeuble, il y a quelques années, j’étais partisan de sa démolition », a un jour avoué Alexandre Chemetoff à la revue Place publique (n° 4). « J’ai mis du temps à l’accepter, à l’adopter. Maintenant, on va l’aider à être beau. » Que ne s’en est-il tenu à sa première idée ! Mais c’est la logique du plan-guide : quand les événements vous échappent, feignez de les organiser.

Des ratages architecturaux, on en a vu d’autres. Le problème est qu’avec une façade tournée vers les Chantiers et une autre vers le Mémorial de l'esclavage, ce bâtiment tartignole sera l’élément architectural le plus en vue du tourisme façon Blaise.

Les héritiers de François Mitterrand avaient déjà réussi à réunir sur le quai auquel ils ont donné son nom « l’école d’architecture la plus moche d’Europe »** et le palais de justice le plus lugubre de France. Le siège d’Harmonie Atlantique revu et corrigé ne joue sans doute pas dans la même catégorie, mais il complète bien le tableau.
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* Le site officiel de l’île de Nantes annonce toujours une livraison en mars 2010, mais la Lettre d’information de la Samoa indique mars 2011.
** Dixit Emmanuel Guimard (www.vudenantes.com/2010/02/big-sky.html)

17 août 2010

À la recherche du % perdu

« L’éléphant de l’île attire toujours plus de monde (…) Le site engrange 10 % de visiteurs supplémentaires chaque année », lit-on p. 11 de Presse Océan ce 17 août sous la signature de J.U. « Pour le grand éléphant le nombre est stable car la capacité maximale du pachyderme est souvent atteinte », et la hausse de la fréquentation totale est de 1 % écrit de son côté, p. 8, Philippe Corbou, qui évoque aussi une « progression de plus de 20 % entre 2008 et 2009 ». Alors, plus de monde ou autant pour l’éléphant ? 1 %, 10 % ou 20 % de hausse pour les Machines de l’île de Nantes ?

Décidément, les chiffres font partie du volet fantastique des Machines… Rappelons que loin de gagner 10 % de visiteurs supplémentaires « chaque année », les Machines en avaient perdu 35 % entre l’été 2007 et l’été 2008. Elles n’en ont récupéré qu’une partie en 2009 avec une hausse de 7,6 % (265.000 contre 243.000) et non de 20 % par rapport à 2008.

Alors, ce gain de 10 % pour 2010 est-il envisageable ? L’année n’est pas finie. Cependant, au vu du chiffre publié pour juillet, soit 41.354 visiteurs, la prudence s’impose. Ce serait 1 % de plus qu’en 2009. Mais c’est encore 20 % de moins qu’en juillet 2007. Et cela malgré l’augmentation de la capacité d’accueil des Machines, qui parviennent à vendre plus de 2.500 billets les bons jours alors qu’elles étaient limitées à 2.200 visiteurs quotidiens en 2007.

16 août 2010

Manny se protège contre le soleil du Nord

Les parois métalliques sont devenues très tendance dans l'immobilier nantais ces dernières années. Ce ne sont pas des nouveautés : revêtus d’alu, de titane ou d’inox, l’Institut du monde arabe de Paris (1987), le Guggenheim de Bilbao (1997) voire l’usine Aplix du Cellier (1999) avaient depuis longtemps montré la voie.

Manny, l’immeuble du groupe Coupechoux, sur l’île de Nantes, est sûrement le témoin le plus remarquable de cette mode. « Sa façade hyper sophistiquée sert de filtre solaire », explique le site web de la ville de Nantes (http://www.nantes.fr/culture/actualites-culturelles/estuaire-les-oeuvres-perennes). Comme nul visiteur ne se hasarde dans le boyau antipathique qu’est le mail du Front populaire, si l’on parle façade de Manny, on songe à son adresse officielle, rue La Nouë Bras-de-fer, face au palais de justice. Elle est orientée plein Nord. Mais qu'importe, les soleils imaginaires ne sont pas les moins brûlants.

Et pour filtrer, elles filtrent, les lames d’aluminium* perforées de Manny. Au point que même en plein après-midi du mois d’août, y compris côté sud, les éclairages intérieurs sont généreusement allumés.


* Le choix de l’alu, métal terne et grisâtre, n’est peut-être pas très judicieux. Cet immeuble ne va « pas nuire à la réputation de Nantes la grise », comme l’écrivait Yves Pérennou dans le blog « Vu de Nantes »  (http://www.vudenantes.com/2009/12/la-fourrure-alu-de-limmeuble-coupechoux.html)

09 août 2010

Feiz ha Blaise

Au nom de la laïcité, la municipalité nantaise a refusé que les pèlerins du Tro-Breiz pénètrent bannières en tête dans le château de Nantes. La laïcité a bon dos. De toute évidence, ce n'est pas tant le catho qui gène que le Breton. Comme l'écrit Hervé Le Quéré, du Parti Breton :
Au-delà de l'aspect religieux, ce maire refuse avec acharnement tout signe de bretonnité et milite ardemment contre la réunification de la Bretagne, contre la langue et la culture bretonne, contre l'histoire de Bretagne qui reste absente des boutiques de cet « équipement municipal » qu'est devenu notre château...
Ce refus d'une Bretagne autre que touristique et utilitaire n'est probablement pas le reflet d'un simple intérêt électoraliste, encore moins celui d'un esprit de conquête angevin chez un natif de Maulévrier, mais plutôt d'une idéologie table-rasante. Complètement ruinée dans la réalité, celle-ci  reste tapie au fond d'esprits « fidèles aux idéaux de leurs vingt ans »... c'est-à-dire sclérosés depuis plus de quarante ans.

Le château en témoigne. Tel qu'il a été aménagé, son musée n'est pas une concession à la Bretagne mais au contraire un pan d'une oeuvre plus générale de destruction systématique (http://lameformeduneville.blogspot.com/2009/02/un-chateau-propagandiste-1-nantes-et-la.html). Redisons-le :
« Nantes en Bretagne », est-ce un thème de débat ? Pas pour ceux qui répondent « oui » ! Le débat est créé de toutes pièces par le camp d’en face, celui qui, par intérêt, pour se ranger du côté du manche ou par haine du passé et des identités populaires, voudrait qu’il y ait doute. Le musée donne à voir une version subtile de cette démarche de fausse impartialité. D’abord, son organisation permet de saucissonner l’essence de Nantes, comme si la ville d’hier n’était pas celle d’aujourd’hui, qui n'est pas celle de demain : du passé faisons table rase, morceau par morceau à défaut de Grand Soir. La salle n° 2 fait de Nantes « la cité des ducs de Bretagne », mais dès la salle n° 3 c’est « une ville du royaume de France », puis ce sera « une capitale négrière » (deux salles : le double de la « cité des ducs » !), « la ville des négociants », « la métropole d’aujourd’hui », etc.
Cela dit, la minceur des réalisations de Jean-Marc Ayrault en vingt ans de mandat ne lui vaudra pas une salle dans le musée -- tout au plus un débarras. L'histoire se venge de ceux qui l'ignorent.

04 août 2010

Un été pas très chaud pour les Machines

En 2009, les Machines de l’île ont vendu 260.000 billets. « En 2010, on dépassera vraisemblablement ce niveau », a confié Pierre Orefice à Philippe Gambert (Ouest-France du 4 août). Vraisemblablement… Pierre Orefice ne nous avait pas habitués à des adverbes aussi retenus.

Cette modestie n’est « vraisemblablement » pas bon signe. En avril, Pierre Orefice affirmait que la fréquentation du premier trimestre était en hausse de 32,5 % en 2010 par rapport à celle de 2009. À la mi-juin (http://lameformeduneville.blogspot.com/2010/06/du-mou-dans-la-hausse.html), il assurait que la fréquentation était « déjà » en progrès de 20 % depuis le début de l’année, ce qui signalait en réalité une nette inflexion vers le bas.

Aujourd’hui, puisque la saison est à moitié écoulée, les Machines doivent avoir une certaine idée de leur fréquentation estivale. Or, malgré la progression engrangée au premier semestre, l’évolution totale prévue pour 2010 n'est que « vraisemblablement » supérieure à 0 %. L’été 2010 est donc en recul sur l’été 2009.

Si l’éléphant joue toujours à guichets fermés, il semble clair que la Galerie des machines souffre. Difficile à vérifier : depuis quelque temps, l’afficheur lumineux de la billeterie des Machines n'indique plus son niveau de remplissage. Tiens, pourquoi ?

Le manège d’Andréa, en revanche, ne désemplit pas. Merci pour lui.

02 août 2010

Des fantômes sous les ponts

Presse Océan a publié le 1er août, sous la signature de Baptiste Duclos, une carte des fantômes et autres personnages virtuels du fameux Invader présents sur les murs de Nantes (voir http://lameformeduneville.blogspot.com/2010/04/nantes-victime-des-ghostbusters.html). Elle semble assez complète. Cependant, elle oublie les deux fantômes les plus acrobatiques : celui du pont Anne de Bretagne


et celui de la passerelle Victor Schoelcher

01 août 2010

Le lion herbivore

D'accord, ça n'est pas le plus gros des lions de Nantes, ça n'est pas le plus beau, ça n'est pas le plus visible, mais c'est sûrement l'un des plus sympathiques : le lion herbivore qui accueille les visiteurs de Ti Keltiek, rue Harrouys.

31 juillet 2010

Nantes, ville des lions

L’éléphant tend à écraser de sa masse le bestiaire nantais. Pourtant, ce n’est pas lui l’animal emblématique de la ville. L’animal le plus répandu dans nos rues, c’est de loin le lion. Déjà, dans la cour d’honneur de la mairie, on en compte une quinzaine en totalisant lions entiers et demi-lions. Six par colonne Morris : ça fait du monde. Seize d'un coup rue de l'Héronnière, sans compter ceux de la grille. Vingt-quatre même rue Contrescarpe – mais il est vrai que ces lions-là sont des mutants, ils ont des écailles, comme ceux de la rue de Bouillé. Et puis ceux du château des Ducs de Bretagne, du muséum d’histoire naturelle, du musée Dobrée, de l’ancien palais de justice, de Saint-Nicolas, Saint-Clément et Saint-Similien, de la mairie de Chantenay, du portail du Jardin des plantes, des toilettes du cours Cambronne, et le plus beau de tous, celui du tombeau de François II, dans la cathédrale.
Lions modestes ou lions pompeux, voire lions commerciaux (Peugeot, Renaldi, Heb Ken...), ils sont partout : quai Turenne, quai de la Fosse, quai de Versailles, rond-point de Paris, rue de l’hôtel de ville, rue du préfet Bonnefoy, rue de Guérande, rue Yves-Bodiguel, rue de Verdun (au moins trois), rue Tournefort, rue d'Argentré, cours des 50 otages, rue d’Orléans, rue du Couëdic, rue Harrouys, rue Kléber, rue Crébillon, rue Scribe, rue de la Distillerie, rue Eugène-Tessier, rue de Strasbourg, rue de Chateaubriand, rue Maurice-Duval, rue des Pénitentes, rue du Calvaire, rue Lekain, rue de la Bastille, rue Menou, rue Paul-Bellamy, rue d'Allonville, rue Gresset, rue Voltaire, rue Dobrée, rue Maurice-Sibille, rue de la Fosse, rue Jean-Jaurès, rue Saint-Denis, rue de Bel-Air, place Eugène-Livet, rue Belle-image… Et il en manque certainement beaucoup d’autres à ce début de recensement.




24 juillet 2010

Les Machines de l'île creusent leur trou

Lors de leur création, rappelle le dernier rapport annuel de la ville de Nantes (www.nantes.fr/ext/rapports_annuels/rapan_2009/pdf/rapport_sems_2009.pdf ), on espérait que les Machines de l'île attireraient 160 à 180.000 visiteurs par an. La SEM Nantes culture&patrimoine avait haussé la barre à 200.000*. Avec 243.500 visiteurs en 2008 et 261.450 en 2009, la mission est plus qu’accomplie.

L’exploitation devait atteindre l’équilibre financier à partir de 2009. Avec une fréquentation bien plus élevée qu’attendu, les comptes devraient donc être largement bénéficiaires.

En 2008, pourtant, la subvention d’équilibre prévue par la communauté urbaine, soit 175.000 euros, n’a pas suffi : le contribuable local a dû accorder aux Machines une rallonge de 244.000 euros.

Tarifs en hausse, fréquentation en hausse, déficit en hausse

Heureusement, il y avait une explication : « il a été décidé avec Nantes métropole de ne pas augmenter les tarifs en 2008, comme le prévoyait la DSP », expliquait le rapport annuel 2008 de la ville. « De ce fait, le résultat ressort déficitaire en 2008. »

Puisque seuls les imbéciles ne changent pas d’avis, les Machines ont augmenté leurs tarifs en 2009. Le tarif plein est passé de 6 euros à 6,50 euros (+ 8,3 %) et le tarif réduit de 5 euros à 6 euros (+ 20 %). Pas mal, quand on songe que l’inflation mesurée par l’INSEE a été de 1 % en 2008 ! Et comme en plus la fréquentation a augmenté, « de ce fait » l’équilibre prévu devait être largement atteint, n’est-ce pas ?

Hélas, le rapport 2009 de la ville avoue que, sur un budget de 3,2 millions d’euros, le trou est proche de 20 % ! Le montant exact du déficit n’est pas précisé – « environ 500 k€ par an », indique prudemment le rapport : pour une fois que les Machines ne gonflent pas leurs comptes… Il se confirme ainsi que, plus la fréquentation augmente, plus le trou financier s’agrandit (http://lameformeduneville.blogspot.com/2009_11_01_archive.html).

Perseverare diabolicum

« Les équilibres annoncés seront tenus », annonçait Jean-François Retière, vice-président de Nantes Métropole, dans un courrier à Presse Océan le 17 janvier 2008. Mais, comme disait Charles Pasqua, les promesses des hommes politiques n’engagent que ceux qui y croient…

Reste quand même une question : comment expliquer que l’équilibre qui devait être atteint avec 200.000 visiteurs ne le soit pas avec 260.000 ? Deux réponses sont possibles :
  a) Nantes culture&patrimoine s’est complètement trompé dans ses prévisions
  b) Nantes culture&patrimoine est très mauvais gestionnaire

La délégation de service public des Machines est renouvelable fin octobre. À qui Nantes Métropole a-t-elle décidé de la confier ? Toujours à Nantes culture&patrimoine, bien sûr...

22 juillet 2010

Le plan-plan patrimoine


Depuis bientôt deux ans, Nantes s’est dotée d’une direction du patrimoine et de l’archéologie, censée corriger l’image d’incurie donnée par la ville à l’occasion des fouilles de l’îlot Lambert.

La nouvelle direction, créée tambour battant (mais quand même vingt ans après l’élection du maire actuel) s’est empressée d’établir un « Plan patrimoine ». On en attendait monts et merveilles. « Le Plan patrimoine vise notamment à protéger le patrimoine de la ville, et ainsi mieux accompagner les mutations urbaines et prendre en compte les ensembles du XXe siècle non protégés à ce jour », expliquait Jean-Marc Ayrault lui-même (http://jmayrault.fr/v2/index.php?option=com_content&view=article&id=766:nantes-un-patrimoine-de-grande-valeur&catid=1:actualites-locales&Itemid=54)

Et justement, la direction du patrimoine et de l’archéologie avait une magnifique occasion de montrer sa diligence : depuis l'incendie du 17 juin 2004, l’Hôtel de la Duchesse Anne situé face au château des Ducs de Bretagne n’était plus qu’une carcasse noircie protégée des intempéries par un énorme échafaudage.

Que s’est-il passé depuis lors ? On a juste enlevé l’échafaudage : propriétaires et assureurs s’étripent, paraît-il. La ruine complète du bâtiment n’est pas loin. Ainsi disparaîtrait un intéressant témoignage du style Art déco, bel "ensemble du XXe siècle [de moins en moins] protégé à ce jour".

« On ne peut rien faire, c’est un bâtiment privé », déplore la mairie. Mais le rôle d’une municipalité est de faire avancer les choses même quand elle ne les dirige pas. Celle de Nantes s’avère plus douée pour les passages en force que pour la concertation. Il est vrai que pour qui voudrait accréditer l'idée d'une ligérianité nantaise, l'enseigne "Duchesse Anne" sent le soufre...

08 juillet 2010

Ta voilure, mon vieux Jean Blaise est trop rose au mat d’artimon

Jean Blaise, nouveau manitou de la culture et du tourisme nantais, veut unifier toutes les énergies au service de la promotion internationale de Nantes. L’idée est sans doute bonne mais, pour la mener à bien, il aurait fallu un rassembleur. Jean Blaise est au contraire un partisan. Il l’a plus d’une fois proclamé. « C’est incontestablement un projet de gauche », disait-il ainsi à propos d’Estuaire*. Derrière ses actions, on soupçonnera toujours l'instrumentalisation. Faute d'autorité morale, sa force de conviction se limitera au montant de ses budgets.
Deuxièmement, le rassemblement annoncé s'avère fort sélectif. Jean Blaise prétend réunir « tout ce qui touche à l’art et à la culture ». Et d’énumérer : « Il y a le Château, le Lieu Unique, les Machines, le Carrousel des mondes marins, le Mémorial de l’esclavage, la Fabrique et Estuaire »**. Ainsi, l'art et la culture se limiteraient aux réalisations contrôlées par la municipalité ? Et la musique ou le théâtre, entre autres, n’en feraient pas partie ?

Troisièmement, à force de survendre ses propres réalisations, Jean Blaise semble s’être auto-intoxiqué. Il a pris la grosse tête. « Ils sont reconnus mondialement et leurs noms attirent les amateurs d’art où qu’ils soient », déclare-t-il par exemple à propos des artistes d’Estuaire***. Or il n’en est (presque) rien : à part Anish Kapoor, aucun des exposants d’Estuaire ne jouit d’une réputation internationale de premier plan (http://lameformeduneville.blogspot.com/2009/01/estuaire-20072009-zro-plus-deux.html). Certes, un peu de mégalomanie ne peut pas faire de mal au poste occupé par M. Blaise. À condition qu’elle signifie viser haut et non repeindre du banal en grandiose.

Enfin, Jean Blaise aura bien du mal faire avec l’existant sans accuser les insuffisances du passé. « Jusqu’à présent, nous avions une offre riche mais éparpillée, et une offre récente puisque les Machines ou le Château des Ducs de Bretagne ne sont ouverts au public que depuis 2007 », déplore-t-il***. Il pourrait ajouter que le Mémorial et La Fabrique sont loin d’être achevés tandis que le Carrousel n’est même pas sorti des cartons. On ne saurait mieux rappeler que, depuis son élection il y a plus de vingt ans, la municipalité de Jean-Marc Ayrault a multiplié les saupoudrages dispendieux aux résultats tardifs, sans volonté d'ensemble.
________

* Entretien avec Philippe Corbou, Presse Océan, 21 août 2009.
** Propos recueillis par Guillaume Lecaplain et Stéphane Pajot, Presse Océan, 7 juillet 2010
*** Entretien avec David Pouilloux, 5 juillet 2010, site www.beta.nantesmetropole.fr. En fait d'offre "récente", le château des Ducs ne date jamais que du 15e siècle.

26 juin 2010

Carrousel : grands mots et petit bras

Avec le Carrousel des mondes marins, les Machines de l’île espèrent atteindre (en 2013…) 500.000 visiteurs par an. Est-ce une folle ambition ?

En réalité, pour un équipement touristique « structurant » implanté en plein centre d’une métropole, 500.000 visiteurs, c’est peu. C’est le niveau de fréquentation, par exemple, du zoo de Beauval, entre Tours et Vierzon, et de celui d’Amnéville, en Moselle, ou de parcs d’attraction secondaires comme Saint-Paul, dans l’Oise, Nigloland, dans l’Aube, ou Walibi, dans la région lyonnaise.

Pour rester en Bretagne, Océanopolis, à Brest (même pas la moitié de l’agglomération nantaise en nombre d’habitants) tangente les 500.000 visiteurs annuels, le safari-parc de Port-Saint-Père a dépassé 300.000 visiteurs l’an dernier et le Végétarium de La Gacilly accueille environ 150.000 personnes par an. Faire trois fois mieux que La Gacilly, est-ce si glorieux ?

Si l’on compare avec les équipements phares d’autres grandes villes, un objectif de 500.000 visiteurs est presque minable. Le Futuroscope de Poitiers dépasse 1.200.000 entrées et l’Aquarium de La Rochelle 850.000. Puisque les Machines sont un peu notre Guggenheim à nous, on les mesurera aussi au musée de Bilbao – une ville sans autre intérêt touristique et bien moins accessible que Nantes – et à ses 1.200.000 visiteurs annuels.

En définitive, les Machines ne témoignent pas d’une ambition démesurée, mais tout le contraire : malgré leurs grands mots, elles jouent petit bras. La danseuse de la municipalité nantaise a l’entrechat mollasson.

20 juin 2010

Carrousel : 3 ans de retard, 3,6 millions d'euros de dérapage

Le Carrousel des mondes marins verra donc le jour en juillet 2012. Ou peut-être en septembre. La loi des deux ans se confirme (http://lameformeduneville.blogspot.com/2010/01/dans-deux-ans-le-carrousel.html). En 2007, il devait ouvrir en 2009. Normal qu'en 2010 il soit annoncé pour 2012.

Il coûtera 10 millions d’euros, ce qui fait tiquer l’opposition municipale, bien sûr. La construction du Carrousel est actée depuis 2007, lui répond la majorité (décision en 2007, réalisation en 2012, pas de quoi se vanter…).

C’est vrai, la communauté urbaine avait voté la réalisation du Carrousel en octobre 2007. Mais le coût annoncé était alors de 6,4 millions d’euros : plus de 56 % de dérapage en moins de trois ans, avant même la pose de la première pierre, sans débat ni début d'explication, qui dit mieux ? Si chaque année de retard doit coûter plus d'un million d'euros, vivement qu'il soit fini !

Du mou dans la hausse

Difficile de savoir comment se portent vraiment les Machines de l'île. "Cette année on enregistre déjà 20 % [de fréquentation] de plus" disait récemment Pierre Orefice à Antoine Gazeau, de 20 minutes. Fort bien. Sauf que deux mois auparavant il annonçait plus de 30 % de progression à Stéphane Pajot (Presse Océan, 14 avril 2010). Comme l'an dernier, donc (http://lameformeduneville.blogspot.com/2009/12/les-machines-finissent-moins-bien.html), on dirait que la saison a bien commencé mais décélère vite.

Anachronobus

La Société d'aménagement de la métropole Ouest-Atlantique (SAMOA) vient de publier un appel d'offres pour une "mission de conduite d'opération portant sur la création d'une ligne de transport en commun type chronobus dans le cadre de l'aménagement de l'axe Est-Ouest de l'Ile de Nantes". Au programme : assistance à la définition de l'ouvrage, assistance à la rédaction du marché de maîtrise d'oeuvre, assistance au choix des autres prestataires, etc. Malgré tous ces prolégomènes, on compte que le chronobus sera mis en service au deuxième semestre 2012.

Vingt-trois ans après la fermeture des chantiers navals, vingt et un ans après l'arrivée de Jean-Marc Ayrault à la mairie de Nantes, huit ans après le début des travaux d'aménagement de l'île, sept ans après la création de la SAMOA, près de six ans après la création de la ZAC Ile de Nantes, trois ans après l'ouverture des Machines de l'île censées être un aménagement touristique "structurant"... il était bien temps en effet de songer aux transports en commun.

On admire le sens de l'anticipation des édiles nantais, car les travaux devraient ainsi être achevés à temps pour les élections municipales de 2014. Et l'essentiel est sans doute là !

19 juin 2010

Révision des 150 km pour l’éléphant

En janvier dernier, le Grand éléphant de l’île de Nantes a subi « un check-up total ». C’est du moins ce que son créateur, François Delarozière, expliquait à Presse Océan le 8 janvier. La machine avait aussi été arrêtée pendant neuf jours en octobre 2009 pour réparations. L’éléphant était donc paré pour l’année. Et toc, il vient quand même de stopper à nouveau du 10 au 18 juin, déjà fourbu.

« Nous avions pensé ne pas l’arrêter cette année en juin comme cela avait été le cas l'an passé », tente d’expliquer Pierre Orefice dans un communiqué officiel publié sur le site web des Machines. Dire qu’on avait pensé ne pas arrêter pour dire finalement qu’on arrête : à en juger par cette formulation alambiquée, les choses vont mal sous les Nefs, dont le patron nous avait habitués à des communiqués de victoire plus étincelants.

Au passage, Pierre Orefice s’embrouille les pinceaux. L’an passé, l’éléphant n’a pas été arrêté en juin mais du 27 au 30 avril. (Notons au passage que si quatre jours avaient suffi à la « révision générale » de 2009, la même « révision générale » en réclame huit en 2010 : ça n’est pas trop bon signe.)

Fâché avec les dates, Pierre Orefice ne s’entend guère mieux avec les chiffres. « Après 525 tours depuis le début de l'année 2010, un certain nombre de signes nous impose de refaire un arrêt technique », écrit-il. Un « tour » est un parcours où l’on revient à son point de départ. Or l’éléphant fonctionne par « demi tours », des nefs à la grue et de la grue aux nefs. Et d’après son calendrier officiel, quand Pierre Orefice parle de « 525 tours », il faut en réalité comprendre « 525 trajets », dans un sens ou dans l’autre.

Ce nombre impair étonne : comme l’animal est toujours rentré au bercail, où est donc passé le demi tour manquant ?

Dernier détail cruel : 525 trajets de l’éléphant représentent quelque chose comme 150 km sur le terrain.

12 juin 2010

État de délabrement

Le Tripode, construit en 1972 a été déserté par les administrations voici une dizaine d’années, puis détruit. Le département veut remplacer l’extension du musée Dobrée construite en 1974, jugée irréparable. La maison de l’administration nouvelle, construite en 1973, devrait être bientôt démolie.

Et voici que dans la liste des bâtiments en voie de cession par l’État figure l’ancienne école d’architecture de Nantes. Le ministère du budget la présente ainsi : « Locaux délabrés de 1973 voués à la démolition, proche des transports en commun. »

C'est donc quasi officiel : l’État des années 1970 était un piètre bâtisseur, au point de mettre sous les yeux des futurs architectes l'exemple même de ce qu'il ne faut pas faire. Reste à savoir s'il se débrouille mieux aujourd'hui. Quand on songe au palais de justice, le doute est permis.

18 avril 2010

Le masque du Mémorial tombe

Dans le n° 202 du magazine municipal Nantes Passion, Ophélie Lemarié fait le point sur le « projet » de la ville pour « améliorer sa visibilité et son attractivité en Europe et dans le monde ». Il paraît que Nantes n’attire pas assez les étrangers. Pourtant, elle réussit très bien quand elle veut. Elle est ainsi devenue pour les Roms de Roumanie une « véritable destination de tourisme urbain », comme dirait Jean-Marc Devanne, ex patron de l’office de tourisme.

Nantes s’est donc dotée d’un conseil consultatif à l’attractivité internationale. Celui-ci voudrait faire de Nantes une marque commerciale qui « refléterait les différences, les valeurs et les traits de caractère qui fondent l’identité du territoire ». En spécialiste du marketing, Philippe Audic, président de ce conseil, sait bien que pour développer une marque solide, il faut exploiter les éléments d’image existants. Le concept qui tient la corde, toujours selon Nantes Passion, serait « La Loire, l’Estuaire et l’Océan ; une longue tradition d’audace, un esprit d’aventure et d’innovation ».

Une longue tradition, dites-vous ? La vraie vocation du Mémorial de l’esclavage s’éclaire soudain ! On avait cru qu’il serait un haut lieu de la repentance désignant Nantes à l’opprobre international. On découvre qu’il sera en fait un hommage aux négociants, marins et armateurs nantais.

Car enfin, quelle innovation commerciale que le commerce triangulaire (vendre à l’Afrique les produits manufacturés de l’Europe, à l’Amérique les produits humains de l’Afrique, à l’Europe les produits agricoles de l’Amérique) ! Que d’esprit d’aventure chez les marins qui s’engageaient dans un tel périple via la Loire, l’estuaire et l’océan ! Que d’audace chez les armateurs qui s’asseyaient sur les droits de l’homme !

On comprend mieux, du coup, pourquoi les 2.000 plaques apposées sur l'esplanade du Mémorial mettront en valeur les expéditions négrières et non les esclaves eux-mêmes. Voilà de quoi attirer vers la ville une élite internationale d’entrepreneurs, de chercheurs et de créateurs. La marque nantaise est vraiment bien partie.

12 avril 2010

Nantes victime des Ghostbusters ?

On l'aimait bien, dans le fond. Hélas, voici peu, il a disparu. Le fantôme de Sainte-Croix n'est plus là. Oh ! personne sans doute n'a jamais vu une oeuvre d'art dans cette mosaïque à la Pacman. C'était juste un clin d'oeil impertinent dans une ville sous contrôle où toute apparence de fantaisie doit être en réalité labellisée, industrialisée et subventionnée.

Adieu donc petit fantôme. Heureusement, il en reste au moins une dizaine d'autres à travers la ville. Le plus fameux de tous étant assurément celui du nouveau Palais de justice, encore plus impertinent que celui de Sainte-Croix dans sa tenue rayée de bagnard. Tant que celui-là nous reste, tout espoir de fantaisie n'est pas perdu.